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La fast déco gagne le secteur de l'ameublement

À l'image de la mode, le secteur de l'ameublement bascule vers la fast déco. Trois associations écologistes font le point sur le sujet et demandent aux pouvoirs publics de prendre des mesures pour réduire les volumes mis en marché.

Déchets  |    |  P. Collet
La fast déco gagne le secteur de l'ameublement

Le secteur du mobilier et de la décoration intérieure suit le modèle de la fast fashion, alertent les Amis de la Terre, le Réseau national des ressourceries et recycleries et Zero Waste, ce mardi 14 mai. Leur rapport, intitulé « Tendances maison : l'envers du décor (1)  » dénonce la croissance des volumes de produits de décoration, sur le modèle de la fast fashion. Et pour sortir de cet engrenage, les trois acteurs proposent une série de mesures, la première étant de réduire les mises en marché comme essaient de le faire les pouvoirs publics avec les obligations de réduction des emballages. « C'est la mère de toutes les batailles », insiste Catherine Mechkour-Di Maria. La secrétaire générale du Réseau national des ressourceries et recycleries estime qu'aujourd'hui on est dans l'ère du tout jetable, de « la jetabilisation du monde ».

Un marché de 26 milliards d'euros

L'objectif du rapport est d'abord de documenter la « fast déco », un phénomène encore relativement peu connu et étudié, explique Pauline Debrabandere, coordinatrice de campagnes à Zero Waste. Que recoupe cette tendance ? Pour les associations, la fast déco et la fast fashion « reposent sur les mêmes pratiques : quantités astronomiques mises en marché, prix structurellement faibles assortis d'offres promotionnelles et création permanente de nouveaux besoins ».

Concrètement, le phénomène se mesure d'abord par la progression effrénée de la consommation de meubles. Entre 2017 et 2022, le nombre d'éléments d'ameublement commercialisés par les metteurs en marché concernés par la filière de responsabilité élargie du producteur (REP) a progressé de 88 %, pour atteindre 505 millions d'unités. Parallèlement, le secteur de la décoration poursuit lui aussi son essor. En 2021, les deux secteurs pèsent 26 milliards d'euros, avec chacun une part à peu près égale de 13 milliards. Depuis, le secteur de l'ameublement a dépassé les 14 milliards.

De nouveaux acteurs s'y mettent

Cet engouement pour la décoration progresse depuis les années 1980, alimenté par la volonté croissante des consommateurs d'avoir « une maison qui ressemble à ce qu'ils sont », pour reprendre les termes d'Amélie Poisson, la directrice commerciale et marketing de La Redoute citée dans le rapport. Bien sûr, les confinements de la crise Covid ont amplifié la tendance.

18,7 kg

C'est la quantité de déchets d'ameublement collectés par habitant en 2022.
En conséquence, depuis vingt ans, le secteur n'a cessé d'attirer de nouveaux acteurs. Ceux, traditionnels, de l'ameublement ont été rejoints par les grandes surfaces alimentaires (qui initialement ne proposaient pas de rayon décoration), puis les spécialistes historiques de la fast fashion, comme H&M et Zara, qui ont développé des gammes « home », puis les géants du e-commerce et, enfin, les spécialistes de l'« ultra fast fashion » comme Temu.

Un impact croissant sur la consommation de ressources

Sans grande surprise, les conséquences de la fast déco sont du même ordre que celles de la fast fashion. Pierre Condamine, chargé de la campagne surproduction aux Amis de la Terre, rappelle notamment que l'accélération de la consommation est l'une des causes de l'avancée régulière du Jour du dépassement. Et de mentionner que, selon l'Agence de la transition écologique (Ademe), entre 50 et 80 % de l'impact environnemental des meubles ont pour origine la phase de production.

En l'occurrence, une ressource est particulièrement mise à contribution : le bois. Toujours selon l'Ademe, ce matériau reste le plus fréquemment utilisé pour la fabrication des éléments d'ameublement, avec une proportion de 61 % de produits constitués majoritairement de bois. Et désormais, on ne parle plus de forêt (avec la biodiversité associée), mais de « champs de bois » destinés aux coupes rases, déplore le responsable des Amis de la Terre.

Le réemploi malmené

La production de déchets n'est pas en reste. En 2022, près de 1,3 million de tonnes de déchets d'ameublement ont été collectées par la filière REP, soit 18,7 kg par habitant. Et cela ne prend pas en compte le mobilier collecté hors filière REP, ni les petits objets de décoration. Et aujourd'hui, le réemploi et la réutilisation restent encore marginaux, avec seulement 3 % des tonnages collectés.

Sur ce sujet, Catherine Mechkour-Di Maria explique que les ressourceries sont confrontées à un vrai défi. Les acteurs collectent de plus en plus de volumes, mais d'une qualité de moins en moins bonne. Aujourd'hui, les articles de décoration et le mobilier représentent 37 % des apports. Conséquences : beaucoup d'articles vont directement au recyclage et les acteurs manquent de place (le mobilier étant encombrant).

Étendre et renforcer la REP

Surtout, le coût du réemploi du mobilier est de l'ordre de 1 900 euros par tonne, ce qui représente un reste à charge de 560 euros une fois retranchées les recettes des ventes. Pour le financer, les éco-organismes versent 160 euros par tonne avec les fonds réemploi. Pour éponger les 400 euros restants, les ressourceries doivent jongler avec la revente de produits plus rémunérateurs, comme les textiles qui se revendent mieux et mobilisent moins de foncier.

Pour sortir de cette fast déco, les associations propose plusieurs mesures. La première, et la plus importante, est la réduction des quantités de meubles et d'éléments de décoration commercialisées. La REP est ensuite sollicitée : élargissement de son périmètre aux articles de décoration ; doublement du fonds réparation pour l'ameublement ; lancement de bonus réparation adaptés (c'est-à-dire abaissant le coût des réparations en deçà du tiers du prix du neuf) ; malus dissuasifs pour les produits non recyclables ou fabriqués avec des ressources non gérées durablement. Et comme pour la fast fashion, les associations demandent une limitation et un encadrement des pratiques marketing et de la publicité incitant à la surconsommation.

1. Télécharger le rapport des trois associations
https://www.actu-environnement.com/media/pdf/news-44048-rapport-fast-deco.pdf

Réactions1 réaction à cet article

Il y a aussi les jardineries , comme Truffaut, Jardiland et Baobab qui développent des zones de décoration dans leurs magasins traditionnels avec de nombreux articles sans aucun rapport avec le jardinage, assorties souvent de produits alimentaires : pains d 'épices, spécialités locales, confitures, jus de fruits etc...je ne trouve pas cela normal. Du coup les petites boutiques spécialisées des centres-villes disparaissent encore plus vite et les consommateurs en sont réduits à prendre leur voiture pour aller dans ces zones acheter tout et n'importe quoi. Où est la limite ? Pourquoi ne pas les autoriser aussi à commercialiser des vélos, des articldes de sport, de la poissonnerie, de la boucherie ??? C'est le grand n'importe quoi qui continue.

gaïa94 | 16 mai 2024 à 18h25 Signaler un contenu inapproprié

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