Par la loi du 30 décembre 1991, également appelée loi Bataille, du nom du Député du Nord, Christian Bataille qui fut son rapporteur, le Gouvernement avait quinze ans pour approfondir les recherches et trouver une solution pour le stockage des déchets les plus dangereux, c'est-à-dire ceux qui résultent de l'activité des centrales nucléaires et ayant pour certains une durée de vie de plusieurs millions d'années. Cette loi définissait trois axes principaux de recherche (la séparation et la transmutation, le stockage en couches géologiques profondes et l'entreposage de longue durée en surface) pour la prise en charge des déchets de haute activité et à vie longue produits dans les réacteurs nucléaires (~ 15 tonnes/an pour la France) et donnait rendez-vous en 2006 pour faire le bilan des différentes propositions.
C'est dans ce contexte et conformément à la loi de février 2002 sur la démocratie de proximité que la Commission nationale du débat public (CNDP) avait été chargée d'organiser un débat national sur la gestion des déchets radioactifs.
Permettre aux citoyens de s'informer et d'exprimer ses opinions et ses préoccupations sur la question des déchets radioactifs et de leur gestion et faire en sorte que s'engage une réflexion sur les processus de prises de décision à mettre en œuvre dans les dix à quinze années à venir, constituaient les deux objectifs ambitieux de ce débat.
Le débat devait commencer par des auditions du public dans les trois territoires concernés par les axes de recherche* sur la gestion des déchets radioactifs : Bar-le-Duc, Saint-Dizier, Pont du Gard et Cherbourg. En octobre, 3 réunions publiques à dominante scientifique et technique devaient être organisées à la Cité des sciences et de l'industrie de la Villette à Paris afin que les citoyens débattent des problématiques techniques soulevées aujourd'hui et demain par les trois axes de recherche avec les différents protagonistes du nucléaire : maître d'ouvrage, opérateurs, experts et associations.
Mais Mi-octobre, six associations (Amis de la terre, Agir pour l'environnement, France nature environnement, Réseau action climat, Greenpeace et le WWF) ont annoncé qu'elles n'y participeraient pas, ce qui a conduit à l'annulation des débats de Cherbourg et Paris.
Les associations avaient décidé de boycotter le débat qui, selon elles, ne respecte pas les règles de transparence requises.Cette décision faisait suite à une lettre du ministre délégué à l'industrie, François Loos, adressée le 12 octobre dernier à la CNDP qui indiquait que certaines informations ne pourraient pas être discutées en public. La réponse du gouvernement enterre tout espoir d'un débat sur les risques liés au nucléaire dans notre pays, avaient indiqué les associations soulignant qu'il s'agissait d'une décision grave qui nous rappelle que nucléaire et démocratie ne sont toujours pas compatibles au XXIe siècle.
La Commission nationale du débat public a tenu à maintenir la réunion de Lyon prévues le 3 novembre et a précisé que les réunions annulées en octobre (Paris et Cherbourg) étaient reprogrammées**. Une cinquantaine de membres du réseau Sortir du nucléaire ont d'ailleurs manifesté de manière symbolique devant la salle où débutait la première séance du débat public national.
Le débat se poursuivra en novembre avec une série de conférences-débats organisées à Joinville, Caen, Nancy et Marseille** sur le thème « Démocratie et déchets radioactifs ». Au terme général et parfois contesté de gouvernance, la Commission particulière du débat public a incité la CPDP a en modifié fortement les contenus.
Un débat public ayant pour thème ''équitable et partage des connaissances : le cas général et le cas secret défense'' aura notamment lieu Lundi 14 novembre à 17h à Caen. Agir pour l'Environnement, Les Amis de la Terre, France Nature Environnement, Greenpeace France, le Réseau Action Climat et WWF France ont annoncé qu'elles seront présentes lors de ce débat qu'elles ont qualifié d'exceptionnel et dont elles saluent la tenue. Pour la première fois en effet, les différents protagonistes de ce dossier (Etat, opérateurs publics et autorités de sûreté) devront s'expliquer clairement sur la notion de secret-défense. Nous serons là pour obtenir des explications de la part de la haute administration, démontrer les limites du positionnement officiel et participer avec la CNDP et les experts indépendants à l'identification de solutions. Pour nous, l'information et l'accès à l'information est en effet un préalable incontournable au débat, ont rappelé l'ensemble de ces associations. Leur non-participation actuelle aux débats publics ne résulte pas en effet d'un a priori négatif mais bien des blocages successifs nés de la non-transparence de la filière nucléaire et de son immaturité démocratique, ont-elles indiqué.
Parallèlement au débat et qu'elles qu'en seront les conclusions, l'EPR, projet franco-allemand développé depuis 1992 par Siemens et Areva, se fera. Inscrit dans la loi d'orientation sur l'énergie votée au Parlement en juin, il est destiné à prendre progressivement le relais des 58 réacteurs qui équipent les 19 centrales nucléaires françaises. En France, la première centrale à eau pressurisé, celle de Flamanville, doit entrer en fonction en 2012. Le coût de remplacement des 58 réacteurs en service dans les 19 centrales nucléaires d'EDF devrait atteindre 130 milliards d'euros.
Le 26 septembre dernier des appels d'offres pour la construction de l'EPR auxquels les industriels doivent répondre pour le 5 janvier, ont d'ailleurs été lancé.
*La séparation/transmutation, le stockage en couches géologiques profondes, l'entreposage de longue durée en surface et sub-surface.
**http://www.debatpublic-epr.org/actualite/calendrier-reunions.html
***4 conférences-débats :
- Aspects socioéconomiques locaux, le 9 novembre à Joinville en Haute-Marne.
- Débat public équitable et partage des connaissances: le cas général et le cas secret défense, le 14 novembre à Caen.
- Equilibre entre territoires et équilibre entre générations, le 18 novembre à l'Ecole des Mines de Nancy.
- Qui décide quoi, quand et comment ?, le 24 novembre au Parc des Expositions et des Congrès de Marseille