Le BRF est constitué de rameaux d'arbres de diamètre inférieur à 7 cm, broyées puis épandues et incorporées aux premiers centimètres du sol. Il peut être produit lors de l'élagage des bords d'autoroutes, le long des lignes à haute tension ou aux abords des voies ferrées, lors de la taille des haies et des arbres ornementaux ou encore lors de l'exploitation forestière. C'est donc du bois encore « vivant » , par conséquent très riche en nutriments, sucres, protéines, celluloses et lignines. Il a été démontré à travers de nombreuses études canadiennes que chacun de ces composants joue un rôle précis et spécifique dans la constitution et le maintien de la fertilité des sols. Le BRF est donc considéré comme un amendement et un engrais susceptibles d'apporter au sol nutriments, structure et énergie. Sa spécificité vient de son action sur la vie du sol, ce matériau semble en effet susciter un ensemble de réactions complexes qui structurent le sol, gèrent les nutriments et limitent les organismes pathogènes.
Le sol est un écosystème qui s'autorégule, où plantes, bactéries, champignons et autres organismes sont très intimement liés. Au cœur de ces relations se place la matière organique, élément essentiel en agriculture qui depuis plusieurs années fait l'objet de toutes les attentions puisqu'elle semble se raréfier dans les sols agricoles, mettant en péril leur équilibre et leur productivité. La matière organique est très importante car elle constitue la réserve en nutriments pour la plante même si celle-ci ne peut pas l'assimiler directement. Ce sont les micro-organismes du sol qui transforment la matière organique en CO2 et en nutriments disponibles alors pour les plantes. Une partie du carbone qui n'est pas libéré dans l'atmosphère sous forme de CO2 se retrouve au sein des particules d'humus qui s'agrègent entre elles pour créer un sol aéré, où l'eau et l'air peuvent circuler facilement. Les apports en matière organique sont essentiels puisqu'avec cette ressource, l'écosystème sol peut se construire et se consolider afin de résister aux perturbations (sécheresse, maladies, gel,…).
Ainsi, l'apport de BRF serait un moyen de fournir au sol des nutriments essentiels, des éléments traces, des molécules et de favoriser le développement d'organismes capables d'améliorer la structure physique du sol. Plusieurs expériences ont permis de démontrer qu'un apport de BRF et éventuellement de lisier permet d'augmenter rapidement le taux de matière organique : il se stabilise souvent au double de sa valeur initiale après un an. L'apport de BRF peut stimuler fortement la mésofaune : augmentation de l'ordre de 500% après un an. Une fois le système biologique des nutriments mis en place après un an en conditions tempérées, il a été constaté que le BRF apporte beaucoup d'azote et de phosphore facilement assimilables par les plantes ce qui sous-entend une moindre utilisation des engrais.
Ces effets bénéfiques sur la structure et la composition du sol ont un impact direct sur la production des plantes. En effet, la technique canadienne a été utilisée avec grand succès dans la culture de la pomme de terre, de plusieurs légumes, de fruits tels que les fraises ou les framboises, de céréales tels que l'orge ou l'avoine. Il en découle des économies en eau d'irrigation dues à la capacité de rétention de l'humus formé qui peut aller jusqu'à 20 fois son poids et à la capacité d'accumulation et de gestion de l'eau par les organismes du sol. Les champs traités au BRF sont donc moins sensibles à la sécheresse. Au niveau du rendement, il a été observé une augmentation en culture maraîchère de l'ordre de 180% sur la tomate amère 290% sur les fraises, 175% sur les céréales, 260% sur une prairie et jusqu'à 1000% dans certains cas comme pour l'aubergine. Sur le plan de la résistance à certains pathogènes, les résultats sont encourageant avec par exemple la disparition des problèmes liés aux nématodes en Afrique, ou l'apparition d'une protection des fraises contre les pucerons.
Si l'apport de matière organique n'est pas nouveau dans l'agriculture, un apport sous la forme de BRF semble être une méthode efficace qui demande à se faire connaître. Les conséquences positives qu'elles engendrent sur l'écosystème plante-sol laissent supposer une réduction de l'utilisation de fertilisants chimiques, des produits phytosanitaires, de l'irrigation en période critique et une diminution de l'érosion des sols. D'ailleurs, la technique s'est exportée du Canada pour arriver en Europe par la Belgique où un projet d'adaptation de la technique à l'agriculture wallonne est en cours. Depuis 2002, le Centre des Technologies Agronomiques (CTA) met en œuvre des recherches visant à adapter cette technique et à évaluer son intérêt ainsi que sa faisabilité. Ces recherches reçoivent l'appui de la Région Wallonne et suscitent des perspectives intéressantes : amélioration des qualités physiques du sol par résistance à l'érosion et à la compaction, biostimulation de la fertilité du sol avec une augmentation des capacités de rétention et la diminution des intrants et meilleure utilisation d'un sous-produit par valorisation des tailles de haies. Une association belge* a d'ailleurs été créée afin de promouvoir le bois raméal fragmenté.
Le CTA développe en Wallonie une expertise sur cette méthode afin d'en déterminer les paramètres techniques et environnementaux. Des essais sont menés pour établir des normes, un guide de bonnes pratiques et mettre en place une filière.
En France, cette technique n'est pas encore employée à grande échelle. Elle est toutefois appliquée par un réseau d'amateurs au sein de jardins expérimentaux**. Pour Jacky Dupety, agriculteur sur les causses du Quercy et pionnier de la technique en France, culturellement le BRF demande un vrai changement : pas de travail du sol, peu de désherbages, pas de traitements phytosanitaires. Engagé depuis février 2004 dans l'expérimentation du BRF suite à la canicule 2003, cet agriculteur cherchait à remettre en vie sa terre. Après un an de « traitement » , Jacky Dupety a eu le plaisir de constater que ces citrouilles, courges et melons poussaient et résistaient à la chaleur sans aucune irrigation de sa part. Des études de sol réalisées par un laboratoire indépendant ont démontré un rôle bénéfique du BRF sur la structuration du sol, sur la mésofaune et une plus grande richesse en phosphore et potassium par rapport au sol témoin. Convaincu de la technique, l'agriculteur ne s'arrêtera pas en si bon chemin même si selon lui trouver de la ressource, des branches et les broyer n'a pas été facile.
La communauté de commune du Val-du-Thouet dans les Deux Sèvres se penche depuis peu sur la question du BRF. L'idée est de valoriser les coupes paysagères des parcs et jardins de la commune et des habitants en BRF en mettant à disposition un broyeur adapté. Une des communes a commencé à définir les types de branchages et les quantités à disposition. Les travaux vont se poursuivre avec les autres communes petit à petit mais aucune expérimentation concrète de BRF n'est prévue pour l'instant.
En revanche, plusieurs colloques sont prévus en France en octobre prochain et février 2007 pour faire connaître la pratique.
* http://www.aggra.org/
**www.lesjardinsdebrf.com