Vendredi dernier, le ministère de l'Ecologie et du Développement durable a annoncé que la France venait de transmettre à la Commission européenne ses autorisations de droits d'émissions de CO2 au secteur industriel et énergétique pour la période 2008-2012.
Ce plan, transmis en retard puisque les 25 États membres avaient jusqu'au 30 juin dernier pour le faire parvenir, définit les quotas de CO2 qui seront attribués annuellement aux secteurs industriels et énergétiques. Il a été bâti en partant des émissions constatées, des prévisions de croissance de l'activité, et en appliquant un taux d'effort global de 3,4 % qui incitera les industriels à poursuivre leurs efforts pour la maîtrise de leurs émissions, explique le ministère de l'Ecologie et du Développement durable.
S'agissant des installations existantes déjà soumises en première période, le PNAQ pour la période 2008-2012 prévoit une baisse de 5,9 % des quotas par rapport à la période 2005-2007 : 141,6 MtCO2/an contre 150,4 MtCO2/an. La réserve pour les nouveaux entrants est, quant à elle, fixée à 9 MtCO2/an pour couvrir les besoins liés aux investissements nouveaux.
Soulignant que, les émissions par habitant en France sont parmi les plus faibles de l'Union européenne des 25 (6,2 contre 8,4 Mt/an/habitant dans l'UE, dont 9,9 en Allemagne et 9,2 Mt au Royaume-Uni), le ministère estime que ce nouveau plan de quotas encouragera les secteurs industriels et énergétiques français à poursuivre leurs efforts de maîtrise des émissions de gaz à effet de serre déjà engagés depuis une vingtaine d'années, tout en préservant la compétitivité des entreprises concernées, et à développer des nouvelles technologies utiles pour un avenir sobre en carbone.
Cependant pour les ONG, ce deuxième plan national d'allocation de quotas présenté en juin et qui prévoyait alors d'autoriser l'émission de 152,61 Mt de CO2 par an, était beaucoup trop laxiste envers l'industrie.
Aujourd'hui, le WWF et le Réseau Action Climat France (RAC-F) appellent la Commission européenne à le rejeter. Ils estiment que le gouvernement se montre très généreux envers les industriels en leur distribuant gratuitement trop de quotas. Nous avions appelé à une diminution des quotas d'au moins 10 %, pour tenir compte des surallocations constatées en 2005 (avec des quotas qui ont dépassé de 12 % les émissions réelles !). Ce plan ne répond pas à l'impérieuse nécessité de réduire drastiquement les gaz à effet de serre. Au contraire, le gavage de quotas continue !, précise Edouard Toulouse du WWF. Rappelons que la sur-allocation a déjà et risque dans le futur de déstabiliser le Système Européen d'Echange de Quotas d'Emissions de CO2.
Outre des reproches envers une trop modeste diminution des quotas par rapport au PNAQ précédent, les ONG soulignent dans un communiqué que la France est le seul pays à permettre à ses industriels de mettre en réserve leurs quotas excédentaires de la période 2005-2007 à la période suivante.Ainsi, d'importantes quantités de quotas inutilisés s'ajouteront au nouveau plan pour 2008-2012 !
Par ailleurs, selon elles, le ministère ignore les remarques adressées par les ONG et le public lors de la consultation mise en place en juillet*.
Dernier reproche formulé : l'idée proposée initialement dans le plan pour rendre payants 10 % des quotas distribués (« mise aux enchères »), a été enterrée. La vente d'une partie des quotas présentait le double avantage d'inciter, à l'heure des choix, les installations à s'orienter vers des technologies faiblement émettrices et de dégager des revenus susceptibles d'être redistribués à des fins environnementales ou sociales, regrette Morgane Créach du RAC-F.
La Commission a trois mois pour se prononcer sur ce plan. Pour son premier projet de plan national d'affectation de quotas, la Commission européenne avait obligé la France à revoir sa copie.
*Synthèse Finale de la consultation du public