Le programme français EFFLOCYA, initié en 1998, a mis en évidence qu'en France, la prolifération des cyanobactéries dans les eaux de baignade ou dans les eaux de production d'eau potable, constituait un risque sanitaire émergent en raison de la présence potentielle de cyanotoxines. C'est pourquoi, les ministères de la santé et de l'environnement ont respectivement saisi l'Agence française de sécurité sanitaire des aliments (Afssa) afin d'effectuer une évaluation des risques liés à la présence de cyanobactéries dans les eaux destinées à la consommation humaine et l'Agence française de sécurité sanitaire de l'environnement et du travail (Afsset) pour l'évaluation des risques liés à la baignade.
Afin de remplir la mission qui leur a été confiée, les deux agences ont collecté puis analysé, les données auparavant dispersées au sein de diverses entités comme les DDASS et les DRASS, les Agences de l'eau, le Syndicat des producteurs et distributeurs d'eau ou encore les DIREN. Ceci leur a permis de dresser un état actualisé des connaissances relatives aux cyanobactéries en France et de créer une base de données commune Afssa-Afsset, comportant des éléments statistiques sur la présence de ces microorganismes sur le territoire national.
Après plusieurs années de travail, les deux agences viennent de rendre leurs conclusions. Il ressort qu'en termes d'évaluation des risques, le groupe d'experts de l'Afssa ne peut se prononcer que sur une seule des toxines, la microcystine LR, l'unique toxine pour laquelle il existe des seuils de recommandation de l'OMS. L'Afssa considère que le risque de sa présence dans les eaux destinées à la consommation humaine est négligeable.
Cependant, l'agence propose de faire évoluer la réglementation pour actualiser la méthode d'analyse des microcystines et notamment les paramètres qui sont à rechercher dans l'eau potable.
Par ailleurs l'Afssa recommande de modifier les traitements de l'eau destinés à la rendre potable lorsqu'une prolifération de cyanobactéries est constatée dans l'eau brute. En effet, certains traitements actuels comme les algicides provoquent la mort des cellules des cyanobactéries mais entraînent de ce fait la libération des toxines plus difficiles à éliminer que les cellules. Selon l'Afssa, la prévention des proliférations est la meilleure méthode pour garantir l'absence de toxines dans l'eau d'alimentation. Si malgré tout des cyanobactéries sont détectées l'agence recommande que soit interdit l'emploi à titre curatif des algicides au profit de traitement mécaniques destinés à éliminer les cellules sans les endommager. Toutes les méthodes qui piègent la biomasse sans libérer les toxines sont à préférer. L'Afssa cite par exemple le traitement par coagulation – floculation – flottation – filtration qui présente l'avantage de récupérer les algues sans les détériorer mais ne peut pas traiter les toxines qui seraient déjà libérées. D'autres traitements sont à prévoir pour récupérer les toxines comme par exemple l'ozonation couplée à une exposition aux rayons ultraviolets ou à de l'adsorption sur du charbon actif.
De son côté, le groupe d'experts de l'Afsset a procédé à une évaluation des risques sanitaires pour l'Homme dans les eaux destinées à la baignade et aux loisirs nautiques d'après des hypothèses d'exposition maximalistes. Selon l'Afsset, tous les cours et plans d'eau destinés à la baignade et/ou à la pratique de sports nautiques de sites ou zones aménagées ou non constituent des sources éventuelles d'exposition aux cyanotoxines. En France, la surveillance et le contrôle sanitaire ne concernent que les sites de baignade et autres activités aquatiques récréatives dits « aménagés ». C'est pourquoi, à partir de ces travaux, des seuils de qualité pour les eaux de baignade ont été déclinés et des recommandations pour prévenir l'exposition humaine ont été élaborées. Ces dernières concernent notamment l'amélioration de la surveillance, la prévention de la contamination des eaux de loisirs et l'information du public.
Face au manque de connaissance et de données concernant les cyanobactéries et plus précisément leurs toxines, les deux agences recommandent la mise en place d'un programme national de financement de recherches spécifique aux cyanobactéries et cyanotoxines.