C'est le troisième report du plan, qui devait initialement être présenté par le Premier ministre Jean-Pierre Raffarin le 27 novembre, puis le 9 décembre, et enfin le 15 décembre. Une ultime réunion interministérielle s'est tenue jeudi soir pour finaliser le plan et n'a pu aboutir. Officiellement, il ''souhaite se consacrer d'abord au traitement des conséquences des inondations dans le sud de la France''. La ministre de l'Ecologie Roselyne Bachelot serait à l'origine du report, selon plusieurs sources proches du dossier. Le plan, amoindri au fil des arbitrages gouvernementaux, aurait été trop visiblement en dessous des enjeux.
Le ''plan climat 2003'' est indispensable pour parvenir à l'objectif de Kyoto d'une stabilisation des émissions françaises de gaz à effet de serre à l'horizon 2010. Il succède à un premier ''programme national de lutte contre l'effet de serre'' décidé en 2002, qui a été depuis amputé de sa mesure phare, l'écotaxe énergie. Selon les experts, 10 à 30% des mesures de ce programme initial ont été mises en oeuvre et la France ne peut en l'état remplir son objectif de Kyoto.
La mission interministérielle sur l'effet de serre, qui travaille depuis des mois à ce plan, avait également proposé de réduire la vitesse sur les autoroutes à 120 km/h, afin de diminuer la consommation de carburants et d'instaurer un système de bonus-malus à l'achat d'un véhicule, en fonction de ses émissions. Elle avait encore évoqué une hausse de la TIPP sur le gazole.
Le Réseau Action Climat - France (RAC-F) et ses associations membres regrettent le nouveau report de l'annonce du Plan Climat 2003 qui était programmée le lundi 15 décembre.
''Il est donc plus qu'urgent de mettre en oeuvre un Plan Climat efficace et à la hauteur des enjeux du réchauffement climatique. Nous avons joué le jeu en participant à la préparation de ce plan et avons formulé pour chaque secteur des propositions de mesures efficaces et réalistes Au final nous risquons de perdre un an de travail et, pendant ce temps là, les gaz à effet de serre s'accumulent dans l'atmosphère !'' s'impatiente Olivier Louchard, coordinateur du RAC-F.
Aujourd'hui, force est de constater que de nombreuses ''tergiversations'' de la part du gouvernement mettent à mal un Plan Climat 2003 qui risque fort de devenir un Plan Climat 200...4. ''Nous avons de bonnes raisons de croire que ces reports successifs sont le fruit de négociations inter ministérielles très tendues sur des mesures concernant des secteurs aussi essentiels que ceux du transport et des bâtiments.'' précise Edouard Toulouse, chargé de programme Energie-Climat de WWF-France.
Enfin, l'inquiétude des associations du RAC-F repose aussi sur le contenu même du Plan Climat 2003-4. ''La version provisoire du Plan et certains ''signaux'' (suppression des crédits PDU dans le budget 2004, mesure de limitation de la vitesse sur autoroute non retenue, etc.) nous laissent penser que le Plan Climat 2003-4 ne sera pas à la hauteur des enjeux mais ne sera qu'une nouvelle opération de communication du gouvernement.'' conclut Laetitia De Marez, chargée de campagne Climat pour Greenpeace France.
Le Protocole de Kyoto a été établi en Décembre 1997 par les négociateurs des 180 Etats adhérents à la CCCC (Convention Cadre sur les Changements Climatiques proposée par les Nations Unies au sommet de Rio en 92). Il prévoit de réduire les émissions de gaz à effet de serre à 94,8% des niveaux enregistrés en 1990 grâce à des engagements juridiquement contraignants en terme de droit international.
Le protocole de Kyoto fixe des objectifs spécifiques aux pays industrialisés qui sont les plus gros émetteurs de gaz à effet de serre. La période d'engagement s'étale entre 2008 et 2012 en application des réductions certifiées obtenues entre 2000 et 2007. Chaque pays s'est vu fixer des cibles maximales individuelles ou '' quantité attribuée ''. Ces différenciations ont été négociées par chacun des pays. Elles ne reposent pas sur des critères objectifs tels que le nombre de la population ou les émissions anthropiques de gaz à effet de serre de chacun de ses pays. Pour entrer en vigueur, le protocole doit être ratifié par 55 pays représentant ensemble au moins 55 % des émissions de gaz. Les Etats-Unis mettent son application en danger puisqu'ils ont abandonné l'idée de ratifier le protocole. Or, ils sont à l'origine de plus d'un quart des émissions mondiales de gaz à effet de serre tout en représentant moins de 5 % de la population.
La mise en œuvre du protocole de Kyoto n'a vraiment été décidée qu'à la conférence de Bonn en juillet 2001. C'est un sujet de désaccord constant entre l'Europe et les Etats-Unis.