Les variétés de colza tolérantes aux herbicides devraient être interdites d'ici moins d'un mois. C'est ce que prévoient un projet de décret et deux projets d'arrêtés soumis pour avis au Haut conseil aux biotechnologies (HCB) par les ministres de la Transition écologique, de la Recherche et de l'Agriculture.
Depuis plusieurs années, de nombreux acteurs dénoncent les méthodes d'obtention végétale par mutation génétique, connues sous le terme de mutagénèse. Saisi par des associations, le Conseil d'État a tranché en février dernier. Il a demandé à l'État de fixer par décret, dans un délai de six mois, la liste limitative des méthodes et techniques de mutagénèse traditionnellement utilisées et dont la sécurité est avérée depuis longtemps. Le projet de décret exclut de cette liste la mutagenèse aléatoire in vitro. Les variétés de colza tolérantes aux herbicides, obtenues par cette méthode, seront donc radiées du catalogue officiel et interdites de culture et de commercialisation en France. Les cultures en cours (déjà semées ou plantées) pourront néanmoins être menées à leur terme. Mais d'autres variétés tolérantes au herbicides (VTrH) pourront être cultivées, comme le montrent les avis du HCB...
Les variétés obtenues par mutagénèse in vitro sont des OGM
Le projet de décret exclut du champ des organismes génétiquement modifiés (OGM) les techniques de mutagénèse aléatoire, à l'exception de la mutagenèse aléatoire in vitro qui consiste « à soumettre des cellules végétales cultivées in vitro à des agents mutagènes chimiques ou physiques ». Pour rappel, la mutagénèse consiste à augmenter, à l'aide d'agents physiques ou chimiques, la fréquence d'apparition de mutations végétales, autrement dit de modifications de l'ADN.
Le premier projet d'arrêté liste 96 variétés obtenues par mutagénèse aléatoire in vitro et enregistrées au catalogue européen par d'autres pays que la France, et sept variétés inscrites au catalogue français. Ces variétés « seront interdites à la commercialisation et à la mise en culture en France, faute d'avoir été évaluées et autorisées au titre de la réglementation relative aux OGM ». Cependant, les cultures qui ont déjà démarré cette année pourront être menées à leur terme, précise le projet de décret.
Le deuxième projet d'arrêté radie du catalogue officiel français les variétés issues de mutagenèse aléatoire in vitro, autrement dit les variétés de colza tolérantes aux herbicides, commercialisées sous le nom de colza Clearfield®.
Pas d'interdiction pour les VTrH obtenues par d'autres méthodes
Il estime qu'il serait plus pertinent de s'intéresser aux caractères des mutants et aux impacts environnementaux associés plutôt qu'à la technique d'obtention végétale. « Si la technique de mutagenèse aléatoire sur cellules végétales in vitro est potentiellement génératrice d'une grande diversité de phénotypes, les produits de cette technique actuellement cultivés en France sont tous, à notre connaissance, des variétés de colza Clearfield®. (...) On pourrait donc s'interroger sur l'impact environnemental associé au caractère de tolérance à ces herbicides ». D'autant que ce caractère est obtenu par d'autres techniques, notamment pour des variétés de tournesol. « Elles ont été générées soit par mutations spontanées, soit par mutagenèse in vivo sur graines, techniques non concernées par le projet de décret ».
Par ailleurs, le CEES (2) souligne que le projet de décret ne répond pas à l'injonction du Conseil d'État de lister les méthodes de mutagénèse sûres. « Au lieu de cela, il complète la liste des techniques entrant dans le champ d'application de la directive 2001/18 en ajoutant à la mutagenèse dirigée, la mutagenèse aléatoire in vitro telle que définie par le Conseil d'État ».