Deux décrets portant sur les Zapa ont été publiés le 22 février au Journal officiel. Il ne s'agit cependant que d'une première étape. Le plus dur reste à faire pour mettre en œuvre cet outil issu du Grenelle destiné à lutter contre la pollution atmosphérique, en particulier celle liée aux particules.
"Dans les communes ou groupements de communes de plus de 100.000 habitants où une mauvaise qualité de l'air est avérée, notamment par des dépassements de normes réglementaires ou des risques de dépassements de ces normes, une zone d'actions prioritaires pour l'air, dont l'accès est interdit aux véhicules contribuant le plus à la pollution atmosphérique, peut être instituée, à titre expérimental, afin de lutter contre cette pollution et notamment réduire les émissions de particules et d'oxydes d'azote", prévoit la loi Grenelle 2.
Sanctions applicables et véhicules autorisés
En application de ces dispositions, le premier décret fixe les sanctions applicables en cas d'infraction aux mesures d'interdiction ou de restriction de circulation dans les Zapa. Soit 135 euros pour les poids lourds, les bus et autocars, et 68 euros pour les autres véhicules. La commission de ces infractions peut également donner lieu à l'immobilisation du véhicule.
Le décret procède par ailleurs à l'harmonisation de la classification des véhicules en fonction de leurs émissions polluantes. Mais il renvoie à un arrêté interministériel le soin d'établir une nomenclature des véhicules tenant compte "de leur date de première immatriculation, de la norme Euro qui leur est applicable ou de leur motorisation". Le projet d'arrêté, soumis à consultation publique en avril 2011, a fait l'objet d'un avis du Conseil national de l'air en juin, mais sa publication se fait attendre.
Le deuxième décret fixe la liste des véhicules pour lesquels l'accès aux Zapa ne peut être interdit. Il s'agit des véhicules d'intérêt général, de ceux relevant du ministère de la défense et de ceux portant une carte de stationnement pour personnes handicapées. Les collectivités locales peuvent aussi présenter des demandes en vue de déroger à l'interdiction de circulation. "Ces demandes sont accompagnées d'une étude environnementale", précise le décret.
La publication du décret autorisant les Zapa reportée
Le souci vient du fait que la loi Grenelle 2 prévoit un troisième décret autorisant les projets Zapa. Or, le secrétariat général du Gouvernement estime que la publication de ce décret serait "prématurée" et n'envisage celle-ci "qu'au cours du premier trimestre 2013". Pourtant, rappelle la fédération France nature environnement (FNE), qui organisait un séminaire sur la question le 7 février dernier à l'Assemblée nationale, la mise en œuvre des Zapa est en phase de préparation dans huit grandes agglomérations candidates : Nice-Côte d'Azur, Bordeaux, Grand Lyon, Grenoble-Alpes Métropole, Clermont Communauté, Pays d'Aix, Plaine Commune et Paris.
Alors que l'échéance des dépôts des candidatures est fixée au 13 juillet 2012 par la loi, FNE s'étonne que le cadre national ne soit pas stabilisé. "Pour définir les périmètres et les caractéristiques de la Zapa, des études préalables au dépôt de candidatures sont mises en œuvre (état du parc de véhicules, enquête ménage-déplacement, bilan de la qualité de l'air…). Malgré un travail important, la majorité des collectivités déclarent honnêtement ne pas pouvoir communiquer sur le contenu de ces études qui n'est d'ailleurs pas encore défini officiellement. En effet, se pose encore la question d'inclure le chauffage en plus des transports", indique la fédération.
Autre inquiétude, la mise en place des Zapa a pour objectif de lutter contre la pollution due aux particules. Or, la France connaît de nombreuses alertes à la pollution aux particules (14930) et se trouve sous la menace d'une condamnation par la Cour de justice de l'UE. La sénatrice Fabienne Keller (UMP – Bas-Rhin) indiquait, en octobre dernier, dans son rapport sur l'application du droit communautaire de l'environnement que "la condamnation sembl[ait] inévitable" pour les particules. Dans ce contexte, le député Philippe Tourtelier (SRC – Ille-et-Vilaine), à l'occasion de la présentation de son rapport sur l'application de la loi Grenelle 2, pointait "l'incohérence" du report de la publication du décret autorisant les Zapa.
Concertation et complémentarité à la peine
Se pose aussi la question de la concertation. La loi prévoit que les projets de Zapa doivent faire l'objet d'une évaluation environnementale et "d'une concertation avec l'ensemble des parties concernées". Or, les associations de FNE s'interrogent sur "le manque de transparence" autour du dispositif pour lequel "quasiment aucune discussion n'a été ouverte avec les collectivités" contrairement aux SCRAE (1) et aux plans de protection de l'atmosphère (PPA). Au risque qu'il soit perçu comme "une mesure technique sanctionnant les plus dépendants du trafic routier et les bas revenus".
Pourtant, les Zapa doivent s'articuler avec d'autres outils destinés à combattre la pollution atmosphérique. Le périmètre de la Zapa doit être compatible avec le PPA, prévoit notamment la loi. Bruno Genty, président de FNE, souligne cette nécessité : "un problème aussi complexe que la pollution de l'air nécessite une réponse globale et non parcellaire. Une multitude de solutions doivent permettre de s'attaquer aux multiples sources. C'est pourquoi les pouvoirs publics doivent mettre en cohérence et assurer la complémentarité des Zapa avec les dispositifs et outils existants".