L'Allemagne fermera toutes ses centrales nucléaires d'ici 2022, a annoncé le ministre de l'Environnement Norbert Röttgen à l'issue d'une réunion de la coalition gouvernementale qui s'est achevée tard dans la nuit de dimanche à lundi. Cette décision est à l'opposé de celle prise par le gouvernement d'Angela Merkel, fin 2010, visant à prolonger la durée de vie des plus anciennes centrales de douze ans. Mais dès le lendemain de l'accident de Fukushima au Japon, le gouvernement avait changé de ton et envisageait une reprise du plan de sortie du nucléaire décidé par le gouvernement Schröder en 2000.
Au total, l'Allemagne compte 17 réacteurs qui fournissent 23 % de l'électricité. Sept des huit plus anciens réacteurs allemands avaient été mis à l'arrêt après la catastrophe japonaise. Le huitième était déjà arrêté. La coalition a décidé de leur fermeture définitive, sauf pour l'un d'entre eux, qui devrait être maintenu en état de veille jusqu'en 2013 afin d'assurer éventuellement la sécurité énergétique du pays. Six réacteurs cesseront de fonctionner d'ici 2021, les trois derniers (les plus récents) seront arrêtés au plus tard en 2022.
"C'est définitif. (…) Il n'y aura pas de clause de réexamen'', a expliqué Norbert Röttgen. Cette décision doit néanmoins être validée par le Parlement.
Des réactions très mitigées en France
En France, cette décision a suscité de nombreuses réactions. Cécile Duflot, secrétaire nationale d'Europe Ecologie-Les Verts a estimé sur Europe 1 que la France devait emboîter le pas à l'Allemagne. ''Évidemment que ça nécessite plus d'efforts, mais c'est tout à fait possible. On est tellement en retard pour les énergies renouvelables en France, qu'on a une marge de progression considérable''.
Jean-François Copé, secrétaire général de l'UMP, a rappelé sur RTL que ''la situation de la France et de l'Allemagne vis-à-vis de l'indépendance énergétique n'est pas la même sur le nucléaire. 85 % de notre énergie est produite par le nucléaire (...) C'est aujourd'hui un élément majeur de la puissance industrielle de la France''.
Prudence également du côté des socialistes, à l'instar de Jérôme Cahuzac, président PS de la commission des Finances à l'Assemblée nationale, qui a déclaré sur Europe 1 que '' l'Allemagne est dans un contexte énergétique qui n'a rien à voir avec celui que connaît la France, qui dépend beaucoup plus de l'énergie nucléaire que n'en dépend aujourd'hui l'Allemagne. La convergence en la matière avec l'Allemagne n'est pas indispensable. Nous avons une politique énergétique qui a été décidée il y a plusieurs dizaines d'années, tous les gouvernements successifs ont souscrit à cette politique énergétique, je pense qu'il en sera de même à l'avenir même si je crois nécessaire le développement des énergies renouvelables et alternatives''.
De son côté, Anne Lauvergeon, présidente du groupe nucléaire français Areva estimait sur BFM Radio que la décision du gouvernement allemand était ''totalement politique''. ''D'ici 2022, il peut se passer beaucoup de choses'', juge-t-elle, évoquant le risque de recours juridiques des exploitants ''forcés'' de fermer leurs réacteurs et la hausse du prix de l'électricité. Même son de cloche pour la présidente du Medef, Laurence Parisot (sur RMC/BFM TV) : elle souligne le ''problème de compétitivité'' que peut poser cette décision et s'interroge : ''est-ce que l'Allemagne fait ce choix tout en sachant qu'elle va continuer à importer du nucléaire de France ? C'est ce qu'on appelle la théorie du passager clandestin. Est-ce qu'il y a au contraire derrière cela un plan gigantesque d'innovation technologique ?''.