Les 23 et 24 mars, à l'occasion de l'adoption en première lecture au Sénat de la proposition de loi pour l'économie bleue, les parlementaires se sont penchés sur certaines dispositions relatives aux énergies marines renouvelables (EMR). Des sénateurs on notamment tenté d'introduire un dispositif permettant d'harmoniser la mise en œuvre du permis unique pour les parcs implantés sur le domaine maritime public (dans la limite des 22 km) et ceux construits dans la zone économique exclusive (au-delà de 22 km).
Le gouvernement a fait valoir qu'il n'est pas nécessaire d'introduire un tel dispositif dans cette loi puisque la loi de transition énergétique et le projet de loi sur la biodiversité abordent déjà le sujet. De plus, une ordonnance est en préparation. Toutefois, la situation est complexe et, pour l'instant, la situation manque de clarté.
Une procédure unique
Quatre amendements identiques ont été présentés pour "préserver l'égalité de traitement entre les porteurs de projets d'énergies marines". Ces amendements visaient à étendre le principe (en cours d'adoption via la loi sur la biodiversité) de l'autorisation unique applicable aux énergies marines dans la zone économique exclusive (ZEE). En effet, le dispositif "ne vaut pas sur le domaine public maritime jusqu'à 22 kilomètres des côtes", a défendu Charles Revet (Seine-Maritime, LR) en séance. Les amendements proposaient donc de créer une procédure harmonisée pour assurer une égalité de traitement entre les projets éolien offshore, "sans régression dans la protection de l'environnement". Cette harmonisation répondait à un souhait exprimé par Ségolène Royal en janvier dernier, ont fait valoir les sénateurs.
Il visait aussi à améliorer le dispositif applicable jusqu'à juin 2017 dans le cadre de l'expérimentation de l'autorisation unique. Il s'agissait, notamment, d'intégrer à l'autorisation unique trois procédures supplémentaires : celle relative à la concession d'utilisation du domaine public maritime, celle relative à l'approbation du projet d'ouvrage au titre de la réglementation électrique et celle relative aux obstacles pour la navigation aérienne. La situation pourrait être particulièrement complexe pour les projets situés de part et d'autre de la limite des 22 km, puisqu'ils devraient coordonner cinq procédures.
Le rapporteur du texte, Didier Mandelli (Vendée, LR), a demandé aux parlementaires de retirer ces amendements. "Cela risque d'interférer avec la simplification en cours des autorisations environnementales", a-t-il expliqué, ajoutant qu'"un projet d'ordonnance est notamment devant le Conseil supérieur de l'énergie". Cette remarque répond directement à la crainte des parlementaires exprimée dans l'exposé des motifs : "quatre mois avant l'échéance, celle-ci n'a pas été rédigée et ne le sera probablement pas avant la fin du délai". En effet, l'autorisation à légiférer par ordonnance expire le 21 juin 2016.
Quant à Alain Vidalies, il a jugé que l'adoption de ces amendements pourrait rendre "la situation fort compliquée". Le secrétaire d'Etat chargé de la Mer a expliqué : l'autorisation unique pour les projets sur le domaine public maritime a été généralisée par la loi de transition énergétique (les décisions environnementales fusionnent en un permis unique, délivré dans un délai réduit et avec un contentieux modernisé) et pour les projets au-delà du domaine public maritime, le principe de l'autorisation unique est en cours d'adoption dans le texte biodiversité. De plus, dans le cadre de la loi du 20 décembre 2014 relative à la simplification de la vie des entreprises, le Gouvernement est habilité à codifier ces dispositions et à les étendre. "Le projet d'ordonnance qui sera remis en avril au Conseil national de la transition énergétique (CNTE) répond à vos attentes", a-t-il assuré.
Loi biodiversité
Mais cette réponse n'a semble-t-il pas totalement satisfait Jean Desessard (Paris, Ecologistes) qui a fait état "de problèmes (…) survenus au cours de la deuxième lecture du projet de loi pour la biodiversité à l'Assemblée nationale". En l'occurrence, l'article 40 du projet de loi de reconquête de la biodiversité introduit le principe de l'autorisation pour les activités exercées dans la ZEE. Pour l'instant, le projet de loi adopté le 17 mars en seconde lecture à l'Assemblée prévoit que "toute activité exercée sur le plateau continental ou dans la ZEE, en vue de l'exploration ou de l'exploitation des ressources naturelles ou de l'utilisation des milieux marins, est subordonnée à la délivrance d'une autorisation unique". Celle-ci "tient lieu des autorisations, déclarations, approbations et dérogations nécessaires pour la construction, l'exploitation et l'utilisation d'îles artificielles, d'installations, d'ouvrages et de leurs installations connexes".
Cependant, il semble que les obligations portant sur les installations implantées sur le domaine public maritime et dans la ZEE ne sont pas identiques. A l'Assemblée, les députés ont adopté un amendement qui prévoit que les exploitants des installations qui feront l'objet du permis unique dans la ZEE financent "une activité de recherche sur le milieu marin" réalisée par un ou plusieurs organismes scientifiques publics. "Toute activité économique en mer s'accompagne de recherches", a résumé Viviane Le Dissez (Côtes-d'Armor, PS) qui a défendu l'amendement en séance, amendement qui cite explicitement les énergies marines dans l'exposé des motifs.
Barabara Pompili a demandé, en vain, le retrait de l'amendement qui a finalement été adopté. La secrétaire d'Etat à la Biodiversité a fait valoir qu'une telle disposition "soulève une difficulté quant à son objet et son champ d'application, trop général, et semble faire peser une obligation disproportionnée par rapport à l'objectif recherché". De plus, une telle obligation n'existant pas sur le domaine public maritime, il n'y a pas d'égalité de traitement pour les porteurs de projet qui exercent en-deçà ou au-delà de la limite des 22 kilomètres.