En 2019, le niveau de sûreté des activités et installations nucléaires a été « acceptable », a expliqué Bernard Doroszczuk, à l'occasion de la présentation annuelle du rapport sur l'état de la sûreté nucléaire en France en 2019 devant l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et techniques (Opecst). Pour autant, le président de l'Autorité de sûreté nucléaire (ASN), estime que tous les acteurs du secteur ne sont pas logés à la même enseigne.
« La rigueur d'exploitation des centrales nucléaires d'EDF est en recul en 2019 », regrette Bernard Doroszczuk. Parallèlement, la sûreté des installations du cycle du combustible d'Orano « est demeurée à un niveau satisfaisant ». Quant à la situation du CEA (1) , elle « est restée globalement satisfaisante », mais le contexte est « préoccupant » et l'ASN rappelle avoir constaté des « retards significatifs » dans la mise en œuvre de certaines mesures post-Fukushima.
Franchissement de barrières de sûreté bien connues
Interrogés par les parlementaires, Bernard Doroszczuk a précisé pourquoi l'ASN estime que la rigueur d'exploitation est en recul chez EDF. L'ASN a noté « le franchissement de certaines barrières de sûreté bien connues des exploitants ». De tels écarts sont « significatifs de la perte de culture des intervenants », pointe-t-il.
L'ASN a aussi relevé que les procédures à mette en œuvre en situation d'accident ne sont pas toujours adaptées. Par ailleurs, certains documents d'EDF utilisés lors de simulations d'incidents comportent « des erreurs, voire des instructions impossibles à exécuter », déplore Bernard Doroszczuk.
Des capacités d'ingénieries saturées
À ce reproche, s'ajoute une crainte pour les années à venir. En 2019, EDF a réalisé de façon satisfaisante une première quatrième visite décennale (VD4) d'un réacteur de 900 mégawatts (MW) sur le site de Tricastin (Drôme). Mais, insiste l'ASN, cette première, passée avec succès, a demandé des efforts d'ingénieries importants à EDF, notamment pour adapter au site des modifications pensées de façon générique par les services centraux de l'entreprise.
Or, les capacités d'ingénieries d'EDF « sont saturées », constate le président de l'ASN, qui rappelle que l'entreprise fait face à un important programme de maintenance pour prolonger la durée de vie de son parc nucléaire. Les délais d'étude s'allongent, ce qui constitue « un point de vigilance ». Et Bernard Doroszczuk de s'interroger à haute voix : Qu'en sera-t-il lorsque EDF devra mener de front quatre ou cinq visites décennales ? Est-ce que l'ingénierie d'EDF suivra ?