A l'occasion du Congrès du gaz Paris 2011, une table ronde sur “la production décentralisée et les systèmes énergétiques de demain“ a rassemblé différents acteurs du secteur: GDF Suez, le Club ATEE, GrDF mais également la région Bretagne. Une occasion pour cette dernière de présenter les avancées ainsi que les objectifs de son Pacte électrique breton, mis en place fin 2010.
En effet, ne produisant que 8,5 % (environ 1,3 GWh) de l'électricité qu'elle consomme, la Bretagne est fortement dépendante des autres régions. La croissance préoccupante des consommations de pointe (+23 % entre 2002 et 2010) n'a fait que renforcer les craintes. Pour éviter que la Bretagne ne reste une péninsule fragile énergétiquement, elle s'est fixée comme objectif d'augmenter considérablement sa production électrique, avec 34 % d'autonomie à l'horizon 2020. Outre le projet d'une nouvelle centrale à cycle combiné gaz d'une puissance de 450 MW, la région prévoit surtout le déploiement massif des énergies renouvelables pour arriver à 3.600 MW dans un peu moins d'une décennie.
Etat des lieux et objectifs pour les énergies renouvelables
79 % de la production électrique de la Bretagne est issue des énergies renouvelables, avec notamment 43 % pour l'éolien et 28 % pour l'énergie marémotrice. Dans son Pacte ainsi que dans son prochain schéma régional, elle souhaite augmenter sa part d'énergie éolienne de 740 MW en 2010 à près de 2.800 MW en 2020, dont 1 GW provenant de plateformes offshore.
Selon Dominique Ramard, Président de la Commission environnement du Conseil régional de Bretagne, plusieurs projets sont ainsi en cours et plusieurs parcs éoliens devraient bientôt installés. Dans la Baie de Saint-Brieuc, un parc éolien offshore de 500 MW sera implanté et opérationnel fin 2015. "Malgré l'installation attendue de nombreux parcs, le classement des éoliennes en ICPE risque d'avoir un impact. Mais la Bretagne se veut confiante quant à l'atteinte de l'objectif fixé", appuie l'élu.
Cette situation est comparable avec celle du photovoltaïque touchée de pleins fouets par le moratoire instauré par l'Etat en fin d'année dernière. Avec une capacité installée de 30 MW, la région espère arriver à 400 MW d'ici 2020. Cet objectif ambitieux reste atteignable grâce notamment à l'instauration, en mai 2011, d'un mécanisme de soutien sous forme d'avance remboursable. "Les prêts étaient nécessaires pour aider les particuliers et les entreprises souhaitant mettre en place des systèmes de production d'énergie solaire à franchir cette crise. Cette aide devrait normalement être bénéfique aux installateurs de la région, dont certains projets conçus avant le moratoire ne sont désormais plus viables économiquement", souligne Dominique Ramard. Cela est illustré par l'entrepreneur breton, Franck Le Borgne, qui avait entamé une grève de la faim pour protester contre le régime sec imposé à la filière.
Par ailleurs, avec le soutien de la région, une charte signée par les différents installateurs de centrale solaire vise à redorer le blason de la filière photovoltaïque. Elle prévoit même une solidarité entre les acteurs du secteur dans le but de les aider et également rassurer les futurs acquéreurs de systèmes photovoltaïques.
Pour augmenter la capacité en solaire, le Conseil régional de Bretagne a aussi décidé de développer le photovoltaïque sur le patrimoine régional. Une évaluation de toutes les surfaces disponibles est en cours et permettra d'engager un grand plan d'infrastructure.
Les petites énergies renouvelables également visées
Comme annoncé dernièrement, la première hydrolienne sera installée d'ici quelques jours au large de Paimpol Bréhat. Ce projet sera suivi par d'autres, notamment celui de Sabella. Après avoir été testée à l'embouchure de l'Odet en 2008, un modèle d'hydrolienne, appelée Sabella D10 et équipée d'une hélice de 10 mètres de diamètre, sera installée dès 2012 près de l'Ile d'Ouessant. Actionné par le flux du Fromveur, un courant marin, ce dispositif pourrait fournir jusqu'à 500 MW d'électricité par an. A terme, c'est une ferme hydrolienne qui devrait pratiquement couvrir les besoins énergétiques de l'île.
En outre, à proximité de Bréhat, le site pilote d'EDF devrait également accueillir une plateforme d'essais pour les technologies hydroliennes. Le site devrait utiliser la même liaison électrique, voire le même convertisseur que les quatres hydroliennes du groupe. Ce site d'essai constitue un des axes de France Energies Marines, projet d'Institut d'excellence dans les énergies décarbonnées, déposé dans le cadre de l'appel à projets au titre des investissements d'avenir et qui a déjà été présélectionné. L'attribution définitive des subventions devrait intervenir incessamment.
La cogénération fait également partie des énergies que la Bretagne souhaite développer. Actuellement, 92 MW sont installés et, selon une étude de l'Ademe, le potentiel de la région serait de 130 MW à terme. Cette technique est très appréciée par les serristes qui profitent de la production d'énergie thermique et électrique. Même si l'électricité est revendue à EDF, les agriculteurs utilisent la production de chaleur pour leurs serres et également le CO2. Une énergie à coût à peu près fixe qui diminue l'impact de la fluctuation importante des prix des légumes pour le producteur.
Focalisant aussi l'attention du Conseil régional, la méthanisation apparaît également comme une bonne solution pour produire de l'énergie, tout en traitant des déchets. Mais, pour développer ce procédé sur le territoire, l'aide de la région sera conditionnée à l'instauration d'une bonne entente locale. L'implication des acteurs locaux sera nécessaire pour faciliter la collecte de déchets et d'effluents ainsi que pour trouver de bons débouchés de valorisation de la chaleur produite.
Cette implication des collectivités territoriales est très importante dans le développement de production décentralisée d'énergies. "Le Grenelle de l'environnement a été bénéfique pour cette mobilisation car, à travers la compétence donnée aux régions, cela permet de donner plus d'importance aux collectivités qui s'engage réellement à mieux gérer la production d'énergie ainsi que les consommations", avance Dominique Ramard.
Une maîtrise de la demande en énergie
Avec le développement des énergies renouvelables, le Pacte électrique breton repose aussi sur la maîtrise de la consommation d'énergie. L'objectif est de diviser par 2 à l'horizon 2015 (- 950 GWh), puis par 3 d'ici 2020 (- 1.200 GWh) la croissance de la consommation d'électricité.
Ce pacte a, par ailleurs, permis de mieux cerner une grande partie des enjeux énergétiques de la région. Prévu fin 2012, le Schéma régional air, climat, énergie (SRCAE) de Bretagne se servira ainsi de ses travaux pour bien préciser son volet énergétique.