Une technologie en devenir…
Différentes expérimentations de captage et stockage du CO2 sont menées au niveau international notamment aux États-Unis, au Japon et en Europe (Allemagne, Ecosse, France). En France, plusieurs projets sont en cours. Total et ses partenaires préparent la mise en oeuvre d'une unité pilote incluant une chaîne complète de production de vapeur, captage du CO2, transport par pipeline et stockage en gisement déplété* de gaz à Lacq (Pyrénées-Atlantiques). En mars dernier, Veolia Environnement a annoncé la mise en place, d'un pilote de captage et de stockage géologique de CO2 de taille industrielle sur le site de Claye Souilly (77) sur lequel Veolia Propreté exploite des centres de valorisation et de stockage de déchets non dangereux. Le CO2 produit par les unités de valorisation énergétique de biogaz déjà existantes est injecté sous contrôle dans un aquifère salin situé à plus de 1.500 mètres de profondeur. Selon le groupe, avec un volume annuel de 200.000 tonnes/an de CO2 traité pendant plusieurs années, ce site est à ce jour le plus important en France. Mais pour l'instant les études géologiques et de modélisation sont toujours en cours.
… et un cadre réglementaire à préciser
Plusieurs programmes nationaux soutenus financièrement par les pouvoirs publics, l'ADEME, l'ANR et des industriels et auxquels sont impliquées des équipes de l'Ineris sont développées à l'heure actuelle. Leurs objectifs sont notamment de sécuriser le transport terrestre du CO2 et d'en garantir le confinement à long terme par une surveillance appropriée. Ils visent aussi à établir un cadre normatif et réglementaire, afin de parvenir à l'indispensable acceptation sociale que requiert le déploiement de ce type de projets technologiques, commente l'Ineris.
En effet, un des freins au développement de cette technologie en France et en Europe était le manque de réglementation spécifique. Une réglementation globale est actuellement en cours d'élaboration au niveau européen puisque la Commission européenne a proposé en janvier 2008, un projet de directive applicable à toutes les opérations industrielles futures de stockage géologique de CO2. Le texte dans sa version définitive a fait l'objet d'un accord au Conseil et au Parlement européen sous Présidence française, dans le cadre du paquet énergie-climat.
Au plan national, si l'article 28 du projet de loi Grenelle II est adopté tel qu'il a été présenté au Conseil des ministres du 7 janvier dernier, le cadre juridique applicable à des projets pilotes de captage et de stockage géologique de CO2 conduits en France devrait se préciser. Pour cela, le projet de loi rappelle notamment les principes généraux que doivent respecter les opérations-pilotes de recherche et développement pour les essais de stockage ; les opérations de captage et de compression étant déjà couvertes par le code de l'environnement et le transport par canalisations par la loi 29 juin 1965 sur le transport des produits chimiques par canalisations. Un article envisage par ailleurs l'encadrement des opérations de recherche et les essais d'injection par la délivrance d'une autorisation délivrée par arrêté des autorités administratives compétentes selon des modalités prévues par décret en Conseil d'Etat. Cette autorisation s'appuie sur une enquête publique et une étude de dangers réalisées par le demandeur, note le texte du projet de loi qui précise également les caractéristiques principales de l'autorisation (durée, périmètre, quantités et composition du gaz injecté…) et traite des rapports du permissionnaire avec les tiers, notamment en ce qui concerne le droit d'utilisation des formations géologiques du sous-sol et des sols. Il prévoit enfin la création d'un comité local d'information, dont les frais de fonctionnement seront supportés par l'exploitant et traite de la procédure d'arrêt des opérations de stockage. L'exploitant adresse aux ministres une déclaration d'arrêt des essais de stockage et d'injection. Les ministres pourront prescrire en tant que de besoin, les études et mesures complémentaires qu'ils estiment nécessaires, observe le texte du projet de loi.
Du côté des industriels qui développent déjà des projets, ces précisions seront les bienvenues. L'établissement des grandes lignes réglementaires dans le cadre du Grenelle est une bonne chose, observe Patrick Faisques, responsable des relations institutionnelles recherche de Veolia Environnement. Cependant, la mise en application sur le terrain de manière pratique de ces nouvelles dispositions va certainement prendre du temps, prévient-il.
Si chez l'industriel, on se prépare à adapter le calendrier défini initialement, on espère aussi que les bases réglementaires avancées dans le cadre du Grenelle seront un élément important et indispensable à la compréhension et à l'acceptation de cette technologie par la population.
* Gisement épuisé.