La Chine, premier pollueur du monde, responsable de 24% des émissions de CO2, vient de ratifier l'Accord de Paris sur le climat, neuf mois après la COP21.
Le 3 septembre à Hangzhou, dans l'Est de la Chine, où se tient le sommet du G20, le président Barack Obama et son homologue Xi Jinping ont déposé conjointement leurs "instruments de ratification" officiels de l'Accord de Paris sur le climat. Barack Obama a annoncé que les Etats-Unis, qui émettent 15% des gaz à effet de serre de la planète, se "joignent" à l'Accord de Paris, au titre d'une décision présidentielle qui permet d'éviter de passer par le Congrès, à majorité républicaine.
Pour entrer en vigueur, l'Accord de Paris doit être ratifié par au moins 55 pays représentant 55% des émissions de gaz à effet de serre. Une fois ce double seuil franchi, le texte s'applique dans un délai de trente jours. Jusqu'à présent, seuls 24 pays étaient allés au bout du processus, selon le site des Nations Unies : surtout des petits Etats insulaires, les plus exposés, mais ne représentant que 1,08% des émissions. Depuis le 3 septembre, un pas de géant a été franchi : avec les Etats-Unis et la Chine, ce sont 26 parties qui ont ratifié, couvrant 42% des émissions mondiales.
Depuis Copenhague, du chemin parcouru
Barack Obama a déclaré : "J'ai repensé avant notre arrivée ici avec le Secrétaire général des Nations Unies Ban Ki-moon à la conférence que nous avions tenue à Copenhague lors de la première année de ma présidence, qui était particulièrement chaotique. Et je crois juste d'affirmer qu'en regard des résultats de cette conférence, la perspective d'un accord tel que l'Accord de Paris semblait alors très éloignée. Et pourtant, nous y sommes, ce qui indique que lorsqu'il y a de la volonté et de la vision, et lorsque des pays tels que la Chine et les Etats-Unis sont préparés à montrer de la détermination et à gouverner par l'exemple, il est possible pour nous de créer un monde plus sûr, plus prospère et plus libre".
Les Etats-Unis ont annoncé un nouveau train de mesures de soutien fiscal au déploiement des énergies renouvelables de 100 GW solaires et éoliens dans les cinq prochaines années. Le pays suspend les autorisations de nouvelles centrales à charbon. Et impose des normes d'efficacité plus strictes aux véhicules les plus émetteurs. Dans le domaine du bâtiment, 20 nouveaux standards d'efficacité énergétique sont attendus d'ici la fin de l'année.
La Chine s'est engagée dans le cadre de son 13ème Plan quinquennal (2016-2020) à réduire ses émissions de CO2 de 18% par unité de PIB, et à diminuer son intensité énergétique de 15%, tout en poursuivant le déploiement de son programme d'énergies renouvelables.
Un mécanisme inédit de contrôle mutuel
Pour la première fois au sein du G20, un mécanisme de peer review, visant à synchroniser et réviser mutuellement leurs politiques, sera mis en place entre Pékin et Washington. Il s'agira pour ces deux géants d'accepter de rendre compte des montants des subventions accordées aux énergies fossiles afin de graduellement les supprimer.
Pour Liu Shuang, chargé de programme bas carbone à la Fondation pour l'énergie en Chine, ces inventaires mutuels non seulement serviront d'exemple aux autres pays du G20, qui émettent les deux tiers des émissions globales de GES, mais stimuleront des changements réels en Chine même. "Ce processus aidera la Chine à effectuer un inventaire systématique de ses subventions aux énergies fossiles, à identifier les moins efficaces, et à inaugurer des réformes", a déclaré Liu Shuang, rapporte le South China Morning Post le 31 août. Cette ouverture aura, entre autres, le mérite d'introduire de la transparence dans la comptabilisation des subventions aux énergies fossiles qui, selon le Fonds monétaire international, représentent 4.740 milliards d'euros par an, dont 40% relèvent de la Chine, 13% des Etats-Unis et 6% des pays de l'UE.
Le cas particulier de l'Union européenne
Ironie du sort, l'UE qui a toujours été proactive en matière de climat, se retrouve à la traîne. Autriche, France, Allemagne, Hongrie et Espagne ont déjà ratifié l'Accord de Paris par le biais de leurs parlements nationaux ou se sont engagées à le faire d'ici la fin de l'année. Ces pays représentent 5,13% des émissions. Mais leur engagement ne prendra acte que lorsque l'ensemble des pays européens se seront accordés afin que l'UE ratifie d'une seule voix l'Accord de Paris.
Donald Tusk, président du Conseil européen, a déclaré le 4 septembre à la veille du G20 : "Avant l'Accord de Paris, l'Union européenne était relativement seule à s'engager dans une politique climatique. La ratification par les Etats-Unis et la Chine marque pour nous l'espoir que nous ne serons plus seuls".
Pour atteindre la barre de 55% des gaz à effet de serre, deux gros émetteurs manquent encore à l'appel : l'Union européenne, responsable de 11%, et l'Inde de près de 6% des émissions globales.