La Cour de justice de l'Union européenne (CJUE) a été saisie par la Cour administrative du Land de Bavière (Allemagne), qui doit trancher un différent entre un apiculteur, Monsieur Balbok, et l'État de Bavière. En 2005, la présence d'ADN MON 810 et de protéines génétiquement modifiées a été constatée dans le pollen de maïs récolté par Monsieur Bablok. Les ruches de l'apiculteur étaient situées à 500 mètres de terrains appartenant à l'État de Bavière et sur lesquels du maïs MON 810 était cultivé à des fins de recherche. De même, la présence de très faibles quantités d'ADN MON 810 a été détectée dans quelques échantillons de miel de l'apiculteur.
Présence de pollen de MON 810 dans du miel
À la suite de ces constats, Monsieur Bablok considérait que la présence de résidus du maïs génétiquement modifié rendait ses produits impropres à la commercialisation et à la consommation. Il a donc entamé des procédures judiciaires contre l'État de Bavière devant les juridictions allemandes qui, pour leur part, ont demandé CJUE si la présence de pollen de maïs génétiquement modifié dans ces produits apicoles constitue une "altération substantielle" de ces derniers.
En effet, le miel contenant des traces de produits OGM pourrait faire l'objet d'une demande d'autorisation conformément à la législation européenne. La directive de 2001 sur la dissémination volontaire d'organismes génétiquement modifiés (OGM) stipule que les OGM ne peuvent être disséminés volontairement dans l'environnement ou mis sur le marché qu'après autorisation. Par ailleurs, le règlement de 2003 sur l'étiquetage des OGM prévoit que les produits alimentaires contenant des OGM ou produits à partir d'ingrédients OGM fassent l'objet d'une autorisation préalable à leur commercialisation.
Le miel devrait être soumis à autorisation
Les conclusions présentées aujourd'hui par l'avocat général de la CJUE vont dans le sens de l'apiculteur puisqu'elles précisent que le miel de Monsieur Bablok doit être considéré comme une denrée alimentaire produite à partir d'OGM.
L'avocat général estime tout d'abord que même si le pollen peut "encore contenir des informations génétiques, la seule présence d'ADN [génétiquement modifié] dans celui-ci et la possible incorporation de cet ADN par d'autres organismes ne signifient pas pour autant que cet organisme mort soit encore capable de transférer activement du matériel génétique." Cette incapacité à transférer du matériel génétique est liée au fait que le "pollen de maïs, […] perd très rapidement, par assèchement, son aptitude à la fécondation et devient un matériel inanimé."
"Dans ces conditions, l'avocat général conclut que du pollen issu de maïs MON 810, non viable, et donc inapte à la fécondation, n'est pas un organisme vivant et, partant, ne peut pas être considéré comme un OGM", indique la CJUE.
Cependant, Yves Bot considère que "tant le miel dans lequel on peut déceler la présence de pollen issu du maïs MON 810 que les compléments alimentaires à base de pollen contenant du pollen issu de cette même variété de maïs sont produits à partir d'OGM" car "ce pollen est utilisé, comme ingrédient, dans le cadre du processus de fabrication de ces produits apicoles et que les produits finals eux-mêmes en contiennent des traces."
En conclusion, il estime que "ce miel doit faire l'objet d'une autorisation de mise sur le marché", et cela même si l'introduction du matériel génétique modifié n'est pas intentionnelle.
"À cet égard, le fait que le pollen en question provienne d'un OGM autorisé pour la dissémination volontaire dans l'environnement et la circonstance que certains autres produits issus de cet OGM peuvent être légalement commercialisés comme denrées alimentaires ne sont pas décisifs car le miel contenant ce pollen n'est pas couvert par une autorisation délivrée conformément au règlement 1829/2003", précise la CJUE.