« Les investissements climat des ménages, des entreprises et des administrations publiques atteignent 45,7 milliards d'euros en 2018 », indique l'Institut de l'économie pour le climat (I4CE) dans son panorama 2019 des financements climat. Fait notable : ces investissements progressent constamment depuis 2014 et s'accentuent en 2017 et 2018. Le contexte est plutôt favorable : les prix de l'énergie et du CO2 sont à la hausse et les taux d'intérêt sont au contraire historiquement faibles.
Mais, en parallèle, les investissements défavorables au climat sont également en augmentation, et ce, depuis 2015. Ils « sont concentrés dans le secteur des transports (98 % du total) et concernent principalement les voitures particulières (43 milliards d'euros en 2018). » S'ils sont principalement réalisés par les ménages et les entreprises, « ces investissements privés sont encouragés par la persistance de dispositions fiscales néfastes pour le climat ». Autrement dit : le Gouvernement n'envoie pas les bons signaux économiques…
70 Md€ par an d'ici 2028
Parmi les financements favorables au climat, 20 milliards d'euros sont consacrés à l'efficacité énergétique, 7,5 milliards d'euros au déploiement des énergies renouvelables, 11 milliards d'euros à la construction d'infrastructures durables dans le secteur des transports et des réseaux (rail, transports en commun…).
Le rôle prédominant des banques
Bien évidemment, l'effort ne portera pas seulement sur l'État. Celui-ci devra néanmoins investir et envoyer les bons signaux économiques pour encourager l'investissement privé. Ainsi, pour atteindre les objectifs fixés dans la stratégie bas carbone (SNBC) et la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE), les pouvoirs publics devront « consacrer entre 25 et 27 milliards d'euros par an aux investissements et aux cofinancements en faveur du climat d'ici à 2023. À l'horizon 2028, cette contribution se situerait entre 28 et 31 milliards d'euros ». À titre de comparaison, en 2018, l'État a investi 22 milliards d'euros (investissements des porteurs de projets publics, cofinancement des projets portés par le privé et redirection de financements privés). Plus précisément, les investissements directs devraient être portés à 17 milliards d'euros par an, dans les bâtiments publics et les infrastructures de transport durable. Les subventions et les prêts concessionnels aux ménages et aux entreprises devront atteindre de 8 à 9 milliards d'euros par an d'ici 2023 et de 11 à 14 milliards d'euros jusqu'en 2028.
« En dépit de cette hausse, la part des pouvoirs publics dans le total des investissements climat reste stable, autour de 50 % entre 2019 et 2023, puis irait en diminuant pour se situer autour de 40 % entre 2024 et 2028 », indique I4CE.
En conséquence, le reste de l'effort sera porté par les acteurs privés. Les prêts commerciaux joueront un rôle déterminant, notamment pour la rénovation des bâtiments, l'acquisition de véhicules propres ou le développement d'énergies renouvelables. Ils pourraient atteindre 15 milliards d'euros par an d'ici 2023, et dépasser 25 milliards d'euros par an d'ici 2028.
Quels investissements pour la neutralité carbone ?
Dans les transports, les investissements dépassent les 10 milliards d'euros aujourd'hui, essentiellement dans les transports en commun. Dans les années à venir, ils devront contribuer à la régénération du réseau ferroviaire, aux chantiers du Grand Paris Express, mais aussi au développement d'infrastructures de recharge des véhicules électriques, GNV et hybrides, ainsi qu'à la mise en œuvre du Plan vélo.
Si l'investissement dans les véhicules bas carbone s'est accéléré en 2018, il est à relativiser : les véhicules défavorables pour le climat représentent encore « un marché 25 fois plus important en 2018 que celui des motorisations faiblement émettrices ». De 2,6 milliards en 2018, les investissements dans les véhicules bas carbone, pour respecter la trajectoire de la SNBC, devront passer de 7 à 22 milliards d'euros par an entre 2019 et 2028.
Dans les énergies renouvelables, les investissements sont déjà programmés dans la PPE : mise en service des parcs éoliens en mer et fort développement de l'éolien terrestre et du photovoltaïque.
Enfin, dans le bâtiment, « les investissements dans les travaux de rénovation énergétique des logements sont en hausse depuis 2011. Leur progression s'accélère en 2017 et 2018 pour atteindre 14,1 milliards d'euros ». Ils devront être, au minimum, maintenus à leur niveau actuel. Deux trajectoires sont possibles pour atteindre la neutralité carbone : « continuer à rénover les logements par étapes, ou concentrer les gestes de rénovation en une seule intervention pour atteindre un faible niveau de consommation (BBC) ». Mais cette seconde option nécessite des « investissements considérables » dès aujourd'hui.