Multiplier par trois les capacités de production nucléaire en 2050, c'est l'engagement pris par 22 pays, dont la Pologne – qui ne possède pas encore de centrale –, les États-Unis, les Émirats arabes unis, les Pays-Bas, le Royaume-Uni et, bien sûr, la France, samedi 2 décembre, lors d'un événement de haut niveau organisé dans le cadre de la COP 28. Reconnaissant, entre autres, « le rôle essentiel joué par l'énergie nucléaire dans les efforts pour parvenir au niveau mondial à zéro émission nette de gaz à effet de serre (…) d'ici au milieu du siècle environ », les participants se sont déclarés déterminés à travailler ensemble pour réaliser cet objectif, mais aussi à mobiliser des investissements dans ce domaine, notamment grâce à des mécanismes de financement innovants.
« Aucune stratégie crédible, ni nationalement ni mondialement, ne permet de sortir du charbon et des fossiles en reposant uniquement sur le renouvelable », a répété le président de la République, Emmanuel Macron, fervent militant de cette solution, potentiellement lucrative pour la France, dans un discours prononcé quelques instants plus tard. La coalition invite ainsi les actionnaires de la Banque mondiale, des institutions financières internationales et des banques régionales de développement à encourager l'intégration de l'énergie atomique dans la politique de prêt de leurs organisations. Outre les réacteurs nucléaires de grande taille, ces pays envisagent également la construction de petits réacteurs modulaires « et d'autres réacteurs avancés », afin de répondre aux besoins en électricité des industriels, de la production de carburants de synthèse et de la fabrication d'hydrogène. Ils prévoient par ailleurs de prolonger la durée de vie des centrales en activité.
La défiance des associations
L'annonce laisse les associations environnementales pour le moins sceptiques, en raison notamment des délais relatifs à la construction de telles infrastructures, bien plus longs que la durée nécessaire au développement des énergies renouvelables et peu compatibles avec l'urgence climatique. « Pour tripler les capacités nucléaires mondiales, il faudrait mettre en service plus de 70 grands réacteurs par an, année après année, entre 2040 et 2050. Or, ces dernières années, ce sont cinq réacteurs en 2020, six réacteurs en 2021, six réacteurs en 2022 et quatre réacteurs en 2023, soit un total de 21 nouveaux réacteurs, qui ont été ajoutés au réseau », calcule Greenpeace.
Outre ce potentiel « extrêmement limité » du nucléaire sur le plan mondial, Gaia Febvre, responsable des politiques internationales pour le Réseau Action Climat (RAC) critique aussi une solution coûteuse et dangereuse pour des pays où la stabilité géopolitique n'est pas assurée. « Tous nos efforts et nos investissements doivent se concentrer sur les mesures les plus efficaces et les plus rapides à déployer. C'est ça le vrai sujet de la COP 28 », conclut-elle.