Depuis le lancement du collectif transcourant à l'Assemblée nationale ''Accélérons la transition écologique et solidaire'' en octobre 2018 à l'initiative du député Matthieu Orphelin, l'actualité s'est tendue. Dans le contexte du Grand débat national et à la veille des manifestations pour le climat, les parlementaires font entendre leur voix. 120 député-e-s de diverses sensibilités politiques ont adressé le 7 mars une lettre (1) au Premier ministre demandant au gouvernement de rehausser ses objectifs pour l'éolien en mer et le biogaz dans la future programmation pluriannuelle de l'énergie.
Mais ce n'est pas tout. Hier c'est le collectif sénatorial ''Urgence climatique'' (CSUC) qui, sous la houlette du sénateur Ronan Dantec, depuis longtemps mobilisé sur ces questions, a organisé un colloque autour de neuf priorités politiques pour accélérer l'urgence climatique, en présence de Corinne Le Quéré, climatologue et présidente du Haut Conseil pour le climat. Et ce au moment où le ministre de la Transition écologique et solidaire François de Rugy annonçait le report de la loi sur l'énergie, le gouvernement prenant ainsi acte de la nécessité de revoir sa copie jugée insatisfaisante par le Conseil économique, social et environnemental (Cese).
Collectivités : donner des moyens pour les plans climat territoriaux
Trois axes principaux structurent ces neuf propositions. Les collectivités locales d'abord. Les sénateurs, dans leur communication finale, notent que, dans les territoires, les politiques publiques tardent à se mettre en place. ''Or ce sont ces plans et les actions qu'ils prévoient qui permettent d'agir sur le quotidien des Français (mobilité, logement, alimentation…) et donc sur la majeure partie des émissions de gaz à effet de serre'', notent-ils.
Concernant les politiques territoriales, trois mesures prioritaires sont proposées : la mise en place d'une dotation financière d'accompagnement des collectivités territoriales pour leurs Plans climat-air-énergie territoriaux (PCAET), le déplafonnement du seuil de 1,2 % pour les dépenses supplémentaires de fonctionnement des collectivités territoriales nécessaires pour engager leurs actions climatiques, le financement du service public de l'efficacité énergétique (SPEE), porté par les régions, sans lequel, il est illusoire de penser mener une politique ambitieuse de rénovation du parc de logements anciens.
Logement : débloquer la rénovation pour les ménages modestes
Deuxième axe de propositions : une politique volontariste du logement. ''L'échec de la politique de rénovation des passoires thermiques privées est manifeste, alors qu'un quart des émissions des gaz à effet de serre sont liées au logement''. Constatant qu'il y a eu seulement 30.000 éco-prêts à taux zéro en 2018 pour un objectif de 500.000 logements rénovés par an, les sénateurs proposent deux mesures : la mise en oeuvre, par le tiers financement, d'un mécanisme de prêts bancaires permettant de financer la rénovation thermique de leurs logements pour des ménages souvent déjà au plafond d'endettement, et l'instauration, dans un délai à préciser, d'un plafonnement des loyers sous les 20 % du prix moyen de location au mètre carré pour les logements étiquetés F ou G.
Corréler la taxe carbone au financement de la transition énergétique
En matière de fiscalité carbone, les sénateurs constatent que la crise des gilets jaunes ''a souligné qu'une taxation incomprise dans son affectation et injuste socialement n'était pas acceptable''. Ils estiment que le fléchage vers la transition énergétique et climatique doit précéder le dégel de la trajectoire carbone.
Ils proposent ''de mettre au débat une reprise de la trajectoire carbone, sur la base de la trajectoire votée par le Sénat en 2015 (56 euros la tonne en 2020, 100 euros en 2030, ndlr), en étant très clair sur l'affectation totale de la recette supplémentaire à la transition énergétique''. Ils insistent sur le fait ''qu'il ne peut y avoir reprise de la trajectoire avant des engagements précis et chiffrés de l'Etat pour qu'elle s'inscrive comme un outil de justice fiscale. Pour rétablir la confiance, dès 2019, une part des 8 milliards de recette actuelle de la Contribution climat énergie devra être fléchée sur des financements supplémentaires pour la transition énergétique''.
Enfin, dans le domaine des transports, les sénateurs proposent de taxer le transport international routier traversant la France, d'interdir l'usage du diesel pour les navires à quai, et d'indexer la taxe de solidarité sur les billets d'avion sur le prix de la contribution climat-énergie.