Rappelons que 39 % des ménages français seraient locataires, selon l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) qui souligne que 74 % des logements locatifs ont été construits avant la première réglementation thermique de 1974. La rénovation de ce parc constitue donc une priorité.
Le principe d'une contribution des locataires aux frais de rénovation, engagés par les propriétaires, avait été entériné par la loi Boutin ''de mobilisation pour le logement'' du 25 mars 2009, mais il restait à en fixer le montant et les modalités. C'est chose faite depuis hier tandis que des projets de décrets sont d'ores et déjà prêts. Ils seront transmis la semaine prochaine au Conseil d'Etat pour parution en septembre, a rapporté le 16 juillet matin le quotidien ''Les Echos''. Une information confirmée dans l'après-midi par le ministre en charge du développement durable Jean-Louis Borloo et Benoist Apparu, le secrétaire d'Etat chargé du logement, qui soulignent dans un communiqué, que les décrets soumis à la Commission Nationale de Concertation définissent les modalités de concertation et les règles de calcul de cette économie de charge.
Une contribution du locataire prévue dans les parties communes
Le gouvernement a ainsi décidé d'adopter un premier principe qui permettra au bailleur de faire figurer sur la quittance de loyer un forfait supplémentaire de 20 euros par mois maximum (fixe, non révisable et pour une durée maximale de 15 ans) pour les logements construits avant 1948.
Si les logements sont plus récents, la contribution du locataire sera alors égale à la moitié des économies de charges réalisées après l'audit thermique.
Selon les ''Echos'', une troisième option inclut la prise en compte de la consommation réelle du locataire, sur la base de ses factures des trois dernières années, ce que ne fait pas l'option de l'audit thermique (qui prend pour base une consommation standard compte tenu de la surface habitable).
Les travaux ''éligibles'' à cette contribution sont pour l'instant uniquement les travaux réalisés dans les parties communes comme l'installation de nouvelles chaudières collectives ou encore de l'isolation des combles en habitat collectif, votés par l'assemblée générale des copropriétaires. Les locataires pourront toujours refuser de laisser faire les travaux dans la partie dite privative de leur logement pendant le bail.
Mais une disposition du projet de loi Grenelle 2 prévoit que pour certains travaux, le dispositif soit étendu aux parties privatives. Philippe Pelletier, président du comité du suivi du volet bâtiment du Grenelle de l'environnement, propose en effet un changement de législation qui permette que les travaux sur les parties privatives des logements loués puissent être également votés par l'assemblée générale des copropriétaires s'ils sont d'intérêt collectif. Serait notamment concerné le changement des fenêtres pour une meilleure isolation. Ce serait une véritable révolution nécessaire. 95% des locations étant dans des immeubles collectifs, il est inefficace de faire des travaux d'isolation seulement dans quelques appartements, a indiqué à l'AFP Henri Buzy-Cazaux, président de l'Ecole supérieure des professions immobilières (ESPI).
Un dispositif ''gagnant-gagnant'' ?
Les ministres Jean-Louis Borloo et Benoist Apparu ont qualifié hier ce dispositif de ''gagnant/gagnant'', estimant que les locataires verront leur facture énergétique baisser tandis que le bailleur ne sera pas le seul à supporter le coût des travaux.
Mais des associations de locataires à l'instar de la CLCV (Consommation, Logement et Cadre de Vie) ont aussitôt manifesté leur désapprobation. Toutes les associations de locataires se sont pourtant prononcées contre les décisions présentées lors de la réunion du 1er juillet de la Commission nationale de concertation, a indiqué Laure Bourgoin, chargée de mission à la CLCV. Pour elle, si les associations de locataires ne sont pas ''contre le principe'' d'un partage des dépenses liées aux économies d'énergie, elles demandent en revanche un certain nombre de ''garanties contre les abus''. L'association craint que les locataires n'aient pas trop leur mot à dire et que des bailleurs en profitent pour effectuer des grosses réparations. Elle demande à ce que ces dépenses supplémentaires pour le locataire puissent être intégrées dans les crédits d'impôts et dans le calcul des aides personnelles au logement.
Bien que le ministère ait précisé hier qu'une concertation avec les associations de locataires et de bailleurs a été menée, le ministre en charge du développement durable Jean-Louis Borloo a indiqué ce matin à l'antenne d'Europe 1, que le secrétaire d'Etat au Logement Benoist Apparu, devrait prochainement rencontrer les différentes associations sur ce dispositif, pour être sûr que ce soit du gagnant/gagnant.
Rappelons que l'Ademe a publié en février une étude qui identifie les mécanismes de financement de la rénovation du parc locatif privé pouvant être avantageux pour les deux parties, en répartissant l'effort d'investissement entre propriétaire et locataire. L'Agence y proposait notamment un mécanisme de financement qui permet au propriétaire de répercuter les trois quarts de l'investissement sur le locataire. Cette solution s'applique dans l'hypothèse d'un financement par un éco-prêt à taux zéro sur dix ans : si le temps de retour sur investissement est inférieur à 10 ans, le locataire paiera 75 % de l'investissement, si le temps de retour sur investissement est supérieur à 10 ans, le locataire paiera 75 % des économies d'énergie. D'après l'étude, ce mécanisme protège systématiquement le locataire, qui économise toujours plus sur sa facture énergétique qu'il ne paye de loyer supplémentaire. En prenant en compte la baisse de la facture énergétique d'une part et l'augmentation de loyer liée au remboursement des travaux d'économie d'énergie d'autre part, le gain moyen est de 30 € par mois.
De son côté, l'Union nationale de la propriété immobilière (UNPI) proposait en mars dernier que le locataire paie un montant forfaitaire à son propriétaire correspondant à un pourcentage des économies d'énergies réalisées grâce aux travaux, et écartait donc l'idée d'une augmentation des loyers ou d'un partage direct des coûts des travaux.