EDF compte installer 30 gigawatts (GW) de solaire photovoltaïque en France entre 2020 et 2035, ont annoncé ce lundi 11 décembre Jean-Bernard Lévy, PDG du groupe, et Antoine Cahuzac, PDG d'EDF Energies Nouvelles. Ce "plan solaire" représente un investissement de l'ordre de 25 milliards d'euros étalé sur une quinzaine d'années. Il sera réalisé essentiellement via de très grandes installations de 100 mégawatts (MW) qui viendront s'ajouter aux autres investissements dans les énergies renouvelables en France et à l'étranger. Alors que l'entreprise est très peu présente dans le solaire en France, elle "a pour ambition de devenir leader en France" grâce à son plan solaire.
Ce plan constitue "un tournant dans l'histoire d'EDF", assure son PDG qui répond ainsi à la volonté du gouvernement d'accélérer et amplifier le déploiement des renouvelables en France. Selon Jean-Bernard Levy, la voie à suivre est tracée : "il n'y aura pas de transition énergétique si on ne fait pas beaucoup de photovoltaïque".
Compétitivité du photovoltaïque
La France est très en retard par rapport à ses voisins, alors qu'elle dispose du cinquième potentiel d'ensoleillement d'Europe, constate EDF. Aujourd'hui, la production photovoltaïque française couvre 1,8% de la consommation électrique hexagonale, avec une production de 8,3 térawattheures par an (TWh/an). C'est moins qu'au Royaume-Uni (2,5% de la consommation avec 7,8 TWh/an), qu'en Belgique (4%, avec 2,8 TWh/an) ou encore qu'en Allemagne (6,2%, avec 38,3 TWh/an). Plus inquiétant, la France ne devrait pas atteindre l'objectif de 18,2 et 20,2 GW installés 2023 prévu par la programmation pluriannuelle de l'énergie (PPE).
Il est temps de "changer de braquet" pour développer le photovoltaïque en France a expliqué Jean-Bernard Levy, d'autant que les coûts du photovoltaïque ont connu une baisse "extraordinaire". Celle-ci est telle que "le solaire devient compétitif partout dans le monde", constate Antoine Cahuzac. Aujourd'hui, certains projets photovoltaïques ont vu leur coût de production baisser à 58 dollars par mégawattheure ($/MWh) en Allemagne et à 55 $/MWh en Espagne, rapporte le PDG d'EDF Energies Nouvelles.
Libérer du foncier pour le photovoltaïque
Le plan d'EDF vise l'installation de 1,5 GW par an entre 2020 et 2025, de 2 GW par an entre 2026 et 2030, et de 2,5 GW entre 2031 et 2035. Il s'appuie essentiellement sur la réalisation d'installations au sol d'au moins 100 MW pour bénéficier pleinement des effets d'échelle, que ce soit en termes de réduction de l'investissement initial ou de frais d'opération. EDF entend mettre à profit les deux prochaines années pour identifier les futurs parcs et préparer les dossiers.
Concrètement, EDF compte couvrir de panneaux solaires de l'ordre de 25.000 à 30.000 hectares. Pour y parvenir, elle veut équiper prioritairement ses propres terrains. Elle évoque notamment l'équipement en photovoltaïque des espaces libérés après démantèlement des installations existantes et des surfaces d'eau des barrages. EDF ne souhaite pas communiquer sur les terrains dont elle dispose déjà, mais ils ne devraient pas suffire. L'entreprise travaille donc avec le gouvernement afin de libérer du foncier.
Appels d'offres dédiés
Le gouvernement devra aussi intervenir en modifiant le cadre réglementaire pour le rendre compatible avec les besoins d'EDF. "Nous allons demander des appels d'offres pour de grandes fermes photovoltaïques", précise Jean-Bernard Levy. Actuellement, la réglementation limite la taille des fermes photovoltaïques à 17 MW. Ce sujet, ainsi que les mesures de simplification nécessaires à la réalisation des projets d'EDF, devraient être discutés dans le cadre du groupe de travail lancé le 7 décembre par Sébastien Lecornu, secrétaire d'Etat à la transition écologique et solidaire.
Sur le plan financier, l'entreprise compte "limiter de façon significative" son investissement en capital en s'associant à des investisseurs et en recourant au crédit. Dans les grandes lignes, les associés d'EDF pourraient apporter la moitié des fonds, environ 30% pourraient être empruntés par EDF et l'entreprise n'aurait à financer en capitaux propres que 20% des investissements. Par ailleurs, le plan ne remet pas en cause les autres investissements du groupe, que ce soit dans les renouvelables ou le nucléaire. S'agissant des investissements consacrés à la prolongation du nucléaire, le message du PDG d'EDF est particulièrement clair : "Il n'est pas question de toucher un cheveu du grand carénage".