Les collectivités locales ont dépensé, en 2017, 3,9 Md€ pour leurs consommations énergétiques, selon la dernière enquête sur les consommations énergétiques des collectivités de l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe), publiée fin 2019. Soit plus de 4 % de leur budget de fonctionnement.
Si la priorité est à la réduction de ces consommations, il est, en parallèle, possible d'orienter ces dépenses vers la transition énergétique et le développement local. « Les collectivités, qui pilotent les politiques énergétiques territoriales, ont un rôle clé dans la promotion des filières renouvelables », analyse l'association Amorce, qui a publié un guide sur les achats d'énergie renouvelable par les collectivités.
Offres vertes : de l'énergie verte mais pas forcément locale
Les offres d'énergie verte représentent un des moyens d'action des collectivités pour verdir leurs factures d'électricité et de gaz. Ces offres s'appuient sur le dispositif des garanties d'origine, qui certifie qu'en France ou en Europe, « une quantité d'énergie renouvelable équivalente à leur consommation a effectivement été produite (...). Ce document électronique permet notamment au client de connaître la source renouvelable d'énergie, le nom et l'emplacement du site de production concerné », rappelle Amorce. En 2018, 70 % des collectivités interrogées par l'association déclarent avoir acheté de l'électricité verte, 6 % du gaz vert.
Mais aujourd'hui, le marché des garanties d'origine est marqué par une offre supérieure à la demande, ce qui ne lui permet pas de soutenir le développement de nouveaux moyens de production. En France, par exemple, une partie des garanties d'origine pour l'électricité provient des barrages hydroélectriques.
Des critères dans les marchés publics
Dans la rédaction des marchés publics, les collectivités peuvent cependant orienter l'offre, dans une certaine mesure. Elles peuvent ainsi « demander un volume limité de garanties d'origine technologiques (par exemple : hydroélectricité 20 % maximum du volume global fourni), plutôt que de demander une technologie précisément ou en interdire formellement une », analyse Amorce.
De même, « pour les garanties d'origine locales ou françaises, pour éviter que ces demandes ne soient trop discriminatoires, il faut définir largement le critère local en fixant le périmètre régional. Un périmètre plus restreint pourrait entraîner des difficultés d'approvisionnement aux enchères et un prix très élevé. Le volume devra aussi être limité ».
Un critère d'approvisionnement direct depuis une unité de production locale peut également être ajouté. « Il convient cependant de définir précisément ce qui sera considéré comme une unité de production locale, comment on prouve cela, comment on l'évalue. Ceci est extrêmement difficile à faire et à contrôler, sur les flux physiques de production / consommation, car il est difficile de garantir un équilibre sur des outils de production intermittents ou non pilotables. (...) Ce critère risque fortement de ne pas recevoir de réponse à l'appel d'offre, ou à un coût éliminatoire », précise Amorce.
L'association mise sur l'émergence d'un label « énergie verte », sur lequel planche l'Ademe, pour différencier les offres vraiment vertes. Mais, précise-t-elle, « dans l'achat public, la référence à un label doit toujours être suivie de la mention "ou équivalent". Encore une fois, il s'agit de ne pas discriminer les candidats qui pourraient prouver qu'ils respectent des exigences d'une autre manière ».
Une électricité verte en circuit-court ?
Brest métropole est la première des collectivités à tester le concept pour acheter l'énergie produite par son usine d'incinération des ordures ménagères (UIOM), qui parvenait en fin de tarif d'achat. « L'électricité produite localement est vendue sur le marché de gros 3 €/MWh, et nous la rachetons 4,50 €. Avec un circuit-court, l'objectif est de mieux valoriser cette différence en rémunérant davantage l'électricité vendue et en diminuant son prix d'achat, dans un esprit gagnant-gagnant », souligne Sylvie Mingant.
L'expérimentation porte sur l'alimentation de deux bâtiments publics avec au moins 60 % d'autoproduction locale. Concrètement, l'UIOM a mis en concurrence l'électricité qu'elle produit et Selfee a postulé. De son côté, la métropole a lancé un marché d'innovation, qui permet d'éviter la mise en concurrence.
« On a prouvé que le modèle fonctionnait. La prochaine étape sera la mise en concurrence des différents acteurs du territoire pour alimenter, à partir du 1er janvier 2021, une trentaine de bâtiments », poursuit Sylvie Mingant. « Pour remporter ce marché, Selfee devra être compétitif », analyse Sandra Edou Magnin, associée fondatrice de Selfee.
En 2020 et 2021, les neuf collectivités (dont la ville de Paris, la Communauté de communes de Pouilly-Bligny, la Région Bourgogne-France-Comté, le Syndicat de l'énergie de l'Aude) vont permettre de tester différentes configurations et d'éclairer les questions juridiques et financières. « Le but du jeu est de faire en sorte que productions et consommations locales s'équilibrent. L'objectif n'est pas forcément de parvenir à 100 % d'électricité verte et locale, mais de réaliser le plus d'achat vert et local possible », explique Sandra Edou Magnin.
Bientôt des communautés d'énergies renouvelables
Les collectivités pourront également bientôt participer à des « communautés d'énergies renouvelables », notion introduite par le paquet européen pour une énergie propre et précisée par la loi énergie climat.
Il s'agit de regrouper, au sein d'une entité juridique autonome et de manière volontaire, des actionnaires ou des membres se trouvant à proximité des projets d'énergies renouvelables auxquels elle a souscrit et qu'elle a élaborés.
Cette communauté est autorisée à produire, consommer, stocker et vendre de l'énergie renouvelable. L'énergie produite par les installations renouvelables de la communauté pourra être partagée entre les membres ou les actionnaires. Un décret en Conseil d'État doit préciser les modalités d'application.