Le WWF a débuté jeudi 9 février une série d'entretiens avec les candidats à l'élection présidentielle. Pour cette première, c'est Emmanuel Macron qui s'est prêté à l'exercice. Le candidat du mouvement En marche a présenté les premières pistes de son programme en matière de protection de l'environnement. Questionné en direct par les internautes de Facebook, il a clarifié ses positions sur plusieurs sujets dans une volonté de "cohérence". Pas convaincu par le concept de décroissance, le candidat préfère parler de "croissance sélective" et d'investissements dans de "nouveaux modèles de croissance et de production". Il entend d'ailleurs lancer un grand plan d'investissements publics dont l'un des "piliers majeurs" sera l'écologie.
Financer une "écologie du quotidien"
Le candidat entend fortement appuyer le monde agricole avec une enveloppe de cinq milliards d'euros en cinq ans. Les objectifs sont multiples : faire monter en gamme la qualité des produits, moderniser les exploitations, développer la demande en produits bio et locaux, améliorer la condition animale : "Je lancerai un grenelle de l'alimentation regroupant les associations, les agriculteurs, les industries agroalimentaires, les professionnels de santé…", annonce-t-il.
Les ménages sont également dans sa ligne de mire avec un programme de 500.000 rénovations de logements par an dont 200.000 "passoires thermiques". Pour encourager les plus précaires, Emmanuel Macron veut verser des subventions directes à la place du crédit d'impôt sur la transition énergétique (CITE). Il discute actuellement avec l'Agence nationale de l'habitat (Anah) et l'Agence de services et de paiement (ASP) pour préciser les modalités de versement. Pour les autres ménages, il compte simplifier le CITE pour encourager les rénovations. "Au total, 1 milliard d'euros de subvention pourrait être débloqué sans compter les effets de levier attendus", explique-t-il.
Côté transport, M. Macron compte accompagner les particuliers pour changer de véhicules et remplacer les vieux diesels. "On ne peut pas supprimer le diesel d'ici 2025, ce serait sacrifier les ménages modestes. Mais j'appuie les maires volontaires en la matière". Le candidat entend prendre deux mesures à son arrivée à l'Elysée : faire converger totalement en cinq ans la fiscalité entre l'essence et le diesel en alignant celle du diesel sur l'essence, et mettre en place une prime de conversion de 1.000 euros pour l'achat d'un véhicule plus récent. "Ce sera cumulable avec le bonus et portera sur l'achat de véhicules neufs ou d'occasion". Il s'engage en parallèle à engager la mutation des constructeurs automobiles vers l'électrique, l'hybridation et l'hydrogène et de leurs sites industriels en concertation avec tous les acteurs.
Un mix énergétique sans les énergies fossiles
En matière de politique climatique, Emmanuel Macron entend maintenir le leadership de la France après la signature de l'Accord de Paris. Il souhaite continuer le "dialogue extrêmement nourri" avec la Chine et s'assurer que les financements pour le fonds vert pour le climat seront au rendez-vous. Le candidat a d'ailleurs lancé un appel aux chercheurs et aux entrepreneurs américains qui travaillent sur les questions climatiques et environnementales : "Venez travailler en France, on vous créera un statut spécifique", déclare-t-il en réponse à la politique climato-sceptique du nouveau président américain Donald Trump.
Au niveau national, sa politique énergétique se concentrera sur la sortie des énergies fossiles : "Je fermerai toutes les centrales à charbon du territoire au cours des cinq ans à venir. C'est un objectif clair auquel j'associe une politique d'accompagnement pour les industriels et les territoires". M. Macron déclare ne pas avoir l'intention d'octroyer de nouveaux permis de recherche ni d'exploitation d'hydrocarbures notamment dans les eaux territoriales françaises. Il s'est entretenu avec les responsables guyanais qui vont bientôt être en charge de l'octroi des permis sur leur territoire. Le candidat se dit "conscient des pertes fiscales pour le territoire". Il proposera une compensation en ce sens.
En matière de gaz de schiste, Emmanuel Macron affirme qu'il n'y aura pas d'exploitation de cet hydrocarbure pendant son quinquennat "quelle que soit la technique utilisée". Mais le candidat estime que la France ne doit pas pour autant s'arrêter de faire de la recherche sur ce sujet. "La recherche publique doit continuer pour ne pas laisser ce secteur aux mains des seuls industriels". Sa position est d'ailleurs similaire sur le sujet des OGM. Il entend maintenir la position de la France en matière d'interdiction de la culture d'OGM mais veut que la recherche publique reste active : "Je ne prévois pas plus de soutien mais je n'interdirai pas la recherche", résume-t-il. "Car je ne trouve pas normal de laisser ça à des industriels de type Monsanto ou Bayer".
Respect de la loi de transition énergétique et un calendrier d'appel d'offres pour les ENR
"Oui je garderai le cadre de la loi de transition énergétique (LTE) car je pense qu'il est bon", a-t-il déclaré. Les objectifs et le calendrier seront maintenus même s'il semble sceptique sur l'abaissement de la part du nucléaire de 50% d'ici 2025. "Dans le nucléaire, tout n'est pas à jeter. C'est l'énergie électrique la plus décarbonée. Mais nous ne devons pas en être dépendant à 75% comme aujourd'hui". Si le candidat dit s'inscrire dans la trajectoire de la LTE et annonce qu'il prendra la décision de fermer Fessenheim, il reste prudent sur la fermeture d'autres centrales. Il préfère attendre les décisions de l'Autorité de sureté nucléaire (ASN) sur l'allongement de la durée de vie des réacteurs nucléaires et voir comment le chantier de l'EPR de Flamanville avance. Il défend une "position réaliste sur le nucléaire et non conservatrice" en consentant notamment que personne ne sait calculer le coût complet du nucléaire.
Son engagement est bien plus marqué en matière d'énergie renouvelable. Il promet de tenir les objectifs des renouvelables et prévoit dès le début de son quinquennat de publier un calendrier d'appels d'offres pour toutes les ENR sur les cinq ans à venir. "Au total 26.000 MW seront lancés soit 30 milliards d'euros d'investissements privés". Le candidat s'engage par ailleurs à doubler le fonds chaleur de l'Ademe, à raccourcir les procédures et les délais de raccordement tout en simplifiant les autorisations.