A l'occasion de la présentation du Nouveau guide du commissaire enquêteur, la Compagnie nationale des commissaires enquêteurs (CNCE) est revenue sur les premiers mois de mise en œuvre de la réforme de l'enquête publique entrée en vigueur le 1er juin 2012.
Avec les autres nouveautés apportées par cette réforme comme la consultation du public par internet ou la simplification des régimes d'enquêtes existants, la possibilité de suspendre l'enquête ou d'effectuer une enquête complémentaire semble répondre à un réel besoin. "Ces procédures sont déjà fonctionnelles", confirme Jean-Pierre Chaulet, secrétaire national de la CNCE
Gagner du temps et de l'argent, éviter les annulations contentieuses
En quoi consiste cette double possibilité ? Il s'agit de permettre une modification du projet en cours ou en fin d'enquête publique sans avoir à recommencer toute la procédure. "Cela permet de faire gagner du temps et de l'argent. Cela permet aussi d'éviter les annulations contentieuses", indique Jean-Pierre Chaulet. Un argument important lorsque l'on sait que les contentieux portant sur les déclarations d'utilité publique (DUP) sont en forte croissance et que les recours sont de plus en plus étayés, avec des moyens portant très souvent sur la régularité des enquêtes publiques.
Dans les deux cas, la demande doit être adressée à l'autorité organisatrice de l'enquête publique (Etat ou collectivité territoriale) par le maître d'ouvrage. La demande de suspension peut être formulée lorsqu'une modification substantielle du projet se révèle nécessaire. La suspension ne peut excéder six mois et ne peut être utilisée qu'une seule fois. L'enquête est ensuite reprise, en principe par le même commissaire enquêteur, pour une durée d'au moins 30 jours. A la clôture, ce dernier disposera de 30 jours pour établir un rapport relatant le déroulement des deux phases de l'enquête.
"Le commissaire-enquêteur joue un rôle d'alerte dans un tel cas, précise Jacques Breton, président de la CNCE, en particulier lorsqu'une contre-proposition crédible ressort de l'enquête et est susceptible de remettre en cause la proposition initiale portée par le responsable du projet. "Ensuite, le maître d'ouvrage choisit ou non de passer outre", explique M. Breton. Mais, s'il ignore l'alerte, cela peut lui coûter cher. Le commissaire rendra sans doute un avis défavorable qui pourra être suivi d'une décision de refus de l'autorité administrative ou d'une décision favorable mais rendue plus fragile en cas de recours devant le juge administratif.
Améliorer la communication entre les différentes parties prenantes
L'enquête complémentaire, quant à elle, peut être déclenchée à l'issue de l'enquête initiale après un avis défavorable, ou favorable avec réserves du commissaire-enquêteur, et avant la décision de l'autorité administrative.
"Elle prend place au cas où le responsable du projet, plan ou programme estime souhaitable d'apporter des changements qui modifient l'économie générale du projet, plan ou programme qui a été soumis à enquête", précise le guide du commissaire enquêteur. Ce peut être le cas, en matière de projets d'infrastructures, d'une variante de tracé non retenue au départ mais qui se révèle finalement moins contraignante que la solution initiale.
"L'enquête complémentaire, d'une durée d'au moins quinze jours, peut être menée par le même commissaire enquêteur ou par un autre", explique Jean-Pierre Chaulet. A la clôture de cette enquête, le commissaire enquêteur dispose d'un délai de quinze jours pour établir un rapport et des conclusions motivées prenant en compte le rapport initial et l'enquête complémentaire.
Ces possibilités ouvertes par la réforme relèvent au final d'une même volonté : améliorer la communication entre les différentes parties prenantes de l'enquête publique afin d'améliorer son efficacité dans l'intérêt de tous : maître d'ouvrage, riverains et collectivités publiques.
L'obligation pour le commissaire enquêteur de communiquer au maître d'ouvrage un procès-verbal de synthèse des observations écrites et orales formulées par le public au cours de l'enquête participe également de cette volonté de renforcer le dialogue. Tout comme la possibilité donnée au commissaire enquêteur d'organiser une réunion d'information et d'échange, à laquelle l'autorité administrative ne peut désormais plus s'opposer en matière d'enquête au titre du code de l'environnement.