Le moteur que pouvait constituer la Commission européenne sur certaines questions environnementales pourrait se gripper : dans son programme de travail pour 2015 (1) , adopté mardi 16 décembre, elle propose la suppression (2) de différentes propositions phares parmi la liste en attente de décision du Parlement européen et du Conseil.
L'objectif affiché est clair : priorité à l'emploi, la croissance et les investissements, dans la droite ligne des annonces de septembre lors du changement de président de la Commission.
Ainsi, malgré le soutien appuyé dans une lettre de différents ministres de l'environnement (3) (4) (dont la France) et les protestations de différentes associations, la Commission a retiré (5) de son programme les emblématiques paquets sur la qualité de l'air et l'économie circulaire.
"Les citoyens ne pourront que constater que l'objectif de réduire les 400.000 décès prématurés dus chaque année à la pollution de l'air n'est plus une priorité pour l'UE", pointe Sébastien Vray, Président de l'Association Respire.
La Commission justifie ces retraits par le fait que la proposition de directive sur les polluants atmosphériques sera modifiée " dans le cadre du suivi du paquet énergie-climat pour 2030 " et promet de proposer d'ici fin 2015 un nouveau paquet économie circulaire "plus ambitieux".
"Les propositions ne sont d'aucune utilité si elles sommeillent à la table des négociations ou si elles en ressortent tellement dénaturées qu'elles ne peuvent plus atteindre leur objectif de départ, argumente-t-elle dans un communiqué, à chaque fois que le cas se présentera, la Commission proposera des moyens nouveaux et meilleurs pour faire en sorte que cet objectif soit atteint".
Outre ces deux suppressions, la Commission propose également de retirer la proposition de règlement sur la production de produits biologiques et leur étiquetage, si ce dernier n'est pas accepté dans les six mois.
Considérant que le soutien du Conseil est insuffisant pour parvenir à un accord concernant le règlement sur les transports des substances radioactives, elle propose de ne pas l'inscrire sur la liste de ses travaux.
Dans la même optique, estimant que le projet de texte a été dénaturé au cours des négociations, la Commission retire la proposition de Directive sur la taxation des produits énergétiques.
Les 23 propositions de la Commission Juncker
Le programme de travail de la Commission pour 2015 prévoit également 23 nouvelles initiatives. Concernant l'environnement, il souhaite travailler sur un cadre stratégique pour une "Union de l'énergie" (orienté sur la sécurité de l'approvisionnement énergétique; l'intégration des marchés nationaux de l'énergie; la réduction de la demande énergétique européenne; décarbonation du mix énergétique et la promotion de la recherche). Il comprendra la révision du système européen d'échange de quotas d'émissions.
La Commission s'intéressera également au rendez-vous de la conférence de Paris en 2015 (COP21) avec pour objectif notamment de décrire la vision et les attentes de l'UE.
Elle prévoit également de revenir sur les règles et décisions concernant les OGM dans l'Union pour "s'assurer que la volonté d'une majorité des Etats membres soient prise en compte".
Elle supprime également les possibilités de réflexions sur le règlement sur les semences. "Le droit des agriculteurs d'échanger leurs semences, le droit des petites entreprises de moins de 2 millions d'euros de chiffre d'affaire de commercialiser toute la diversité disponible sans obligation d'enregistrement au catalogue, ou encore l'ouverture du catalogue à moins de standardisation des semences et donc de notre nourriture, sont renvoyés aux oubliettes", déplore le réseau Semences paysannes.
L'explication ? "Suite au rejet de cette proposition en première lecture, en avril 2014, le président du Parlement européen a demandé son retrait dans une lettre".
Seront également retirées la proposition de Directive sur l'amélioration de la sécurité des travailleuses enceintes, si elle n'a pas été accepté dans les six mois (et alors remplacé par une nouvelle proposition) ainsi que la proposition de règlement fixant les niveaux maximaux admissibles de contamination radioactive des denrées alimentaires et des aliments pour animaux après un accident nucléaire (du fait d'une nouvelle proposition de Directive) ou encore la création d'un fonds pour l'indemnisation des dommages de pollution par les hydrocarbures dans les eaux européennes (l'évaluation des impacts et des analyses pertinentes seraient désormais dépassée).
En outre, la Commission évacue de la scène européenne une proposition de décision du Conseil établissant la position à adopter au sein de l'Helcom (6) et de l'organisation maritime internationale (OMI) en ce qui concerne la désignation de la mer Baltique en tant que zone de contrôle des émissions d'oxydes d'azote (7) (NECA).
Enfin la Commission revient sur différentes propositions de règlements concernant les stocks de poissons, du fait de leur prise en compte par ailleurs.
Avant d'officialiser ces retraits, la Commission a toutefois souligné qu'elle attendrait l'avis du Parlement européen et du Conseil.