Les relations entre la filière éolienne et les pouvoirs publics n'ont décidément rien de simple. En février dernier, lors d'un déplacement à Belfort, le président de la République avait déjà annoncé une baisse des objectifs de développement de l'éolien terrestre, en allongeant à trente ans, au lieu de dix, le délai prévu pour atteindre les 37 GW envisagés par la PPE. Aujourd'hui, dans un contexte de nette hausse du prix de l'électricité, l'État fait savoir aux énergéticiens qu'il souhaite récupérer l'intégralité de leurs « surprofits ».
Conformément au principe de complément de rémunération introduit par la loi de transition énergétique pour la croissance verte de 2015, l'État s'engage, en effet, à verser un dédommagement au producteur lorsque les prix du marché sont inférieurs au prix cible. Mais si les prix du marché lui deviennent supérieurs, ce qui est le cas actuellement, l'énergéticien est, à l'inverse, tenu de payer une contrepartie à l'État. Pas au-delà des aides préalablement reçues, toutefois.
Une compensation inscrite dans la loi
Une OPA en vue ?
Mais pas suffisamment au regard des pouvoirs publics. Ces derniers espèrent donc récolter quelques milliards supplémentaires en faisant tomber dans leur escarcelle la totalité des bénéfices réalisés par les producteurs au-delà du prix cible, à partir d'avril 2022. Les gains réalisés avant cette date devraient être conservés. Un juste retour des choses, estime l'avocate Sylvie Perrin, associée du cabinet d'avocats De Gaulle Fleurance et Associés. « Avec ses tarifs de soutien, l'État a permis des investissements massifs dans les ENR de l'ordre de 36 à 38 milliards. S'il prend en charge les pertes éventuelles, il est normal qu'il récupère de l'argent quand les projets deviennent bénéficiaires. On parle de très gros volumes en deux ou trois ans. Cela montre, s'il en était besoin, qu'investir dans les ENR était le bon chemin à prendre. »
Un petit nombre de contrats concernés
Selon l'avocate Hélène Gelas, associée du cabinet LPA-CGR, cette nouvelle configuration ne concerne, pour l'instant, qu'un petit nombre de contrats, même si elle reste un sujet de préoccupation pour les développeurs qui ont pris des risques et basé leur business plan sur ce plafonnement. « Il a fallu du temps pour que les projets sortent de terre sous ce régime-là », a-t-elle expliqué lors du débat organisé par Enerpresse. Leur nombre devrait cependant grossir au fil du temps, puisque 10 GW de projets sont toujours en attente d'autorisation et que la tendance reste à la hausse pour les prix de l'électricité. Quant aux modalités de ce changement de système, elles ne semblent pas encore bien définies. Pour Sylvie Perrin, il s'agirait plutôt d'une clarification du sens des cahiers des charges quand, pour Hélène Gelas, « il faudra faire appel à la loi ». Les jours à venir devraient apporter des éclaircissements en la matière.