La proposition de loi Brottes (1) , visant à préparer la transition vers un système énergétique sobre et portant diverses dispositions sur la tarification de l'eau et sur les éoliennes, a été adoptée en lecture définitive le 11 mars par l'Assemblée nationale. Ce texte, qui aura connu un parcours parlementaire difficile, prévoit notamment un allègement du cadre réglementaire relatif à l'éolien et des dérogations à la loi littoral et au code de l'urbanisme afin de faciliter l'implantation et le raccordement d'énergies marines renouvelables.
Ce vote est accueilli favorablement par les professionnels. Pour l'association France énergie éolienne (FEE), "l'adoption de la loi va permettre à la France de rester dans le top cinq des producteurs d'énergies éoliennes en Europe dans le sens d'une transition énergétique raisonnée". Cependant, souligne-t-elle, d'autres barrières restent à lever (17730), comme le mode de calcul des coûts de raccordement au réseau électrique et l'insécurité tarifaire éolienne liée à une procédure de notification en cours auprès de la Commission européenne.
Le président du Syndicat des énergies renouvelables (SER), Jean-Louis Bal, et le président de la commission éolienne du SER, Jean-Baptiste Séjourne, estiment de leur côté que "ce nouveau cadre va aider notre pays à réduire son retard par rapport à l'objectif 2020 de 25.000 MW. (…) Même s'il existe encore un obstacle majeur au développement de la filière avec l'incertitude qui persiste sur le tarif d'achat du KWh éolien et quelques adaptations réglementaires à mettre en œuvre, développeurs, industriels et investisseurs reprennent confiance".
Suppression des ZDE et du seuil des cinq mâts
Le texte adopté par les députés supprime les zones de développement de l'éolien (ZDE) qui faisaient désormais doublon avec les schémas régionaux éoliens (SRE), inscrits en annexe des schémas régionaux climat air énergie (SRCAE). Le SRE devient donc le schéma de référence pour l'instruction des dossiers éoliens.
Le seuil de cinq mâts pour la construction d'un parc éolien disparaît également. Pour FEE, ces simplifications administratives mettent un terme à "dix années d'empilement réglementaire" et devraient relancer les projets, notamment dans l'ouest de la France.
"Ces dispositions (…) vont, dans l'immédiat, libérer bon nombre de projets, en particulier dans les régions du Grand Ouest : dans les régions Pays de la Loire, Bretagne, Basse-Normandie, plus de 50% des projets en cours de développement en 2010 avaient dû être stoppés à la suite de l'adoption, dans la loi Grenelle 2, de la règle des 5 mâts, indique le SER. Ces mesures de simplification vont, notamment, faciliter le développement d'installations de dimensions modestes, adaptées à la topographie et aux paysages de nombreuses régions rurales, en métropole et outre-mer".
Le député Bertrand Pancher (UDI, Meuse), qui a voté contre le texte, dénonce au contraire la suppression des ZDE qui "met fin à des mécanismes de régulation permettant un développement concerté de ces zones. Ceci induira inévitablement un mitage de l'implantation et donc un rejet pur et simple de l'éolien".
Code de l'urbanisme : dérogations pour l'Outre mer
L'article 26 introduit également des dérogations au code de l'urbanisme pour la Guadeloupe, la Guyane, la Martinique, La Réunion et Mayotte. Celui-ci prévoit que, dans ces territoires, "l'extension de l'urbanisation doit se réaliser soit en continuité avec les agglomérations et villages existants, soit en hameaux nouveaux intégrés à l'environnement". La loi Brottes autorise certaines dérogations "en dehors des espaces proches du rivage", pour les activités agricoles et forestières mais aussi pour l'implantation d'éoliennes, ces activités étant jugées "incompatibles avec le voisinage des zones habitées". Ces dérogations doivent recevoir l'accord du représentant de l'État dans le département après avis de la commission départementale compétente en matière de nature, de paysages et de sites. Pour les éoliennes, un avis des ministres chargés de l'urbanisme, de l'environnement et de l'énergie est également attendu. "En l'absence de réponse dans un délai de deux mois, les avis sont réputés favorables", précise le texte.
"Enfin, les collectivités d'outre-mer qui étaient les grandes oubliées vont pouvoir bénéficier des investissements liés à l'implantation de parcs éoliens", se réjouit FEE.
Cette disposition a d'ailleurs été anticipée par la Guadeloupe qui, depuis le 5 mars, par délibération du 8 octobre 2012, autorise ces "coupures d'urbanisation".
Facilités de raccordement
La loi Brottes instaure également des dérogations à la loi littorale, afin de faciliter le raccordement sous-marin de parcs éoliens ou hydroliens offshore dans des zones littorales remarquables. Un amendement adopté par les députés ouvre cette dérogation aux "canalisations du réseau public de transport ou de distribution d'électricité visant à promouvoir l'utilisation des énergies renouvelables", interconnexions électriques comprises. "Les techniques utilisées pour la réalisation de ces raccordements sont souterraines et toujours celles de moindre impact environnemental. L'approbation des projets de construction des ouvrages (…) est refusée si les canalisations sont de nature à porter atteinte à l'environnement ou aux sites et paysages remarquables. Leur réalisation est soumise à enquête publique", précise le texte de loi.