Selon les estimations du syndicat, l'atteinte des objectifs du Grenelle, à savoir 6.000 éoliennes supplémentaires, et le développement d'une filière industrielle en France permettrait de multiplier par six le nombre d'emplois pour atteindre 60.000 d'ici à 2020. Mais pour cela, plusieurs obstacles doivent être dépassés. Capgemini Consulting cite la méconnaissance des marchés éoliens internationaux, la présence des fournisseurs historiques qu'il faut concurrencer et la nécessaire prise de risque associée à tout projet de diversification.
Autre obstacle de taille : l'instabilité réglementaire. ''Il faut une visibilité à moyen et long terme sinon il n'est pas possible de demander aux industriels d'investir'', prévient Emmanuel Gavache de Capgemini Consulting. ''En France, on a du vent, un tarif de rachat qui tient la route mais il faut également une réglementation qui fonctionne'', renchérit Nicolas Wolff. Et de l'avis du SER, c'est loin d'être le cas au regard du rapport de la Mission d'information sur l'éolien présenté hier à l'Assemblée nationale dans le cadre du Grenelle 2. ''Ce rapport va à l'encontre de ce qu'on pourrait faire pour développer la filière, nous sommes extrêmement inquiets'', explique-t-il.
Pour répondre aux oppositions montantes, le rapport préconise notamment la mise en place de schémas régionaux de l'éolien, opposables donc obligatoires, et la création de la notion d'unité de production au sein des Zones de Développement de l'Eolien (ZDE) avec un seuil de puissance pour chacune (entre 15 et 20 MW) et un nombre de 5 mâts minimum afin d'éviter tout « mitage » au sein d'une même ZDE.
Le SER se dit d'accord pour la création d'un schéma régional mais s'oppose à l'idée d'imposer un seuil de puissance pour les parcs en mettant en évidence un changement de cap radical avec la réglementation précédente : ''jusqu'en 2007 on nous a fixé une puissance maximum de 12 MW par parc et maintenant on nous parle de 15 MW minimum'', rappelle Nicolas Wolff. ''Cela revient à se demander quels sont les ''paysages moches'' sur lesquels on va pouvoir mettre des grands parcs éoliens'', ironise André Antolini, président du SER. Selon lui, ''tout cela paraît destiné à empêcher le développement de la filière plutôt que de l'aider à s'organiser harmonieusement''. Le Président du SER regrette d'ailleurs que le volet industrie ait été ''faiblement abordé'' dans le rapport alors que l'on ''se lamente de la perte de l'industrie en France'' ajoutant que ''la lutte contre le chômage et la désindustrialisation devrait être aussi importante que la protection du paysage''.
Pour les associations de protection de l'environnement et de soutien aux EnR, ce seuil de 15 MW revient à ''affaiblir le rôle des élus locaux'' et à ''créer un fossé évident entre les projets éoliens et les citoyens qui composent les territoires''. ''Les mesures telles que l'obligation de créer de gros parcs éoliens et des schémas régionaux contraignants au détriment de la planification locale risquent, sous couvert de protection des paysages, d'engendrer des oppositions locales majeures'', expliquent le CLER, la LPO, le RAC-F et le WWF dans un communiqué commun.
Michèle Pappalardo, Commissaire Générale au Développement Durable, se veut pour sa part rassurante en précisant que cette instabilité réglementaire ''ne va pas durer longtemps car on saura dans quelques semaines lors de l'examen du Grenelle 2 ce qui est retenu ou pas.''
En attendant, le SER et l'ADEME ont déjà prévu d'aller plus loin suite à l'étude de Capgemini Consulting en appuyant cinq entreprises ayant les reins assez solides pour investir dès maintenant dans leur diversification.