Quels seront les besoins en matériaux de construction d'ici à 2050 pour bâtir de nouveaux logements ou de nouveaux bureaux et rénover le parc résidentiel au niveau BBC ? C'est à cette question que l'Ademe a tenté de répondre, pour la première fois, à travers deux études publiées mi-décembre. Un exercice intéressant aussi bien pour les pourvoyeurs de matériaux neufs que pour les acteurs du recyclage, qui vont devoir gérer les déchets produits mais qui peuvent aussi fournir les professionnels du bâtiment en matières recyclées. « Un exercice de prospective à long terme s'appuyant sur une bonne caractérisation de la situation existante permettra de caractériser les flux de matière, d'anticiper et de s'adapter progressivement aux éventuelles pénuries de ressources, et d'apporter aux filières de valorisation des déchets du bâtiment des éléments permettant d'identifier les gisements à venir », justifie l'Ademe.
Vers une baisse des besoins en matériaux de 40 % dans le neuf
Ciment, sable, granulat, bois, acier, plâtre, terre cuite… Les consommations de matière ont été modélisées pour une vingtaine de matériaux couramment observés dans la construction en France métropolitaine. Les résultats de cette modélisation (1) font état, en 2015 (année de référence), d'une consommation de matière pour le secteur du bâtiment neuf d'environ 51 millions de tonnes, dont environ 43 millions de tonnes pour le secteur du logement et 8 millions de tonnes pour le secteur tertiaire CHEB (commerce, hôtellerie, enseignement, bureaux).
La consommation annuelle de matière dans le secteur du logement devrait globalement baisser d'ici à 2050 du fait d'un ralentissement prévu de la construction de logements neufs. Suivant le matériau considéré, cette baisse est comprise entre -5 % et -7 % en 2035, et entre -36 % et -39 % en 2050. Pour le secteur tertiaire CHEB, le scénario tendanciel aboutit à des baisses de consommation variables suivant la nature du matériau : majoritairement entre -35 % et -40 % en 2035 et entre -30 % et -35 % en 2050 (par rapport à 2015).
Un total d'1,3 milliard de tonnes de matériaux seront donc consommées jusqu'en 2050 pour le seul secteur résidentiel neuf, dont 85 % uniquement pour les granulats, sable et ciment (la recette du béton).
La rénovation consomme 17 fois moins
S'il paraît logique que la construction neuve consomme plus de matériaux que la rénovation, les deux études mettent en évidence un rapport de 1 à 17 entre les deux filières. L'Ademe en conclut qu'au regard des problèmes de pression sur les ressources notamment, « ces deux études apportent un élément supplémentaire plaidant en faveur de la rénovation et pour la limitation, autant que possible, de la construction neuve au strict nécessaire. »
Si la construction neuve veut réduire son empreinte matière, elle devra, dans la mesure du possible, consommer des matières recyclées. Et la politique de rénovation va en générer : laine de verre, polystyrène expansé, ouate de cellulose, bois, ciment… Au total, selon les calculs de l'Ademe, la rénovation du parc produira 1,2 million de tonnes de déchets d'isolant, 9,8 Mt de déchets de couverture, 188 millions de fenêtres et 154 millions de volets ou portes. Sans oublier les 4 Mt de déchets de plâtre, les 0,6 Mt d'enduits, etc. De quoi alimenter les constructeurs en matière recyclée si les boucles d'économie circulaire s'intensifient.