Une étude (1) , publiée en octobre dans la revue Nature communications, estime que l'agriculture biologique a plus d'impact sur l'environnement, et notamment sur le climat, que l'agriculture conventionnelle. L'explication ? L'agriculture biologique est moins productive, donc elle consomme plus de terres. L'étude évalue les conséquences, pour les émissions nettes de gaz à effet de serre (GES), d'un passage à 100 % à l'agriculture biologique en Angleterre et au Pays de Galles. Elle prend appui sur une analyse du cycle de vie (ACV). Conclusions : « Nous prévoyons des déficits majeurs dans la production de la plupart des produits agricoles par rapport à une production de référence (conventionnelle). Les émissions directes de GES sont réduites grâce à l'agriculture biologique. Mais si l'on prend en compte l'augmentation de l'utilisation des terres à l'étranger pour compenser les déficits de l'offre intérieure, les émissions nettes sont plus importantes », indiquent les auteurs.
Raisonnement simpliste, rétorquent trois chercheurs français, danois et suédois, dans une analyse critique de nombreuses études d'ACV (2) , publiée dans la revue Nature sustainability, le 16 mars. Selon eux, la plupart des analyses de cycle de vie omettent de prendre en compte certains indicateurs environnementaux et sont donc incomplètes. Or, l'impact environnemental ne peut être réduit aux émissions de GES.
Quid des impacts sur la biodiversité, les sols, l'eau ?
« Les études d'ACV actuelles ne prennent que rarement en compte la biodiversité, qui est d'une importance cruciale pour la santé et la résilience des écosystèmes, explique l'Institut national de recherche pour l'agriculture, l'alimentation et l'environnement (Inrae), où travaille l'un des trois chercheurs. Cependant, elle est en déclin dans le monde et l'agriculture conventionnelle s'est avérée être l'une des principales causes de tendances négatives observées, telles que le déclin des insectes et des oiseaux ». A contrario, les parcelles cultivées en agriculture biologique supporteraient « des niveaux de biodiversité environ 30 % plus élevés que les champs conduits en agriculture conventionnelle ».
Quid de l'impact des pesticides sur les sols, l'eau, les écosystèmes ? « Les avantages des pratiques agricoles biologiques, telles que des rotations mobilisant une plus grande diversité de cultures et l'utilisation d'engrais organiques, sont paradoxalement souvent négligés dans les études d'ACV », note l'Inrae.
Une multiplicité d'indicateurs à prendre en compte
Ces difficultés d'évaluation avaient d'ores et déjà été révélées par les travaux sur l'affichage environnemental des produits agro-alimentaires, lancés en France par l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie (Ademe) et l'Association française de normalisation (Afnor) en 2011. Trois indicateurs avaient été retenus dans le référentiel méthodologique : les émissions de GES, l'éco-toxicité et la consommation d'eau. Les travaux menés révélaient la difficulté d'arrêter un indicateur unique et consensuel permettant de calculer l'impact d'un produit sur la biodiversité.