Par ailleurs, alors que la Commission européenne proposait de limiter les droits d'émission de CO2 des compagnies aériennes à 100% de leur moyenne annuelle de la période 2004-2006, le Parlement a souhaité aller plus loin en demandant qu'elles soient réduites à 90%. Dans le cadre du système SCEQE, un certain nombre de quotas d'émission d'une tonne de dioxyde de carbone vont être accordés chaque année aux opérateurs. Le nombre total de droits attribués fixe ainsi la limite globale des émissions autorisées. Les députés proposent donc que cette limite représente 90% des émissions actuelles ce qui signifie un effort de réduction de 10% pour les opérateurs dès la première période d'intégration dans le système d'échange. La Commission européenne sera ensuite chargée de réduire le nombre total de quotas à allouer aux exploitants d'aéronefs pour les périodes suivantes.
Certains permis seront accordés gratuitement aux opérateurs, tandis que d'autres seront négociés. Autrement dit, ils seront mis aux enchères pour encourager dès le départ les réductions d'émissions financièrement intéressantes. Alors que la Commission européenne ne propose pas de limite spécifique au nombre de permis mis aux enchères, les députés estiment que leur part ne devrait pas dépasser 25% du total des permis.
Selon le Parlement, le produit de la mise aux enchères des quotas devra être utilisé pour limiter les émissions de gaz à effet de serre et faciliter l'adaptation aux incidences du changement climatique dans l'UE et les pays tiers, notamment les pays en développement, ainsi que pour financer des travaux de recherche et développement en faveur de la limitation, en particulier dans le secteur de l'aviation. Afin de réduire dans une certaine mesure la charge sur les citoyens, le Parlement envisage que le produit de la mise aux enchères puisse également être utilisé pour diminuer les taxes et redevances sur les moyens de transport respectueux de l'environnement comme les trains, mais aussi et plus étrangement, les autocars.
Enfin, les députés ont supprimé la dérogation que la Commission souhaitait accorder aux vols officiels (chefs d'Etat et de gouvernement) estimant que les gouvernements doivent donner le bon exemple.
Ainsi à travers ces nouvelles propositions, les députés ont souhaité rappeler que le secteur de l'aviation devait encore réduire considérablement ses émissions de manière à être conforme à l'objectif d'ensemble de l'Union européenne de réduction de 20 à 30 % par rapport aux niveaux de 1990 d'ici 2020. En 2004, la part de l'UE dans les émissions de gaz à effet de serre provenant de l'aviation internationale était en hausse de 7,5% par rapport à 2003. La croissance cumulée des émissions de CO2 de l'aviation atteint 87% depuis 1990, ce qui est en totale contradiction avec les objectifs de réduction de 8% des gaz à effet de serre que s'est fixée l'UE au titre du Protocole de Kyoto.
Il incombe maintenant au Conseil des ministres, co-législateur avec le Parlement, de prendre position sur les amendements adoptés par les députés. Si tous les amendements du Parlement sont acceptables pour le Conseil, la législation sera adoptée dans sa forme modifiée. Si le Conseil rejette un quelconque des amendements du Parlement ou en ajoute un autre, le texte retournera au Parlement pour une deuxième lecture.
Le WWF a déploré la position frileuse des parlementaires européens. Le Parlement européen n’a pas assez amélioré la proposition de la Commission Européenne. C’est un mauvais signal moins de trois semaines avant l'ouverture des négociations internationales de Bali, estime Damien Demailly, chargé de programme Energie & climat au WWF-France. Mais pour le WWF, la plus grande faiblesse du vote du Parlement reste le taux de mise aux enchères des quotas de CO2. Ce dernier a demandé que 25 % des quotas CO2 soient mis aux enchères plutôt que distribués gratuitement. Si cela constitue une amélioration par rapport à la proposition de la Commission, selon Damien Demailly, cette absence de distorsion de concurrence à l’échelon international devrait conduire à des sur-profits pour le secteur aérien, comme ceux observés dans le secteur électrique sur les marchés dérégulés depuis le lancement du marché de quotas. Ces revenus pourraient être compris entre 3 et 10 milliards d’euros par an pour le secteur aérien. Cette rente doit être captée par les Etats grâce à une mise aux enchères massive des quotas, puis redistribuée, note-t-il.