Pour certains citoyens à la sensibilité environnementale développée, c'est peut-être l'occasion de souscrire un contrat de fourniture d'électricité d'origine renouvelable et de participer ainsi au développement de ces sources d'énergies. Afin de toucher ces éco-citoyens, de nombreux fournisseurs d'énergie vont tenter de se démarquer en proposant des offres « d'électricité verte » ou « d'électricité renouvelable »… Malheureusement un électron d'origine renouvelable n'est pas visiblement différent d'un électron d'origine fossile ou nucléaire. Il sera par conséquent difficile pour le consommateur de s'assurer que l'électron qui alimente ses appareils électriques a bien été produit à partir de sources renouvelables comme le solaire ou l'éolien par exemple.
À l'heure actuelle il existe déjà un mécanisme européen permettant de s'assurer de l'origine de l'électricité verte : le certificat vert. Émis par l'institut Observ'er en France, un certificat vert correspond à 1MWh produit dans une unité certifiée à partir de source d'énergie renouvelable (hydraulique, photovoltaïque, éolienne, géothermique, biogaz, bois énergie). Le fournisseur d'électricité produit ou achète ces certificats qu'il revend au consommateur. Ce système permet de comptabiliser et de suivre les quantités « d'électricité verte » injectées sur le réseau et les quantités consommées. Le certificat vert est donc détruit dès lors qu'il est consommé. Rappelons que l'électricité produite à partir des sources d'énergie renouvelables est plus chère à la production que l'électricité traditionnelle ; le MWh d'un certificat vert revient donc plus cher que le MWh classique. Le consommateur peut acheter ces certificats verts en même temps que son électricité dans des offres spécifiques auprès de son fournisseur d'électricité ou acheter l'électricité à un fournisseur et en parallèle le certificat vert à des sociétés spécialisées qui ne commercialisent pas d'électricité physique mais uniquement la valeur « verte » de l'électricité. Le but consiste à ce qu'il y ait autant de MWh verts produits que consommés sur le réseau et qu'au final une demande forte en certificats verts accroisse la production d'énergie à partir de sources renouvelables. L'achat de certificats verts n'est pas limité aux clients professionnels. De plus, les particuliers qui souhaitent d'ores et déjà consommer de l'électricité verte peuvent souscrire à une offre de certificats verts tout en gardant leur contrat actuel de fourniture d'électricité.
Mais avec l'ouverture du marché dimanche prochain, de nouvelles offres vont voir le jour et pourront être indépendantes du système de certificats verts relativement bien réglementé. C'est pourquoi, pour éviter que les consommateurs ne se référent qu'aux seules promesses des fournisseurs, le WWF et le Comité de Liaison Energies Renouvelables (CLER) avec le soutien de l'ADEME et de la Commission européenne, se sont associés pour créer un label « électricité verte » chargé de faire la lumière sur ces offres. Le label EVE vise à distinguer les offres d'électricité qui reposent sur des productions d'énergies renouvelables de haute qualité environnementale et qui garantissent au consommateur que son argent est utilisé pour développer de nouvelles installations d'énergies renouvelables ou pour réduire les impacts écologiques des sites de production d'électricité. Concrètement, les offres labellisées par EVE doivent assurer que le choix du consommateur permet de développer les énergies renouvelables en France ; il ne s'agit pas de vendre seulement au consommateur de l'électricité issue d'une installation ancienne et déjà rentabilisée. Il doit y avoir « additionnalité ». Ainsi ce label garantit un certain niveau de qualité au produit mais pas directement l'origine de l'électricité.
Pratiquement, le label sera apposé sur des offres d'électricité commercialisées par des fournisseurs qui en feront la demande et qui seront soumis à un audit annuel. L'association gérant le label sera constituée d'un groupement d'organisations représentant la protection de l'environnement, la promotion des énergies renouvelables et la défense des consommateurs.
L'ensemble des fournisseurs d'électricité présents sur le marché français a été contacté au cours des deux années d'élaboration du label EVE. Certains préfèrent attendre une plus grande maturité du marché de l'électricité verte avant de faire le choix de s'engager dans des offres du type EVE : c'est le cas de Direct Energie et de Poweo. D'autres ont exprimé leur intérêt pour le label EVE sans que les discussions n'aient encore pu aboutir à la construction d'offres labellisées : c'est le cas de GEG et de Gaz de France. D'autres proposent déjà des offres spécialisées censées être de haute qualité selon leurs promoteurs : c'est le cas de l'offre Alpenergie 1000 de Suez-Electrabel et de l'offre Equilibre+ d'EDF mais elles ne sont disponibles que pour les professionnels pour l'instant.
En revanche selon le WWF et le CLER trois fournisseurs ont fait une démarche plus importante et leurs offres pourront être labellisées « EVE » d'ici septembre : c'est le cas de la coopérative de fourniture d'électricité Enercoop et des sociétés Green-Access et Watt Value, qui commercialisent déjà des certificats verts.
Le label EVE rejoint ainsi ceux qui existent dans plusieurs pays européens qui ont déjà ouvert leur marché de l'énergie : Ok Power en Allemagne, Bra Miljöval en suède ou encore Umweltzeichen en Autriche. Tous ces labels sont regroupés au niveau européen dans le réseau EUGENE. Pour l'instant, les critères sont différents d'un pays à un autre pour des raisons culturelles et/ou locales mais tous les labels tendent vers un cahier des charges commun. À l'image de ce qui s'est passé dans ces pays « énergétiquement libérés », le label EVE en France devrait permettre aux consommateurs de prendre en main leur consommation d'énergie et de l'orienter en fonction de leurs préoccupations notamment environnementales. Même si le marché de l'électivité verte est resté un marché de niche dans ces pays, les offres se sont multipliées : 400 en Allemagne, 90 en Suisse. En France, dimanche, 3 offres d'électivité vertes devraient être disponibles selon le WWF mais elles ne seront pas encore labellisées. Donc globalement, la prudence reste de mise.
De plus, les associations de consommateurs ont récemment alerté des risques qu'il y avait à souscrire à des offres de marché. Le ministère de l'Ecologie, du Développement et de l'Aménagement Durables rappelle qu'une fois ces offres souscrites, les consommateurs ne pourront plus revenir aux tarifs réglementés par l'Etat. Et si concurrence rime souvent avec baisse des prix, il est probable que le secteur de l'énergie soit l'exception qui confirme cette règle. L'association de consommateur UFC-Que Choisir a en effet alerté les consommateurs sur les conséquences de l'abandon des tarifs réglementés : les risques d'augmentations violentes des prix sur le marché libre sont bien réels. Les tarifs réglementés resteront ainsi inférieurs, voire très inférieurs pour l'électricité, aux prix de marché, explique l'association. Même méfiance du côté des Amis de la Terre qui incite les foyers modestes à ne pas quitter le tarif régulé. Du côté du CLER on semble également conscients que l'ouverture des marchés énergétiques pose encore divers problèmes mais son président, Didier Lenoir n'hésite pas à rappeler que les énergies renouvelables n'ont pas de sens si c'est pour gaspiller l'énergie. Alors en attendant de pouvoir consommer de l'électricité verte, commençons par réduire la consommation.
www.label-eve.org
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