Après l'accord trouvé en commission mixte paritaire, la loi pour l'accès au logement et un urbanisme rénové (Alur) fera l'objet d'un vote solennel à l'Assemblée nationale le 20 février et au Sénat le 21 février.
"Un coup d'arrêt est donné à l'artificialisation des sols, car les zones à bâtir qui ne font pas l'objet d'un projet d'urbanisation seront reclassées en terres naturelles ou agricoles et donc protégées de toute urbanisation", se félicite le ministère de l'Egalité des territoires et du Logement. Il s'agit là d'une des mesures prévues par la loi, mais celle-ci prévoit de nombreux autres outils en la matière.
"Construire plus mais pas n'importe où"
"Les terres agricoles et naturelles, qui perdent tous les dix ans une surface équivalente à un département, ne doivent plus constituer une variable d'ajustement de l'urbanisation, indique le ministère. Parallèlement, il faut créer les conditions pour la construction de 500.000 nouveaux logements par an d'ici à 2017". Conclusion: "il faut donc construire plus, mais pas n'importe où".
Pour y parvenir, la loi entend agir à plusieurs niveaux. Il s'agit tout d'abord de densifier les quartiers pavillonnaires. Pour cela, le texte supprime une disposition de la loi urbanisme et habitat de 2003 qui permettait au plan local d'urbanisme (PLU) de fixer une taille minimale de terrain. La loi Alur supprime également le coefficient d'occupation de sols (Cos). "Aujourd'hui, l'éventail des outils réglementaires (…) permet de bien mieux définir des règles concernant l'aspect extérieur des constructions", justifie le ministère. Une autre disposition facilite la subdivision des lotissements par une modification des règles de majorité requise.
La loi crée en revanche un "coefficient de biotope", qui établit un ratio entre la surface favorable à la nature et la surface d'une parcelle construite. L'objectif ? Favoriser le maintien ou le renforcement de la biodiversité et de la nature en ville en réservant des "surfaces non imperméabilisées ou éco-aménageables" lors des opérations de construction.
Il s'agit aussi de consolider le cadre juridique du droit de préemption afin d'éviter les contentieux très nombreux en la matière. La loi renforce donc l'exercice du droit de préemption par le préfet dans les 197 communes qui affichent un retard par rapport à leurs obligations de construction de logements sociaux. Elle donne également aux intercommunalités la possibilité de se doter d'une zone d'aménagement différée locale, où s'applique leur droit de préemption.
Lutter contre le mitage et protéger les espaces agricoles
Pour donner un coup d'arrêt à l'artificialisation des sols, la loi souhaite favoriser le reclassement en zones naturelles des anciennes zones à urbaniser. "Une collectivité qui prévoit de modifier son PLU pour urbaniser une zone 2AU (1) doit produire une délibération motivée démontrant que cette ouverture à l'urbanisation est rendue nécessaire par un tissu urbain (zones U) qui n'offre pas d'autres possibilités à l'urbanisation", détaille le ministère. D'autre part, les zones classées 2AU qui n'auront fait l'objet d'aucun projet d'aménagement ou d'acquisition foncière au bout de neuf ans seront considérées comme zones naturelles ou agricoles (zones N ou A), donc non urbanisables.
Afin de lutter contre le mitage et protéger les espaces agricoles et naturels, la loi élargit le rôle des commissions départementales de consommation des espaces agricoles (CDCEA). "Dans les communes non couvertes par un document d'urbanisme, la possibilité existante de recourir à une délibération motivée du conseil municipal pour déroger à la règle d'inconstructibilité est davantage encadrée", explique le ministère de l'Egalité des territoires. Pour les communes couvertes par un PLU, la loi rend exceptionnelle la possibilité d'utiliser le "pastillage" qui permet de délimiter des pastilles urbanisables en zones agricole et naturelle. Dans les zones naturelles, les autorisations de travaux sont soumises à l'avis conforme de la CDCEA.
Le Gouvernement souhaite par ailleurs doter l'ensemble des territoires qui le nécessitent d'établissements publics fonciers (EPF) d'Etat ou locaux en vue de mettre à disposition des collectivités "une ingénierie performante et la mobilisation d'une ressource fiscale mutualisée et dédiée". La loi définit pour les EPF locaux des missions et objectifs similaires à ceux des EPF d'Etat.
Les collectivités sont encouragées à se doter d'un PLU. Le texte de loi prévoit par conséquent qu'en l'absence de transformation en PLU au 31 décembre 2015, le Pos devient caduc. Le territoire qu'il couvre se voit appliquer le règlement national d'urbanisme (RNU).
Les "drive" désormais soumis à autorisation
Pour éviter l'artificialisation des sols, la loi entend également mieux maîtriser l'aménagement commercial. Les porteurs de projets d'équipements commerciaux auront désormais l'obligation d'organiser la remise en état du terrain ou de traiter une friche existante.
La loi limite également la superficie des parkings des équipements commerciaux. Désormais, leur superficie représentera au maximum les trois quarts de la surface du bâti, contre 1,5 actuellement. Des assouplissements sont toutefois prévus pour tenir compte des circonstances locales, des infrastructures de recharge des véhicules électriques ou hybrides, et des revêtements perméables.
La nouvelle loi soumet enfin la localisation des "drive" à autorisation d'exploitation commerciale. Ces points de retrait des marchandises accessibles en voiture ne pourront plus être implantés qu'"au sein des zones urbanisées, dans les zones commerciales existantes, à proximité des lieux de vie et d'activités habituellement fréquentés par les consommateurs". Il faut dire qu'il s'en est ouvert cinq par jour ces derniers mois "loin de toute considération d'aménagement du territoire ou de développement durable", souligne le ministère en charge de l'urbanisme.