Un changement radical des mesures en place pour réduire les rejets en nitrates sera nécessaire pour atteindre les objectifs de bon état écologique et chimique de la directive-cadre sur l'eau en 2027 : c'est le constat de la Commission européenne dans son dernier rapport (1) sur la mise en œuvre de la directive sur les nitrates engagée en décembre 1991. La pollution par ces nutriments est en effet l'un des obstacles principaux à cette atteinte.
Des progrès sont à noter depuis trente ans, mais pas à la hauteur des enjeux. « La situation n'évolue […], pas à un rythme suffisant pour prévenir les dommages pour la santé humaine et préserver les écosystèmes fragiles, a indiqué Virginijus Sinkevičius, commissaire chargé de l'Environnement, des Océans et de la Pêche. Conformément au pacte vert pour l'Europe, il est désormais nécessaire d'accélérer les mesures pour parvenir à une agriculture durable et protéger notre précieux approvisionnement en eau. »
La Commission relève que de 2016 à 2019, 14,1 % des eaux souterraines européennes dépassaient la limite de concentration des nitrates fixée pour l'eau potable. Par ailleurs, 81 % des eaux marines, 31 % des eaux côtières, 36 % des cours d'eau et 32 % des lacs européens ont été signalés comme eutrophes.
Un manque d'information concernant les bilans d'azote
Concernant l'évolution de la pression exercée par l'agriculture, la Commission indique que la production agricole a augmenté de 14,5 % entre 2010 et 2019. « La production animale est responsable d'environ 81 % de l'introduction d'azote d'origine agricole dans les systèmes aquatiques et de 87 % de l'ammoniaque provenant des émissions agricoles dans l'atmosphère », souligne-t-elle. Concernant le surplus de nutriments, les bilans de l'azote étaient supérieurs à 100 kg/ha pour la Belgique, Chypre, le Luxembourg et les Pays-Bas, pour la période 2016-2019. Dans le même laps de temps, les bilans du phosphate étaient supérieurs à 20 kg/ha pour Chypre, l'Irlande et Malte. Depuis 2008, parmi les États membres faisant état d'un surplus de nutriments élevé, seule Malte a affiché une baisse en ce qui concerne le bilan de phosphates. Les remontées d'informations ne sont toutefois pas encore optimales. Ainsi certains États membres (2) , dont la France, n'ont pas fourni d'informations concernant la contribution de l'agriculture aux rejets d'azote dans le milieu aquatique. « D'après les données de ceux qui l'ont fait, l'agriculture est responsable de 22 à 99 % de la charge totale d'azote dans l'environnement, en moyenne 77 %, ce qui en fait la source la plus importante », note la Commission européenne.