La Commission européenne a ouvert ce jeudi 6 septembre une enquête antidumping sur les importations de panneaux solaires et leurs composants essentiels (les piles et wafers solaires) originaires de Chine, a-t-elle annoncé dans un communiqué. Cette décision a été prise à la suite d'une plainte déposée le 25 juillet dernier par le groupement d'entreprises européennes solaires EU ProSun, faisant valoir que "les panneaux solaires et leurs composants essentiels originaires de Chine entraient sur le marché européen à un prix inférieur à la valeur du marché", explique la Commission.
EU ProSun reproche aux sociétés chinoises "de vendre des panneaux solaires en Europe bien en dessous de production, avec une marge de dumping de 60% à 80%". La Chine "s'est ainsi octroyée plus de 80% du marché européen", rappelle Milan Nitzschke, président d'EU ProSun qui "s'est félicité" de l'ouverture de l'enquête. "Cela implique", selon lui, "que les entreprises chinoises du secteur solaire font d'énormes pertes, mais pour autant, elles ne font pas faillite car leurs pertes sont compensées par l'Etat chinois. Une vingtaine de fabricants majeurs européens a de ce fait déjà été contrainte de cesser son activité rien qu'en 2012. Si la Chine détruit ainsi l'industrie solaire européenne, où les coûts du travail représentent pourtant moins de 10% du coût de la production, alors ce sont tous les secteurs manufacturiers de pointe et leurs emplois qui sont aujourd'hui menacés", estime-t-il.
"La plus importante plainte antidumping"
En 2011, la Chine a exporté des panneaux solaires et leurs composants essentiels d'une valeur de 21 milliards d'euros vers l'UE, souligne la Commission. "Sur le plan de la valeur des importations en cause, il s'agit de la plus importante plainte antidumping que la Commission européenne a reçue à ce jour", a indiqué Bruxelles. Le plaignant "a apporté suffisamment d'éléments montrant que les prix feraient l'objet, sur le marché de l'UE, d'un dumping de la part des producteurs-exportateurs, que l'industrie de l'Union subirait un préjudice et qu'il existerait un lien de causalité entre les importations faisant l'objet d'un dumping et le préjudice subi par l'industrie de l'Union". Par conséquent, la Commission a jugé ''qu'il existait des éléments de preuve suffisants à première vue pour justifier l'ouverture d'une enquête'', a-t-elle expliqué.
Bruxelles va désormais faire parvenir un questionnaire aux parties concernées (fabricants chinois, fabricants européens et associations du secteur) pour faire un état des lieux et constater d'éventuelles mesures de dumping. Sur la base des informations recueillies, la Commission établira s'il y a eu dumping et si le préjudice prétendument subi a été causé par les importations faisant l'objet d'un dumping. "Il s'agira également d'analyser d'autres facteurs éventuellement susceptibles d'avoir contribué au préjudice subi", indique-t-elle.
La Commission publiera ses conclusions provisoires de l'enquête dans neuf mois soit juin 2013. Une décision définitive pourrait être prise d'ici le 5 décembre 2013. En cas de dumping constaté, la Commission pourrait alors imposer des mesures restrictives pour une durée de cinq ans aux fabricants chinois.
Le plaignant EU ProSun a de nouveau demandé à la Commission Européenne "d'imposer des taxes anti-dumping, afin de restaurer une concurrence et des règles du jeu équitables avec la Chine, le plus rapidement possible". Et ce, à l'instar des Etats-Unis qui ont instauré en mai de fortes taxes sur les importations de produits solaires chinois.
Fin du libre-échange ?
De son côté, le ministère chinois du Commerce a déclaré "regretter vivement" l'ouverture de l'enquête antidumping par la Commission européenne ''en dépit d'appels répétés de la Chine pour résoudre le différend sur les produits photovoltaïques par la consultation et la coopération'', selon l'AFP.
La société spécialisée dans le solaire Canadian Solar, dont les sites de production sont basés au Canada et en Chine, a pour sa part estimé que la plainte pour dumping déposée par les fabricants européens "ne repose sur aucune justification. Canadian Solar coopérera sans réserve avec la Commission européenne pour démontrer que l'instauration de droits de douanes punitifs est dénuée de tout fondement", a annoncé le groupe qui invite Bruxelles "à soutenir le libre-échange". "La majorité des industriels de la filière sortiraient perdants d'une initiative menée par quelques représentants du secteur au bénéfice de leurs seuls intérêts individuels", a prévenu Gregory E. Spanoudakis, président des activités européennes de Canadian Solar, alors qu'environ 65 % de tous les panneaux solaires sont fabriqués en Chine, le premier producteur mondial. Les fabricants chinois soulignent avoir importé de leur côté d'Europe pour 7,5 milliards de dollars d'équipements photovoltaïques et de matières premières l'an dernier.