Le ministre des Finances Michel Sapin et le secrétaire d'Etat au Budget Christian Eckert ont présenté ce mercredi 1er octobre en Conseil des ministres le projet de loi de finances pour 2015 (PLF 2015). Parmi les mesures fiscales inscrites dans ce texte, plusieurs dispositions affichent l'ambition de "mettre en œuvre la transition énergétique et la croissance verte", mais aussi de soutenir l'activité dans le secteur de la construction et des travaux publics.
Une hausse du diesel de 2 c/l
"On ne va pas rappeler le débat sur l'écotaxe, largement connu", indique Christian Eckert. Une façon de rappeler le manque à gagner lié à la refonte du dispositif initial, transformé en "péage de transit", et la nécessité de trouver des sources de financement complémentaires pour les infrastructures de transport.
Cette source complémentaire, le Gouvernement propose de la dégager via une augmentation de 2 centimes par litre de la taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques (TICPE) frappant le gazole, dont les effets nocifs sur la santé et l'environnement sont connus, rappelle le secrétaire d'Etat. "Cette augmentation ne va pas au budget de fonctionnement de l'Etat mais est entièrement affectée à des travaux de transport", insiste Michel Sapin, précisant qu'elle va permettre de boucler les contrats de plans Etat/régions, qui sont très attendus.
Cette hausse du diesel va toucher les particuliers et les entreprises, à l'exception des transporteurs, explique Christian Eckert. Elle s'ajoutera à la hausse de 2 centimes par litre liée à la montée en puissance de la contribution climat-énergie. Des augmentations qui sont à relativiser, précise Michel Sapin, lorsqu'on les met en regard de la baisse de 7 centimes du litre de gazole constatée depuis le début de l'année.
Création du crédit d'impôt pour la transition énergétique
Comme l'avait annoncé Manuel Valls fin août, il est créé un "crédit d'impôt pour la transition énergétique" (CITE) qui est une refonte du crédit d'impôt développement durable (CIDD) bénéficiant aux dépenses engagées pour la rénovation énergétique des logements. Son taux est porté de 25% (15% pour les travaux uniques) à 30% du montant des dépenses engagées à compter du 1er septembre 2014. Le montant des travaux pris en compte est limité à 8.000 euros pour une personne seule et à 16.000 euros pour un couple. La condition liée à la réalisation d'un "bouquet de travaux" est supprimée.
Le champ du crédit d'impôt est par ailleurs élargi aux dépenses d'acquisition de bornes de recharge pour les véhicules électriques et de compteurs individuels d'eau chaude ou de chauffage dans les copropriétés. A compter du 1er janvier 2015, les travaux devront toutefois être réalisés par des professionnels qualifiés "reconnu garant de l'environnement" (RGE), comme cela est déjà exigé en matière d'éco-prêt à taux zéro.
Une mesure transitoire est prévue pour les contribuables ayant effectué des dépenses entre le 1er janvier et le 31 août 2014 dans le cadre d'un "bouquet de travaux". Ainsi, pour ceux qui ont réalisé une première action éligible au bouquet avant le 31 août 2014 et qui réaliseront une seconde action après cette date, la première bénéficiera du taux de 25% et la seconde du taux de 30%.
Les méthaniseurs agricoles exonérés de taxe foncière
Conformément à ce qu'avait annoncé le ministre de l'Agriculture le 16 septembre, une disposition prévoit de faire bénéficier les méthaniseurs agricoles d'une exonération temporaire de taxe foncière et de cotisation foncière des entreprises (CFE). Ces exonérations s'appliqueront à compter de 2016 au titre des cinq premières années suivant l'achèvement des méthaniseurs.
Cette mesure s'inscrit dans le cadre du plan "Energie méthanisation autonomie azote" (EMAA) qui vise à atteindre 1.000 méthaniseurs agricoles en 2020. "La valorisation des déchets agricoles est une source importante et insuffisamment exploitée d'énergie renouvelable", justifie Bercy, qui entend ainsi combler le retard de la France par rapport à ses voisins.
Mobiliser le foncier pour construire
Le ministre de l'Economie a également rappelé les mesures fiscales annoncées le 29 août dans le plan de relance de la construction, qui doivent avant tout "permettre la mobilisation du foncier pour pouvoir construire".
"L'imposition des plus-values sur les terrains à bâtir est réformée à compter de septembre 2014 pour rendre les cessions plus attractives et faire en sorte qu'elles soient exonérées d'impôt sur le revenu au bout de 22 ans, au lieu de 30 ans actuellement", indique le ministère de l'Economie, qui souhaite ainsi mettre fin aux incitations à la rétention du foncier. Un abattement supplémentaire de 30% sur les plus-values, destinée à créer un "choc d'offres", est prévu sur les promesses de ventes conclues entre le 1er septembre 2014 et le 30 décembre 2015.
Le projet de loi prévoit également une exonération temporaire sur les donations de terrains à bâtir dans la limite de 100.000 euros. Elle concernera les donations constatées par un acte authentique signé entre le 1er janvier et le 31 décembre 2015. La condition pour en bénéficier ? S'engager à construire dans un délai de quatre ans un logement destiné à l'habitation.
S'ajoute à cela une série de mesures visant à encourager la construction de logements neufs et faciliter l'accès à la propriété. Dans ce cadre, il est prévu de prolonger le prêt à taux zéro jusqu'au 31 décembre 2017. Le dispositif sera élargi à l'achat de logements anciens à réhabiliter dans certaines communes rurales. Par mesure de simplification, le ministère de l'Economie annonce que la condition de performance énergétique des logements acquis sera supprimée. "La réglementation thermique de 2012 étant déjà la norme réglementaire depuis le 1er janvier 2013", justifie-t-il.
Suppression de taxes à faible rendement
Le ministre de l'Economie confirme enfin, sans autres précisions, la suppression de "plusieurs taxes à rendement nul ou faible présentant des coûts de gestion élevée".
Parmi ces taxes figurent la taxe "Grenelle 2" sur les ventes immobilières aux abords des transports collectifs en site propre, la redevance due par les titulaires de concessions de stockage souterrain d'hydrocarbures, la taxe pour la gestion des eaux pluviales urbaines, ainsi que la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP) pesant sur les installations classées pour la protection de l'environnement (ICPE).
Reste maintenant à suivre les travaux d'un Parlement, moins docile que par le passé, pour savoir s'il approuve, amende, ou supprime ces dispositions, voire en ajoute de nouvelles.