Quels conducteurs émettent le plus dans Paris ? Deux chercheurs se sont attelés à répondre à cette question dans une étude (1) récemment publiée dans la revue Energy Economics. Marion Leroutier, de l'École d'économie de Stockholm, et Philippe Quirion, du Centre international de recherche sur l'environnement et le développement (Cired), ont évalué les émissions d'oxydes de soufre (NOx), de particules fines (PM2,5) et de dioxyde de carbone (CO2) d'un échantillon de près de 24 000 franciliens, de Paris et de ses banlieues, lors de leur déplacement en voiture dans Paris intra-muros.
D'après leurs observations, le cinquième des automobilistes émettant le plus est responsable, à lui seul, de 75 à 85 % des émissions polluantes (75 % pour le CO2, 78 % pour les PM2,5 et 85 % pour les NOx) sur un jour de semaine. « Être un homme vivant en banlieue et se rendant sur son lieu de travail en voiture sont les principales caractéristiques de ces émetteurs », selon les chercheurs. Le type de poste joue également un rôle : les employés travaillant dans une usine, les commerçants, les cadres exécutifs et les employés avec des heures atypiques de travail, partant d'une banlieue pour en rejoindre une autre, sont les personnes les plus susceptibles d'émettre le plus. « Le revenu a également un rôle ambivalent, car plus il est élevé, plus il est associé à de longues distances, une plus haute probabilité d'utiliser une voiture et donc une plus haute intensité d'émissions de CO2, mais pas nécessairement pour les NOx et les PM2,5. Les ménages profitant d'un revenu élevé possèdent souvent des voitures plus lourdes, grandes, puissantes, et donc produisant plus de CO2 que la moyenne. »
Cela étant, taxer les véhicules en se basant seulement sur leur intensité carbone pourrait amener à favoriser les véhicules Diesel, lesquels sont moins émetteurs de CO2, mais génèrent davantage de NOx et de PM2,5. De plus, les chercheurs insistent sur les conséquences d'un manque de prise en compte des distances parcourues sur les politiques de lutte contre la pollution de l'air. « Interdire les voitures les plus polluantes, sans considérer les kilomètres parcourus, serait socialement injuste : cela affecterait les individus peu rémunérés, donc dotés de voitures moins onéreuses, mais plus émettrices et ne parcourant que quelques kilomètres chaque jour ; au contraire des personnes mieux rémunérées, propriétaires de véhicules moins polluants, mais effectuant des trajets plus longs et donc émettant finalement davantage. »