Le système européen d'échange de quotas de CO2 incite d'ores et déjà les entreprises de certains secteurs industriels à diminuer leurs émissions de CO2. En effet, celles qui décident de réduire leurs émissions peuvent en effet bénéficier des revenus résultant de la vente des quotas ainsi libérés. Cependant, ce système ne couvre que 40 % des émissions européennes de gaz à effet de serre, et moins de 30 % en France. Le mécanisme des projets domestiques CO2 qui s'appuie sur le principe de la mise en œuvre conjointe (MOC), mécanisme de projet prévu par le protocole de Kyoto, vise à rémunérer financièrement les acteurs non couverts par le système européen d'échange de quotas lorsqu'ils engagent volontairement des actions de réduction de leurs émissions. Les principaux secteurs concernés sont les transports, l'agriculture, le bâtiment, le traitement des déchets, et les installations industrielles non couvertes par le système des quotas.
La publication de l'arrêté au Journal Officiel fixant le cadre juridique de cet instrument a quant à lui été publié en mars dernier au Journal Officiel. Il définit les modalités d'agrément des projets et les conditions de délivrance des crédits carbone.
C'est dans ce contexte que le 12 octobre dernier, Jean-Louis Borloo, ministre de l'Ecologie,du Développement et de l'Aménagement durables, a approuvé une première liste de projets domestiques. À l'initiative de la Caisse des Dépôts, trois projets concernent la captation du méthane produit par des effluents d'élevage sur des exploitations agricoles, la réduction des émissions de HFC dans le secteur du froid commercial, de l'agroalimentaire ou des patinoires et les réductions de consommation d'énergie ou la substitution des sources d'énergie utilisées. Un quatrième type de projets, proposé par la Communauté urbaine de Lille, vise à la récupération de gaz de décharge pour alimenter en carburant une flotte de bus.
Pour valider ces projets, les ministères concernés (Ecologie et Finance) ont vérifié d'une part le caractère effectif des réductions d'émissions liées à ces projets, et d'autre part l'«additionalité» de ces projets, explique le MEDAD dans un communiqué. En effet, le dispositif des «projets domestiques» n'a pas vocation à financer des actions de réduction des émissions rendues obligatoires par la réglementation, ou qui pourraient être réalisées dans des conditions économiques satisfaisantes sans le financement apporté par le dispositif.
Soulignant qu'avec le dispositif des «projets domestiques», le marché du carbone continuait à se mettre en place, Jean-Louis Borloo a appelé les entreprises et les collectivités locales à faire preuve d'imagination et à proposer de nouveaux projets. J'appelle également les établissements financiers à s'engager dans ce dispositif, a-t-il ajouté.
Pourront par exemple faire partie de ces projets domestiques, les autorités organisatrices de transports projetant d'optimiser les performances de leurs flottes de bus, les agriculteurs développant des installations de destruction des émissions liées aux effluents d'élevage ou une association d'éleveurs qui mettraient en place une installation de méthanisation des déjections. Rappelons en effet qu'en France, l'agriculture est à l'origine d'un cinquième des émissions de gaz à effet de serre, s'agissant essentiellement de méthane et de protoxyde d'azote, provenant de la rumination des animaux, de leurs déjections et de l'utilisation d'engrais azotés.
Les collectivités pourraient également bénéficier de ce nouvel outil en abandonnant une ressource énergétique fossile pour passer à une énergie renouvelable et ainsi diminuer les émissions associées à leurs bâtiments. Ce type de projet énergétique s'applique à la production de chaleur renouvelable pour des installations de puissance inférieure à 20MW (seuil du PNAQ) : biomasse, géothermie, etc.
Enfin, un investissement éligible au titre des projets domestiques consisterait à réduire des émissions de fluides frigorigènes d'un supermarché. Les hydrofluorocarbures (HFC) sont en effet des gaz dont l'impact sur l'effet de serre est très supérieur à celui du CO2 à quantité égale. Comme ces gaz sont présents dans les circuits de refroidissement utilisés dans les magasins d'alimentation, le remplacement des installations existantes pas des équipements utilisant une combinaison de deux autres fluides au pouvoir de réchauffement nettement inférieur pourrait permettre à une surface commerciale de diviser ses émissions d'un facteur quatre. Selon le MEDAD, pour un supermarché type, les émissions de gaz à effet de serre associées aux systèmes de réfrigération sont estimées à 1.300 tonnes d'équivalent-CO2 par an et le passage au système à deux fluides permettrait de les réduire de près de 1.000 tonnes d'équivalent-CO2 par an.
Certains pays ont déjà mis en place des systèmes de projets domestiques à l'instar de la Nouvelle-Zélande et du Canada, deux pays ayant ratifié le protocole de Kyoto mais aussi les Etats-Unis, et l'Australie, qui quant à eux, ne l'ont pas ratifié.
En France, ce dispositif vise, dans une première phase expérimentale, à réduire les émissions de gaz à effet de serre de 5 millions de tonnes sur la période 2008-2012.