En préalable le groupe de travail rappelle que prévenir les risques, c'est d'abord en déterminer le champ et le contenu. C'est ensuite, fixer des règles du jeu telles que l'intérêt économique des parties prenantes se fasse dans le sens de la sécurité et de la prévention, lesquelles impliquent la responsabilité et la transparence. Ainsi, pour les auteurs du rapport, il est nécessaire de lier information, expertise et responsabilité. Les propositions du rapport visent ainsi à améliorer la diffusion de l'information, à favoriser une expertise pluraliste et contradictoire et à responsabiliser les décisionnaires.
Le rapport rappelle ainsi que le droit à l'information en matière environnementale et sanitaire est un droit spécifique dans la mesure où il est reconnu au niveau constitutionnel par la charte de l'environnement, au niveau communautaire et international par la convention d'Aarhus, et enfin par la jurisprudence de la convention européenne des droits de l'homme. Estimant que la mise en œuvre de ce principe reste à l'heure actuelle limitée, le groupe de travail a formulé des propositions visant à interdire la rétention d'information. Le rapport propose donc d'instaurer une obligation de mise à disposition des informations même les données brutes non interprétées et ce, pour toutes les institutions et autorités publiques. Le secret industriel et le secret défense seront par conséquent limités. Pour veiller au grain, le rapport propose de créer une police administrative. En parallèle, il est préconisé de protéger les « lanceurs d'alerte » car les informations diffusées risquent parfois de ne pas plaire à tout le monde.
Outre la méthode de diffusion, le rapport insiste également sur la nécessité de donner des informations pertinentes, notamment aux consommateurs, en définissant des indicateurs environnementaux simples et en évaluant les nombreux labels existants. Le rapport préconise par ailleurs d'encourager la mise en place d'une certaine déontologie au sein des médias en terme d'impartialité des informations surtout pour ceux détenus par des groupes industriels.
Concernant l'expertise, l'idée centrale est l'indépendance. La mission préconise la création d'une Haute autorité de l'expertise qui devra notamment vérifier que lesdits experts sont bien compétents et indépendants financièrement. Cette indépendance pourra ainsi favoriser la pluralité, jugée essentielle pour mener un débat de fond ouvert et contradictoire. Le rapport recommande également de rendre obligatoire la justification de l'intérêt et des avantages collectifs pour ne pas aborder uniquement la question des risques et des inconvénients. L'important serait le bilan coût-avantage pour la société.
Les propositions relatives à la responsabilité ont quant à elles pour objet de renforcer les processus de décision afin de responsabiliser pleinement ceux qui, en toute connaissance de cause des risques ou des incertitudes, ont décidé de mettre en œuvre une technologie, un produit ou un service. Elles visent donc à favoriser avant tout la prévention pour éviter d'avoir à poser la question de la réparation. Pour cela le rapport préconise notamment la création dans le code pénal d'un délit spécifique d'atteinte à l'environnement, et d'un délit de mise en danger d'autrui dans le cadre des atteintes d'origine environnementale à la santé. La notion de « faute ayant causé un dommage à l'environnement » pourrait également être insérée dans le Code civil avec la notion réparation qui lui est rattachée.
Le rapport évoque également la possibilité d'élargir les responsabilités d'une société filiale à sa maison-mère.
Une autre proposition vise notamment à supprimer les cas où il est plus rentable d'être fautif et éventuellement condamné que de respecter la réglementation. Intégrer des « dommages et intérêts punitifs » pour atteinte à l'environnement pourrait ainsi être dissuasif. Ils seraient plus élevés que la simple réparation du préjudice et seraient versés à des associations de protection de l'environnement.
Enfin, pour faciliter l'accès à la justice, le rapport propose de permettre aux collectivités locales de se constituer partie civile plus facilement et plébiscite la mise en place des « class action » dans le domaine de l'environnement.
Conscients que certaines propositions peuvent provoquer de vives réactions, les auteurs du rapport précisent que certaines d'entre elles sont à développer à l'échelle de l'Union européenne notamment en ce qui concerne les responsabilités des sociétés mères pour leurs filiales. Le rapport précise plus globalement que les principes simples de transparence dans l'information, comme dans l'expertise de responsabilité, sont d'autant plus indispensables que nous vivons des temps de crise, où la confiance est plus que jamais une valeur cardinale. Le présent rapport vise à permettre de la restaurer.
Première partie de la réflexion menée par la mission Lepage, ce rapport sera complété au printemps prochain par un second document traitant cette fois-ci de la gouvernance écologique dans la perspective de la présidence française de l'Union européenne.