Le projet de réforme territoriale présenté par François Hollande le 3 juin n'est pas qu'un sujet franco-français. Car, si le nombre des régions doit diminuer de 22 à 14, celui de leurs représentations à Bruxelles (17 aujourd'hui) va aussi devoir évoluer. Jusqu'à présent, chaque région était présente dans la capitale belge, soit en son nom propre, soit regroupée avec d'autres régions en fonction de leurs intérêts communs. Or, ces antennes sont loin de correspondre au redécoupage prévu par la réforme.
Celui-ci prévoit ainsi une région Picardie-Champagne-Ardenne, tandis que leurs représentations bruxelloises se partagent entre une antenne picarde et une autre pour la Lorraine et la Champagne-Ardenne. De même, un regroupement Poitou-Charentes-Centre-Limousin ne collerait plus avec les deux bureaux Auvergne-Centre-Limousin et Bretagne-Pays de la Loire-Poitou-Charentes. Outre les transferts de personnel (les bureaux comptent entre une et dix personnes), ces changements peuvent soulever des problèmes juridiques sur le statut même des représentations : certaines sont déclarées sous la forme d'associations (Alsace ou Midi-Pyrénées) et d'autres dépendent des conseils régionaux.
Cette mutation occasionnera forcément une période de flottement à Bruxelles, à l'heure du renouvellement de la Commission européenne et tandis que les voisins allemands, italiens ou espagnols (270 régions de 33 pays ont une représentation bruxelloise) sont, de leur côté, déjà en ordre de bataille. Les Länder et les régions autonomes espagnoles sont d'ailleurs pourvus à Bruxelles de prérogatives bien plus importantes que les régions françaises, même si les attributions de ces dernières ont vocation à s'étendre. Ces évolutions pourraient aussi fragiliser l'influence des représentations connues pour être particulièrement actives, comme l'Alsace ou la Bretagne. Ce sujet ne manquera pas d'être évoqué lors de la traditionnelle soirée des régions françaises à Bruxelles le 10 juillet.
La réforme territoriale proposée par François Hollande entérine un transfert de compétences aux régions, qui va se reporter sur leurs antennes à Bruxelles. Conséquence : alors même qu'elles seront en plein chambardement, elles auront davantage de dossiers à traiter. Les bureaux locaux sont déjà chargés du lobbying, de la veille, ainsi que de l'aide au montage de projets et à la recherche de financements européens. Par ailleurs, le transfert vers les régions de la gestion des fonds européens structurels et d'investissement doit être déployé cette année. Le sujet était en débat depuis 2012 entre les instances européennes et nationales. Or, jusqu'ici, la gestion du FEDER (Fonds européen de développement régional), du Fonds social européen (FSE), du Fonds européen agricole pour le développement rural (FEADER) et du Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche (FEAMP), était dévolue à l'Etat. Nul doute que les antennes bruxelloises devraient aussi se retrouver en première ligne sur ces sujets.