"L'heure est venue pour les énergies renouvelables d'entrer sur le marché." C'est en ces termes que Joaquín Almunia, vice-président de la Commission chargé de la politique de concurrence, présente les nouvelles lignes directrices relatives à la protection de l'environnement et à l'énergie adoptées par l'exécutif européen ce mercredi 9 avril 2014. Ces nouvelles lignes directrices (1) s'appliquent à partir du 1er juillet 2014.
Cette réforme des modes de soutien aux énergies renouvelables permet "d'introduire, de manière progressive et pragmatique, des mesures d'aide plus efficientes qui tiennent compte des réalités du marché", c'est-à-dire d'abandonner les tarifs d'achat au profit de mécanismes s'appuyant sur la vente de l'électricité produite sur le marché. Cette réforme poursuit deux objectifs : développer les énergies renouvelables "au coût le moins élevé possible pour les contribuables" et "[ne pas] fausser indûment la concurrence au sein du marché unique".
Elles établissent aussi des critères sur la base desquels les Etats membres peuvent dispenser les entreprises électro-intensives exposées à la concurrence internationale des redevances prélevées pour soutenir les énergies renouvelables, telles que la contribution au service public de l'électricité (CSPE) en France.
Vente sur le marché et appels d'offres
Comme la dernière version du projet l'annonçait, les nouvelles lignes directrices introduisent progressivement des procédures de mise en concurrence pour l'octroi des aides publiques. Cette phase de transition s'étalera sur 2015 et 2016 afin de "tester ces procédures de mise en concurrence sur une petite partie de leur nouvelle capacité de production d'électricité".
Concrètement, les nouvelles installations renouvelables devront vendre directement sur le marché l'électricité produite et recevront par ailleurs une prime ou des certificats pour compléter leur rémunération. De plus, elles seront soumises à des obligations en matière d'équilibre de réseau, c'est-à-dire qu'elles auront pour "obligation de compenser les écarts à court terme entre la production réelle et les engagements de production pris".
Parallèlement, l'accès aux mécanismes de soutien public se fera au travers d'appels d'offres afin d'"améliorer l'efficacité coût et réduire les distorsions de concurrence". Les appels d'offres deviendront la règle à partir du 1er janvier 2017.
Les petites installations exemptées
Cette réforme s'appliquera à l'ensemble des nouvelles installations, à l'exception des plus petites qui pourront être soutenues différemment, y compris grâce à des tarifs d'achat. Les lignes directrices donnent deux définitions des "petites installations".
S'agissant du recours au mécanisme s'appuyant sur le marché, les petites installations échappant à la réforme sont celles dont la puissance est inférieure à 500 kilowatts (kW). Pour l'éolien, le seuil est fixé à 3 mégawatts (MW) ou trois aérogénérateurs. La Commission juge que ces petites unités "ont moins de capacité pour vendre directement leur électricité sur le marché électrique de gros".
Quant au recours aux appels d'offres, il ne s'imposera pas aux sites de production dont la puissance est inférieure à 1 MW. Pour l'éolien, le seuil est fixé à 6 MW ou six turbines.
De même, la Commission précise qu'il est possible de déroger à la règle des appels d'offres lorsque "les Etats membres peuvent apporter la preuve que cette méthode d'attribution ne permettra pas d'obtenir un résultat satisfaisant". C'est le cas en particulier lorsqu'un nombre trop restreint d'acteurs est en capacité de répondre à l'appel d'offres, lorsque l'appel d'offres risque d'aboutir à un soutien financier plus onéreux que celui auquel aurait abouti le recours à un autre mécanisme, ou encore lorsque les projets retenus à l'issue de l'appel d'offres risquent de ne pas être concrétisés.
Les électro-intensifs sont choyés
D'autre part, la Commission estime que "les redevances prélevées pour financer le soutien accordé aux énergies renouvelables pèsent de plus en plus sur la facture énergétique de l'industrie et représentent une très lourde charge pour certaines entreprises énergivores, en particulier pour celles qui doivent faire face à une forte concurrence internationale".
En conséquence, les lignes directrices autorisent les Etats membres à réduire cette charge pour 65 secteurs énergivores, tels que la chimie, l'industrie papetière ou la métallurgie.
Les entreprises n'appartenant pas à ces secteurs pourront également profiter d'une réduction. Petit cadeau aux industriels, les lignes directrices adoptées ce jour assouplissent le critère d'intensité énergétique inscrit dans le projet de lignes directrices. Seront partiellement exemptées de redevance les entreprises soumises à la concurrence internationale et dont la facture d'électricité représente au moins 20% du chiffre d'affaires. Il y a quelques jours encore, le projet fixait le seuil à 25%.