Tous ces projets ont un même point de départ : les appels d'offres de l'État de 2011. Afin de préparer la création d'une filière française de l'éolien en mer, l'État a très vite demandé aux énergéticiens d'exposer toute leur chaîne logistique. L'éolien en mer est une industrie lourde qui a besoin de grosses infrastructures et d'espaces portuaires de qualité. Les gestionnaires de ports se sont donc très vite mobilisés, avec l'appui des élus locaux, pour répondre aux exigences de la filière. Ce qui a contribué à des investissements massifs. 220 millions d'euros ont, par exemple, été investis dans l'aménagement d'un terminal, dans le port de Brest, destiné aux énergies marines renouvelables (EMR).
Démarrés en 2017, ces travaux visent à créer un polder, étendue artificielle de terrain sur l'eau, de 40 hectares, dédié à l'éolien en mer (posé et flottant) et à l'hydrolien. La société espagnole Navantia sera la première à s'y installer et mettra en place une unité de pré-assemblage des fondations du futur parc offshore de la baie de Saint-Brieuc. Siemens Gamesa a, quant à lui, jeté son dévolu sur le port du Havre pour implanter son usine d'éoliennes. Et aujourd'hui tout se concrétise enfin : « Les 12 derniers mois sont l'année de la consécration, témoigne Emmanuel Ludot, directeur de la zone industrialo-portuaire du Havre. Nous avons signé les conventions d'occupation du domaine et la construction de l'usine a débuté. C'est un projet majeur pour le port ».
Le Havre s'attend à une activité foisonnante
Avec ses grands espaces peu occupés, ses axes routiers, ses accès à la mer et au fluvial, Haropa-Port du Havre a su convaincre. Mais ce projet a nécessité un investissement de 123 millions d'euros pour adapter le port aux exigences de l'éolien. « La nature des charges manipulées par cette industrie est particulière. Nous avons dû renforcer le quai Joannès Couvert, au sud du terrain, sur 400 mètres, afin qu'il puisse supporter 15 t/m2, et nous avons prévu la création d'une rampe roulier pour charger et décharger de lourdes pièces, sur le quai nord Hermann du Pasquier. Elle sera prête mi-2022 », explique Emmanuel Ludot.
Les ports de Normandie sont prêts
À Cherbourg, la place disponible a fait toute la différence : « Le port de Cherbourg avait historiquement des difficultés à trouver des leviers de développement. Il avait beaucoup d'espace vide. C'est devenu un atout phénoménal, explique Bertrand Marsset, directeur adjoint du Syndicat mixte Ports de Normandie, propriétaire des ports de Cherbourg, Caen-Ouistream et Dieppe. 42 hectares, aucun port n'était capable de l'offrir. » Ils ont d'ailleurs très vite été réservés pour l'usine de pale de LM Wind Power.
L'éolien terrestre aussi mobilise le trafic portuaire
L'éolien offshore n'est pas la seule filière à favoriser l'activité des ports. L'éolien terrestre aussi, à travers les livraisons d'éoliennes, est une source de dynamisme. Le port de Dieppe a ainsi vu croître ce trafic maritime : de six navires accostant en 2007, le flux est passé à 55 en 2019 avec une pointe à 59 en 2017. Les éoliennes en provenance d'Allemagne, d'Espagne, d'Italie et du Portugal ont été installées en Normandie et dans les régions limitrophes. « Dieppe est très bien positionné sur ce créneau. Les navires arrivent avec des turbines, des pales et des sections de mâts. Ça nécessite une capacité d'accueil adaptée et de la place pour stocker. On est en train d'acheter du foncier supplémentaire », explique Bertrand Marsset, directeur adjoint du Syndicat mixte Ports de Normandie. Le port vient également de lancer une étude sur les points bloquants en matière de desserte routière pour accueillir les convois exceptionnels.
Caen-Ouistream est, quant à lui, le port de proximité du parc de Courseulles-sur-Mer. Il accueillera la base de maintenance, un bâtiment industriel qui abritera les postes de contrôle commande du parc et des pièces détachées à stocker, de même que la base-vie du personnel de maintenance. La base de maintenance du parc de Dieppe-Le Tréport sera, quant à elle, installée sur le port de Dieppe.
La Méditerranée se prépare à l'éolien flottant
Les ports de Marseille-Fos et de Port-la-Nouvelle, autour du bassin méditerranéen, empruntent aussi cette voie. 252 millions d'euros ont notamment été investis pour l'extension du port de Port-la Nouvelle afin d'y accueillir les chantiers d'assemblage des éoliennes flottantes. Sur les quatre projets pilotes, deux sont au large de Leucate-Barcarès et Gruissan. Elles devraient être mises en eau à partir de 2021-2022, pour une phase de test d'environ trois ans. Les travaux d'extension du port ont été lancés à l'automne 2019. Ils comprennent la création d'un nouveau bassin portuaire et d'un nouveau quai. Ces travaux devraient s'achever en 2023.