Distribué dans les stations-service françaises depuis avril 2009, l'essence SP95-E10 (sans plomb 95 contenant jusqu'à 10% de bioéthanol) voit ses ventes continuer de progresser en 2015.
Le SP95-E10 a représenté 33,2% du marché total des essences en 2015. Soit 1,6% de plus qu'en 2014, a précisé le 2 février la fédération professionnelle la Collective du bioéthanol, lors d'un point presse. Sa consommation a progressé de 6,3% l'an dernier par rapport à 2014. Mais cette croissance connaît un ralentissement "depuis deux ans", a souligné Sylvain Demoures, secrétaire général du syndicat national des producteurs d'alcool agricole (SNPAA).
Si "neuf véhicules à essence sur dix" en circulation sont compatibles avec cet agrocarburant de première génération, sa présence dans les points de vente "n'augmente pas assez vite", a-t-il déploré. Plus de la moitié (56%) des stations-service proposent du SP95-E10 en France contre 54% en 2014, représentant 5.200 stations. "Les enseignes pétrolières ont équipé 74% de leurs stations-service et la grande distribution continue à progresser avec 43% de leurs stations équipées", a précisé M. Demoures. Les super et hypermarchés détiennent la majorité du marché (60%) contre 40% pour les pétroliers.
L'écart des prix à la pompe se creuse
Depuis le 1er janvier 2016, le SP95-E10 est "le seul carburant" dont la taxe intérieure de consommation (TICPE) a baissé, a rappelé M. Demoures. Cette baisse est de 0,3 centime par litre alors que la TICPE du SP95 et du SP98 a augmenté de 1,7 centime et celle du gazole (diesel) de 3 centimes. "Actuellement, le SP95-E10 est vendu en moyenne 4,5 centimes moins cher que le SP95 dans une même station", fait valoir la fédération professionnelle. Le SP95-E10 "est bien l'essence sans plomb la moins chère dans toutes les stations- service. Son prix est peu dépendant du prix du brut", a indiqué M. Demoures.
L'objectif du gouvernement est d'accroître l'avantage prix pour le SP95-E10, afin de favoriser le développement de la part de bioéthanol dans les carburants. La loi de transition énergétique d'août 2015 vise 10% d'énergie produite à partir de sources renouvelables utilisée dans les transports en 2020 puis au moins 15% en 2030. La France s'était déjà fixée un objectif de 7% d'incorporation de biocarburants dans les essences d'ici 2010. "Nous avons atteint 6,4% en 2015", a précisé M. Demoures. Le carburant essence superéthanol E85 (jusqu'à 85% de bioéthanol), également soutenu par l'Etat, contribue aussi à l'atteinte de ces objectifs.
E85 : un marché de niche
La consommation de superéthanol E85 a ainsi augmenté de 6,5% en 2015 par rapport à 2014 pour représenter 1% du marché des essences. Sa consommation a "triplé entre 2009 et 2015", a souligné Nicolas Kurtsoglou, ingénieur chargé de mission au SNPAA. Le réseau de stations-service le distribuant "a doublé en 2 ans à un rythme de 3 à 4 nouvelles stations par semaine, avec un total de 727 stations". Soit 8% des stations en France.
Avec un prix à la pompe de l'ordre de 0,70 euro par litre, ce carburant représenterait une économie de 400 euros par an, sur la base de 13.000 kilomètres parcourus, a indiqué M. Kurtsoglou.
L'E85 est réservé aux véhicules équipés de la technologie "FlexFuel", permettant de rouler avec différentes essences. Toutefois, le parc de véhicules compatibles reste limité, avec 30.000 voitures équipées de cette technologie. "60.000 supplémentaires" pourraient être dotées de boîtiers de conversion, espère Sylvain Demoures. La procédure d'homologation des boîtiers FlexFuel est en cours d'instruction par le ministère de l'Ecologie. M. Demoures prévoit que ce marché va doubler ou tripler d'ici 2030. Les propriétaires de véhicules FlexFuel bénéficient également en France d'une exonération de malus ou encore d'une carte grise gratuite ou à moitié prix selon les régions.
12 millions d'hectolitres produits en France
En France, le bioéthanol, agrocarburant de première génération, est produit pour moitié à partir de betteraves à sucre et pour l'autre moitié à partir de céréales (maïs et blé fourrager). La France est" le premier producteur européen", a souligné M. Demoures. Elle produit environ 12 millions d'hectolitres de bioéthanol par an (le tiers de la production de l'UE). Ce qui représente 300.000 hectares dédiés au bioéthanol, soit 1% de la surface agricole utile (SAU) française, selon la Collective du bioéthanol.
La fédération se défend d'entrer en concurrence avec l'alimentation et d'accélérer la déforestation, décriés par les ONG environnementales. "Ces surfaces sont depuis toujours dédiées à l'agriculture, sans transformation d'espaces naturels protégés (forêts, prairies, tourbières)".
La recherche "avance" sur la deuxième génération "et permet d'envisager l'utilisation à moyen terme des autres parties de la plante comme les tiges de maïs, la bagasse de canne ou la paille notamment", ajoute la fédération.
Le bioéthanol permettrait de diminuer les émissions de gaz à effet de serre "de plus de 50% en moyenne", a indiqué Sylvain Demoures. Soit un million de tonnes de CO2 économisés par an, selon lui, via l'amélioration des pratiques culturales (réduction d'apports azotés…) ou encore l'optimisation des process (méthanisation des effluents…).