Le constat est sans appel : les observations de l'accroissement des températures moyennes mondiales de l'atmosphère et de l'océan, la fonte généralisée de la neige et de la glace, et l'élévation du niveau moyen mondial de la mer montrent que le réchauffement du système climatique est sans équivoque. De plus, le rapport qualifie de très probable (9 chance sur 10) le rôle des activités humaines dans l'augmentation des températures moyennes depuis le milieu du XXe siècle. Tout converge pour montrer la part essentielle de l'homme dans le réchauffement du climat, a souligné Susan Solomon, présidente du groupe de travail scientifique en présentant le rapport.
Le réchauffement moyen des 100 dernières années est passé de 0,6°C dans le rapport de 2001 à 0,74°C dans le nouveau rapport. Le réchauffement s'est donc encore accéléré. Les 11 années les plus chaudes ont toutes été enregistrées au cours des 12 dernières années. La seconde moitié du 20e siècle a été la période la plus chaude dans l'hémisphère nord depuis 1.300 ans au moins. La température en Europe a augmenté d'environ 1 °C en une centaine d'années, et donc a été plus rapide que le réchauffement moyen de la planète.
Selon les scénarios** de croissance économique et démographique, de percées technologiques et d'émissions tendancielles des gaz à effet de serre, les « valeurs les plus probables » du réchauffement à venir vont de 1,8 degré Celsius à 4 degrés Celsius. Pour le scénario le plus optimiste (B1), la fourchette de réchauffement va de 1,1 degré à 2,9 degrés. Pour le scénario le plus catastrophique, elle s'étale de 2,4 degrés à 6,4 degrés. La plage d'incertitude concernant l'intensité du réchauffement climatique prévu pour ce siècle est donc en fait comprise entre 1,1 et 6,4 °C.
Outre la hausse des températures, les précipitations augmenteraient dans les hautes latitudes et baisseraient dans les zones subtropicales. Les canicules et vagues de chaleur continueront à être plus fréquentes avec des sécheresses plus longues et plus intenses en zones tropicales et subtropicales. Les cyclones tropicaux seront quant à eux plus intenses.
Les experts ont beaucoup plus de certitudes qu'en 2001 sur ce qui se passerait si rien n'était entrepris pour combattre énergétiquement l'effet de serre. Il est très probable (plus de neuf chances sur dix) que les chaleurs extrêmes, les vagues de chaleur et les événements de fortes précipitations continueront à devenir plus fréquents au XXIème siècle , note le rapport. De ce fait, la couverture neigeuse va se contracter. Dans l'Arctique comme dans l'Antarctique les glaces de mer vont diminuer, quelque que soit le scénario étudié. Côté précipitations, les projections ont fait des progrès depuis 2001. Des augmentations de précipitations pluvieuses sont très vraisemblables aux latitudes élevées, alors que des diminutions sont vraisemblables dans la plupart des régions émergées subtropicales. En ce qui concerne les courants marins, le rapport confirme que l'arrêt du Gulf Stream n'est pas pour demain. Meme s'il est très vraisemblable, indique-t-il, que la circulation thermohaline de l'Atlantique nord ralentira au cours du 21ème siècle. Mais il est très improbable qu'elle subisse une transition importante au cours du 21ème siècle, les évolutions à plus long terme ne pouvant encore être établies avec la moindre certitude.
Enfin, le rapport prévoit une élévation du niveau des océans comprise entre 0,18 et 0,59 mètre d'ici 2100 qui pourrait être fortement aggravée par l'accélération possible de la fonte des glaciers du Groënland. Une meilleure connaissance du passé et une modélisation plus poussée ont permis d'affiner la fourchette de 2001 (9 à 88 cm). Mais elles ne permettent pas encore d'établir des valeurs les plus probables.
Ces dérèglements sont d'autant plus préoccupants qu'ils resteront inéluctables pendant plus d'un millénaire. Les émissions anthropiques passées et futures de dioxyde de carbone continueront à contribuer au réchauffement et à l'élévation du niveau de la mer pendant plus d'un millénaire, en raison des échelles de temps nécessaires pour retirer ce gaz de l'atmosphère, souligne le rapport.
Alors que la communauté internationale doit décider de l'avenir du protocole de Kyoto de lutte contre l'effet de serre, l'alerte a sonné chez les décideurs et politiques.
M. Stavros Dimas, membre de la Commission européenne chargé de l'environnement a demandé instamment l'ouverture de négociations internationales en vue de l'adoption d'un nouvel accord de grande portée relatif au changement climatique planétaire, compte tenu des données scientifiques alarmantes publiées. Je suis vivement préoccupé par l'accélération et l'ampleur croissante du phénomène démontrées par ce rapport. Il est plus urgent que jamais que la communauté internationale engage des négociations sérieuses en vue d'adopter au niveau mondial un nouvel accord de large portée qui permettra de mettre un terme au réchauffement climatique de la planète, a-t-il déclaré.
Pour sa part, Achim Steiner, le directeur du PNUE a prévenu que les implications du réchauffement climatique dans les prochaines décennies pour notre économie industrielle, pour les réserves en eau, l'agriculture, la diversité biologique et même la géopolitique sont massives.
Le changement climatique a amené l'humanité à un stade critique où les effets du réchauffement ont des conséquences directes sur la santé et l'environnement, a averti quant à lui le secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon.
Enfin le président français Jacques Chirac a appelé solennellement à une vaste mobilisation internationale en conclusion des travaux de la Conférence pour une gouvernance écologique mondiale. Nous nous engageons à mettre la préoccupation de l'environnement au centre de nos décisions, et à prendre les mesures qui s'imposent pour conjurer des périls qui menacent la survie même de l'Humanité, en particulier celui du changement climatique, a-t-il dit. Il est temps d'admettre que nous sommes parvenus au seuil de l'irréversible, et que nous ne pouvons plus nous permettre d'attendre, a-t-il poursuivi.
Si ces conclusions sont plus que préoccupantes, les décideurs sont maintenant armés des dernières données disponibles pour répondre à ces nouvelles réalités et enfin adopter des mesures concrètes!
Après la réunion du Groupe de travail I, le Groupe de travail II (conséquences des changements climatiques, analyse de la vulnérabilité des systèmes socio économiques et adaptation) se réunira à Bruxelles, du 2 au 5 avril. Le Groupe de travail III (examen des solutions pour réduire les émissions de gaz à effet de serre) se retrouvera pour sa part à Bangkok, du 30 avril au 3 mai. Une synthèse de l'ensemble sera faite dans le cadre d'une réunion plénière, à Valence en Espagne, du 12 au 16 novembre. L'ensemble des travaux livrera les derniers enseignements scientifiques concernant le changement climatique et s'attardera, notamment sur les conséquences de celui-ci en matière de développement durable. Ce quatrième Rapport, auxquelles ont participé plus de 2 500 scientifiques internationaux, devrait également fournir des observations plus fines et plus approfondies sur les différents aspects régionaux du changement climatique.
Le GIEC, créé en 1988 par les Nations unies et l'Organisation météorologique mondiale a procédé, à intervalles réguliers, à une évaluation de l'état des connaissances relatives au changement climatique. Le premier rapport d'évaluation du GIEC, publié en 1990 jetait la base scientifique, a expliqué le Dr Jeremiah Lengoasa, Secrétaire général adjoint de l'Organisation météorologique mondiale (OMM). Il a amené l'Assemblée générale des Nations Unies à décider d'élaborer une Convention-Cadre sur les changements climatiques (CCNUCC). Le deuxième, publié en 1995, a débouché sur l'adoption du Protocole de Kyoto, a poursuivi le Dr Jeremiah Lengoasa et le troisième rapport de 2001 a confirmé le rôle de l'homme dans le réchauffement constaté au cours de la seconde moitié du XXe siècle.
* Résumé à l'intention des Décideurs du quatrième rapport du Groupe
** Voir notre dossier sur le GIEC
Texte officiel du rapport