Rendre cohérentes les actions en matière de politique énergétique et de santé. Telle est l'une des principales demandes formulées par Atmo France, la fédération nationale des associations agrées de surveillance de la qualité de l'air (Aasqa), dans le cadre d'une contribution au futur projet de loi de programmation sur la transition énergétique (LPTE). Le document liste huit autres demandes, dont une réforme du bonus-malus écologique et de nouvelles sources pour pérenniser le financement des Aasqa.
De la cohérence, s'il vous plaît
Atmo France demande que la future LPTE "assure la cohérence des actions menées en faveur du climat ET de la santé". Cette cohérence doit notamment être assurée "lors des choix de politiques nationales et territoriales par l'approche intégrée air énergie climat". Pour appuyer cette demande, la fédération prend trois exemples concrets à partir de sujets bien connus à l'articulation des politiques énergie et air.
Premier exemple : le bois énergie. Atmo France souhaite "le renouvellement du parc vers des appareils effectuant une combustion complète". Cet exemple concerne principalement les "appareils de chauffage individuels anciens" qui n'assurent pas une combustion du bois dans de bonnes conditions. Atmo France prend aussi en exemple la lutte contre l'étalement urbain qui, au-delà de la réduction des déplacements sources d'émissions de gaz à effet de serre et de polluants, "doit également intégrer la prévention de l'exposition de la population et en particulier des personnes les plus sensibles aux polluants de l'air dans les zones les plus défavorables".
Le troisième exemple concerne le système bonus-malus, "qui profite aux acquéreurs de véhicules neufs émettant le moins de CO2, [mais] ne prend pas en compte les émissions de polluants de l'air comme les particules et les oxydes d'azote". Sans grande surprise, la prise en compte et l'affichage des émissions de polluants atmosphériques dans le cadre du bonus-malus fait l'objet d'une demande à part entière de la fédération des Aasqa. A noter que la formulation retenue par Atmo France évoque "les éventuels futurs systèmes de bonus-malus". La fédération souhaite-t-elle suggérer qu'un abandon pur et simple du mécanisme ne serait pas forcément une mauvaise chose ?
Fiscalité écologique et logique pollueur-payeur
Une autre attente des Aasqa concerne la pérennité de leur financement. En septembre 2013, Atmo France avait déjà alerté sur la multiplication des missions attribuées aux associations de surveillance de la qualité de l'air dans un contexte de finances publiques "étriquées" incitant certaines collectivités locales à réduire leur contribution volontaire, voire la supprimer à l'image des Hauts-de-Seine qui ne financent plus Airparif. La contribution d'Atmo France au futur projet de loi est donc l'occasion de revenir sur ce point et de suggérer à l'Etat deux mesures.
Tout d'abord, Atmo France souhaite "qu'une petite partie du produit de toute fiscalité dont on attend un impact positif sur les réductions d'émission de polluants de l'air et du climat soit affectée au financement [des mission des Aasqa]". Le document n'est pas plus explicite, mais Régine Lange, alors présidente d'Atmo France, avait déjà évoqué en septembre dernier une ponction de l'ordre de "0,0X%" des recettes tirées du verdissement de la fiscalité. Quant aux dispositifs fiscaux qui pourraient être mobilisés, elle avait cité l'éventuelle hausse des taxes sur le diesel, la fiscalité liée au stationnement ou l'écotaxe poids lourds.
Seconde proposition : "que les transports (routiers, aériens, maritimes, …) contribuent financièrement au dispositif de surveillance de la qualité de l'air". "La contribution financière des activités agricoles" est une seconde option envisagée. La mise à contribution de ces deux secteurs, se ferait "au même titre que les industriels au travers de la taxe générale sur les activités polluantes (TGAP)". Pour rappel, les Aasqa sont actuellement financées par des dotations de l'Etat, des subventions volontaires des collectivités territoriales et des dons libératoires plafonnés de la TGAP applicable aux industriels.
Santé et gouvernance territoriale
Enfin, les six autres attentes d'Atmo France concernent tout d'abord la santé. Elle voudrait que la future loi "reconnaisse que les utilisations énergétiques peuvent contribuer à la pollution de l'air". A ce titre, les consommations énergétiques "représentent un enjeu de santé publique, enjeu de nature à mobiliser au-delà de la seule problématique de la consommation d'énergie". Ensuite, la fédération souhaite que la LPTE "prévoit d'intégrer l'évolution de la connaissance des enjeux sanitaires pour adapter si besoin les mesures déclinées".
En matière de gouvernance territoriale, Atmo France soutient deux mesures, dont l'une au moins devrait figurer dans la future loi. Il s'agit de l'introduction d'un volet "air" dans les plans climat énergie territoriaux (PCET) qui deviendrait alors des plans climat air énergie territoriaux (PCAET). La mesure figure dans les documents relatifs à la loi. La seconde proposition consiste en une réforme des observatoires régionaux climat air énergie afin qu'ils travaillent en étroite collaboration avec les Aasqa qui disposent notamment d'outils d'aide à la décision et d'évaluation des actions menées.
Enfin, Atmo France espère que la loi "[identifiera] clairement les domaines des transports mobilités et urbanisme aménagement du territoire comme sources de consommations énergétiques et d'émissions atmosphériques (GES, polluants de l'air) mais surtout comme leviers d'actions pour réduire ces consommations et émissions, et pour limiter l'exposition des populations aux pollutions locales (cartes stratégiques de qualité de l'air)". De même, la fédération souhaite que la loi "intègre systématiquement dans les nouveaux dispositifs visant à la rénovation thermique des bâtiments la problématique de l'air intérieur". La question du renouvellement de l'air dans les bâtiments bien isolés est l'un des aspects centraux de ce problème, rappelle Atmo France.