De son côté le ministre de l'Écologie, de l'Énergie, du Développement durable et de la Mer Jean-Louis Borloo s'est dit déçu. Déçu par toutes les ''controverses et les malentendus'' qui ont entouré la mise en place du dispositif de contribution carbone : ''la contribution carbone a été l'otage de débats qui ont dépassé largement le champ de l'écologie et qui ont conduit à une profonde incompréhension'', explique-t-il dans un communiqué. Le ministre a surtout tenu à rappeler que ''les socialistes et certains écologistes n'ont pas voté la taxe carbone en son temps'' et dit regretter qu'ils ''s'émeuvent et critiquent aujourd'hui la décision de se coordonner au niveau européen''.
Le ministre a en effet justifié cet abandon en mettant en avant non pas la claque électorale mais les réflexions de l'Union européenne à ce sujet ! Selon lui, la France n'a pas obtenu de ''dérogation'' pour appliquer sa taxe carbone à ses entreprises soumises au régime des quotas de CO2 comme le demandait le Conseil Constitutionnel car l'UE réfléchit à un système similaire au niveau des 27 états membres. La Commission européenne travaille en effet sur la révision de la directive sur la taxation de l'énergie de 2003 qui fixe des minima de taxation pour les produits énergétiques et l'électricité lorsqu'ils sont utilisés comme carburants ou combustibles de chauffage. La nouvelle version pourrait inclure une taxation sur la base des émissions de carbone en incluant les entreprises soumises aux régimes des quotas, mais elle n'inclurait pas les transports et l'agriculture. Cette nouvelle directive devrait être présentée par la Commission européenne en fin d'année 2010 ce qui sous-entend une entrée en vigueur dans plusieurs mois !
Mais ce matin, en sortie du conseil des ministres, Nicolas Sarkozy a évoqué une autre raison à l'abandon du projet de contribution carbone. Le Président a ''confirmer sans ambiguïté le choix d'une fiscalité écologique'', mais a précisé qu'il ''subordonne la création d'une taxe carbone intérieure à une taxe aux frontières'' pour se protéger de ''la concurrence déloyale de ceux qui continuent à polluer sans vergogne''. Le projet français de contribution carbone ne verrait donc le jour que si au niveau européen était mis en place un mécanisme taxant les importations de produits extra-européens en fonction de leur contenu carbone. ''Il serait absurde de taxer les entreprises françaises en donnant un avantage compétitif aux entreprises des pays pollueurs'', a expliquer le Président.
Au final, les explications divergent mais se rejoignent sur un point : c'est à l'Europe de décider. Une position qui consterne les associations de protection de l'environnement. ''Plusieurs de nos partenaires européens ont déjà mis en place une telle mesure, sans pénaliser leur industrie'', rappelle la fondation Nicolas Hulot. ''Il existe en effet des aménagements possibles permettant d'être vertueux, à la fois sur le plan économique et écologique'', explique l'association ajoutant que ''l'Europe est une fois de plus l'excuse toute trouvée pour renoncer à un projet qui n'est plus aujourd'hui soutenu par la majorité présidentielle.''
Le Réseau Action Climat doute pour sa part de la possibilité de mettre en place une taxe carbone au niveau européen : ''en 1992, la Commission européenne a proposé une taxe sur les émissions de CO2 et la consommation d'énergie et a échoué à cause de la règle de l'unanimité, qui prévaut en matière de fiscalité. Ce qui n'a pas été possible à 12 Etats membres sera encore plus complexe à 27.''