La présidence polonaise de la COP 24 veut profiter de la conférence pour faire adopter une déclaration sur la "transition juste". Le concept n'est pas nouveau : porté par les représentants des travailleurs, il est repris dans le préambule de l'Accord de Paris. Ce dernier stipule que la mise en oeuvre des politiques climatiques ne doit pas se faire au détriment des travailleurs. Il s'agit d'assurer de bonnes conditions de reconversion aux travailleurs des secteurs menacés.
Accompagner les transformations
L'abandon des énergies fossiles et les problèmes sociaux associés, sont au coeur du sujet. "C'est clairement le sujet qui préoccupe la Pologne", rappelle Lola Vallejo, directrice du programme climat de l'Iddri. Pour autant, tous les observateurs s'accordent à dire que cette déclaration aborde le sujet de façon plus large. "Tous les secteurs de l'économie sont concernés : transports, bâtiment, agriculture, etc. Il faut avoir le courage de le dire", rappelle Benoît Leguet. Il faut anticiper les transformations à venir et prévoir les mesures d'accompagnement.
Le sujet intéresse en premier lieu les syndicats. Mais, "les entreprises attendent aussi une déclaration forte sur la transition juste", explique Gillian Nelson, de la We Mean Business Coalition. Globalement, tous les acteurs attendent une vision à long terme sur le sujet. Ils y voient une occasion d'accélérer l'action, plutôt qu'une manoeuvre dilatoire. Cette déclaration "arrive à point nommé", abonde Lucile Dufour, du Réseau Action Climat (RAC). Elle attend surtout "des principes opérationnels au niveau national".
En l'occurrence, Michel Colombier présente l'Espagne comme un bon exemple de prise en compte concrète des questions sociales. Le pays vient d'adopter mi-novembre un plan pour passer à 70 % d'énergies renouvelables en 2030 et 100 % en 2050. Pour y parvenir, explique le directeur scientifique de l'Iddri, le gouvernement a commencé par négocier avec les syndicats un accord de sortie du charbon. Celui-ci fixe des schémas de retraite anticipée, des dispositifs de formation et des programmes d'investissements dans les régions pénalisées. Cette démarche est considérée comme une bonne pratique dont peuvent s'inspirer d'autres pays. A commencer par la Pologne.
Orienter les financements vers la transition
Quant à la question financière, elle reprend les points de blocage qui ont émaillé les négociations depuis 10 ans. Le premier concerne l'ampleur de l'aide disponible et la prévisibilité des financements futurs. A partir de 2020, les pays développés devront consacrer 100 milliards de dollars par an pour aider les pays en développement. Mais à un an de l'échéance, la promesse formulée en 2009, à l'issue de la COP 15 de Copenhague (Danemark), peine à se concrétiser. La COP 24 devrait au moins "être l'occasion d'augmenter la participation des pays développés au Fonds vert", espère Lucile Dufour.
Tout ne sera probablement pas résolu lors de la COP. Les négociateurs ont d'ores et déjà prévu d'en reparler lors du Sommet organisé en septembre 2019 par l'ONU. Pour préparer ce rendez-vous, António Guterres, le secrétaire général de l'ONU a demandé à la France et à la Jamaïque de préparer conjointement le volet "finance" du Sommet. Une approche qui ne devrait pas se limiter à l'aide promise à Copenhague. "Les 100 milliards de dollars sont importants pour maintenir la confiance des Etats les plus vulnérables, mais le plus important reste les 5.000 milliards d'investissements annuels qu'il faut réorienter vers la transition bas carbone", explique Benoît Leguet. Et l'essentiel de ces 5.000 milliards est constitué de flux domestiques.