En France, la proposition par la Commission européenne d'une révision de la directive sur les poids et dimensions des camions avait suscité une forte opposition, jusque dans les rangs des eurodéputés du groupe Renew comme Dominique Riquet. Mais face aux soutiens des pays du Nord et de l'Est, de l'Allemagne et même de l'Espagne, la position hexagonale avait peu de chance de peser suffisamment. Par 330 voix pour, face à 207 contre et 74 abstentions, le Parlement européen a donc voté en début d'après-midi, ce mardi 12 mars, en faveur d'un texte autorisant le passage des poids lourds à 44 tonnes au lieu 40 tonnes pour le transport international et la circulation des mégacamions – jusqu'à 60 tonnes et 25 mètres de long – dans les espaces transfrontaliers.
À condition toutefois, pour ces derniers, que le pays permette déjà leur passage sur son territoire, ce qui n'est pas le cas de la France, ou qu'un accord soit passé entre les deux pays. Avant d'autoriser ces « European Modular System » (EMS), les États membres devront par ailleurs « procéder à une évaluation préalable des nouveaux itinéraires, de leur impact possible sur la sécurité routière, les infrastructures, la coopération modale, le transfert modal et l'environnement », précise le texte.
Une appréhension divergente des enjeux
Ces détracteurs dénoncent au contraire une révision poussée par les pays champions du « dumping social », une source d'accroissement des risques en termes de sécurité, d'accélération de l
Risque de calage pour l'intermodalité
Les acteurs du secteur du fret ferroviaire français et du transport combiné rail-route réunis au sein de l'Alliance 4F redoutent ainsi une baisse du transport modal de l'ordre de 20 %, pour 10,5 millions de trajets routiers supplémentaires par an, susceptibles de générer quelque 6,6 millions de tonnes de CO2 en plus. « On nous a promis le Green Deal, pour nous servir aujourd'hui des mégatrucks ! Où est la logique ? » s'insurgent-ils, fustigeant une future directive « inacceptable et contraire aux enjeux climatiques et économiques de la France ». Regrettant « un vote irresponsable », la député écologiste Karima Delli a appelé le gouvernement français à refuser le passage de ces mégacamions sur le territoire. Le ministre des Transports, Patrice Vergriete, n'entend pas agir autrement. « La France redit son refus d'une libéralisation de la circulation internationale des camions de 44 tonnes et des mégatrucks. Aujourd'hui, la priorité est le report modal, en particulier vers le ferroviaire », a-t-il assuré après le vote du Parlement.
Selon le texte, la Commission devra présenter au Parlement européen et au Conseil, d'ici à 2027, puis tous les quatre ans, un rapport d'évaluation détaillé sur l'application de la directive : l'évolution du transport routier national et international, l'impact sur la sécurité routière, l'infrastructure routière, le fonctionnement du marché intérieur du transport routier, la compétitivité du secteur, la connectivité et le transfert modal. Mais le projet doit encore être négocié en trilogue entre la Commission, le Parlement et le Conseil européen. Il pourrait encore évoluer en fonction du résultat des prochaines élections au Parlement, en juin prochain.