Interviewé par RMC et BFMTV ce mercredi 16 mai, le ministre de la Transition écologique Nicolas Hulot a demandé au groupe pétrolier Total de réduire "au maximum" l'utilisation d'huile de palme dans sa bio-raffinerie de La Mède (Bouches-du-Rhône) qui démarrera cet été 2018.
Pour rappel, Total a lancé en 2015 le projet de transformation de sa raffinerie de La Mède pour produire des biocarburants, suscitant des interrogations sur la provenance des huiles végétales qui l'approvisionneront. En particulier, l'huile de palme pointée pour ses impacts sur la déforestation en Asie du Sud-Est. Fin 2016, le site avait arrêté son activité de raffinage de pétrole brut, soit 153.000 barils par jour.
Total a reçu, ce 16 mai, l'arrêté délivré par le préfet des Bouches-du-Rhône et de la région PACA, qui l'autorise à exploiter sa bio-raffinerie. Cet arrêté encadre l'usage des matières premières, notamment d'huile de palme, qui seront utilisées pour produire "du biodiesel de type HVO (hydrotraitement des huiles végétales)", a indiqué le ministre dans un communiqué.
300.000 tonnes d'huile de palme brute par an
La bio-raffinerie est autorisée à utiliser jusqu'à 450.000 tonnes d'huiles végétales brutes (palme, colza, soja …) par an dans le cadre de son approvisionnement. Total s'engage à limiter l'approvisionnement en huile de palme brute à un volume inférieur à 50% des volumes de matières premières qui seront traitées sur le site."Soit au plus 300.000 tonnes par an", précise ce mercredi le groupe dans un communiqué, après avoir été interpellé par Nicolas Hulot. Le site s'approvisionnera à hauteur de 60 à 70% d'huiles végétales brutes "d'origines aussi diverses que le colza, le tournesol, le soja, la palme, le maïs ou de nouvelles plantes du type carinata", poursuit Total.
La bio-raffinerie traitera également 30 à 40% de graisses animales, d'huiles alimentaires usagées et d'huiles résiduelles (huiles issues de déchets et de l'industrie papetière)."Cette part ayant vocation à augmenter au fil des années en fonction de la disponibilité de ces ressources alternatives", assure le groupe. Le recyclage de graisses animales pourrait représenter au moins 100.000 tonnes par an du plan d'approvisionnement du site. L'Etat a fixé comme objectif à Total d'utiliser au moins 25% de matières premières issues du recyclage des huiles (huiles alimentaires usagées, graisses animales, distillats d'acide gras).
Des huiles qui doivent répondre aux critères européens de durabilité
L'arrêté d'autorisation prévoit également l'obligation d'utiliser des huiles répondant aux critères de durabilité fixés par la Commission européenne, "afin de s'assurer que la production des biocarburants ne se fera pas au détriment de la biodiversité et de la protection de l'environnement", a ajouté Nicolas Hulot.
Pour ce qui concerne les critères de durabilité de l'huile de palme brute, Total s'est engagé à promouvoir la certification internationale carbone et durabilité (ISCC) ou toute autre certification équivalente reconnue par la Commission européenne. Le groupe s'assurera du respect par l'ensemble de la chaîne logistique de ces critères et en particulier que l'approvisionnement soit issu de producteurs certifiés RSPO (Table ronde sur l'huile de palme durable).
Sur BFMTV/RMC, Nicolas Hulot a demandé à Total "d'essayer d'année en année de réduire la part d'huile de palme et d'augmenter la part d'huiles usagées". Le Plan climat prévoit la publication d'une stratégie française contre la déforestation importée qui est en cours d'élaboration. "Je me devais donc de faire en sorte que l'usine de la Mède, projet soutenu par le gouvernement précédent, soit en cohérence avec notre future stratégie", a souligné le ministre.
En avril dernier, les ONG Greenpeace et Les Amis de la Terre, citant un document de la préfecture des Bouches-du-Rhône, avaient affirmé que la bio-raffinerie de Total allait importer 550.000 tonnes d'huile de palme chaque année."Total évoque maintenant un plafonnement à 300.000 tonnes d'huile de palme brute ce qui est colossal. A cela, il faut ajouter les distillats d'huile de palme que Total essaye de présenter comme des résidus. Total deviendrait le premier importateur français d'huile de palme. Aucune certification ne peut garantir que ce projet n'entraînera pas de déforestation", dénonce aujourd'hui Sylvain Angerand, coordinateur des campagnes pour Les Amis de la Terre.