L'objectif est clair : inciter les acheteurs de véhicules neufs à privilégier les voitures les plus sobres en carbone. Selon le ministère de l'Ecologie, ce mécanisme, purement incitatif, est destiné à donner un signal-prix écologique au marché automobile. Ce dispositif permettra de réduire le prix d'achat des véhicules écologiques, responsabiliser le consommateur, accélérer le renouvellement durable du parc automobile et stimuler l'innovation technologique des constructeurs en les encourageant à cibler leur offre sur les produits les plus propres, a estimé Jean-Louis Borloo.
Concrètement, les automobilistes qui achèteront en 2008 une voiture émettant plus de 160 grammes de CO2 au kilomètre devront s'acquitter d'une taxe au moment du paiement de la carte grise. Celle-ci oscillera de 200 € pour les véhicules dont les émissions sont comprises entre 161 et 165 g CO2/km, 750 € quand les émissions sont comprises entre 166 et 200 g CO2/km, 1600 € entre 201 et 250 g CO2/km et à 2.600 euros, au-delà de 250 g CO2/km. Ce malus concernera environ 25% des ventes, mais le malus maximal le plus élevé (2600 euros) ne concernera que les plus grosses berlines les plus polluantes, soit environ 1 % des véhicules neufs.
À l'inverse, l'automobiliste achetant, à partir d'aujourd'hui, une voiture propre, émettant moins de 130 grammes de CO2 par kilomètre bénéficiera d'une prime à l'achat s'échelonnant entre 200 et 1.000 euros : 1000 € pour les véhicules émettant moins de 100 gCO2/km, 700 € pour les véhicules dont les émissions sont comprises entre 101 et 120 g CO2 et 200 € quand les émissions de CO2 sont comprises entre 121 et 130 g CO2/km. Selon le ministère, ce type de véhicule représente aujourd'hui 30 % des ventes.
En outre, lorsque l'acquisition d'un véhicule éligible au bonus sera accompagnée de la mise au rebut d'un véhicule de plus de 15 ans, elle donnera droit à un ''super bonus'' de 300 €. Celle-ci s'ajoutera aux primes commerciales que les constructeurs automobiles ont mis en place de leur côté ces dernières années. Ce qui permettra de retirer du parc automobile les voitures les plus polluantes qui contribuent fortement à la détérioration de la qualité de l'air en milieu urbain, précise le ministère.
Un bonus spécifique de 5 000 € pour l'acquisition de voitures émettant moins de 60 g de CO2/km est prévu pour favoriser le développement de véhicules très économes en carburant, notamment électriques.
Enfin aucun malus ne sera prélevé et aucun bonus ne sera versé, en cas d'acquisition d'un véhicule dont les émissions sont compris entre 130 et 160 g CO2/km, soit environ 45 % des acquisitions nouvelles.
L'éco-pastille devrait s'autofinancer, selon les ministères en charge du dossier, puisque les recettes du malus financeront les dépenses du bonus et du superbonus. Il est d'ailleurs prévu de réajuster périodiquement les seuils d'émissions pour inciter les constructeurs à mettre au point des véhicules de plus en plus sobres en carbone. En effet tous les 2 ans, les seuils de déclenchement du bonus et du malus seront durcis de 5 g de CO2/km.
Si la mesure se veut incitative et dissuasive, elle ne fait pas l'unanimité auprès des associations qui la jugent limitée et prise sans concertation. Cette simple taxe à l'achat s'apparente à un droit à polluer forfaitaire alors que les associations réclamaient une taxe annuelle sur le modèle de la vignette, notent dans un communiqué commun France Nature Environnement, Agir pour l'Environnement et la FNAUT. En outre lors des conclusions du Grenelle de l'environnement le 25 octobre, Nicolas Sarkozy avait validé l'idée d'une taxe écologique annuelle sur les véhicules neufs les plus polluants. Cette taxe permettrait de financer le retrait des vieilles voitures polluantes grâce à une prime à la casse progressive et durable pour aider au rachat d'un véhicule propre, avait-il indiqué. C'est donc finalement une taxe à l'achat qui aura été retenue.
Outre le fait que le malus ne concerne qu'un peu moins de 25% des véhicules vendus en 2006, les associations déplorent le manque de concertation. Nous n'avons pas pu porter officiellement notre demande d'un bonus - au travers d'un crédit d'impôt - bénéficiant aux autres usagers de l'espace public qui font le choix de mode de déplacement doux comme la marche, le vélo ou les transports collectifs, spécifient-t-ils.
Si le système devrait permettre une légère accélération du renouvellement du parc automobile et ainsi diminuer les émissions de CO2, il ne concerne toutefois que la moitié des véhicules et risque de favoriser les véhicules diesel, certes moins émetteurs de CO2, mais plus émetteurs de particules fines…En outre, il manque de cohérence avec l'étiquette énergie : la classe neutre du bonus/malus coupe la classe C (120 à 140 gCO2/km) en deux. Rappelons que cette étiquette énergie, semblable à celle qui existe pour les produits électroménagers depuis 1995, est apposée sur les véhicules neufs des concessionnaires. Classée de A (vert foncé) pour des émissions de CO2 inférieures à 100 g/km pour les moins polluantes, à G (rouge) pour celles dépassant les 250 g/km, elle a déjà pour objectif d'inciter les Français à acheter des voitures plus propres et plus économes.
Les différents textes juridiques nécessaires à la mise en place de ce dispositif devraient être adoptés d'ici la fin de l'année. Un amendement au projet de loi de finances rectificative pour l'année 2007 afin de créer le malus à l'acquisition a été déposé par le gouvernement et un décret qui sera rétroactif sera publié prochainement au Journal officiel pour organiser le versement du bonus et du super bonus à l'ensemble des acheteurs concernés.
Par ailleurs, devront encore être clarifié la coexistence de l'éco-pastille avec les mesures déjà adoptées par le passé comme les crédits d'impôt sur les véhicules hybrides, GPL et GNV et la majoration de la taxe à l'immatriculation sur les cartes grises pour les véhicules très émetteurs de CO2 applicable depuis le 1er juillet 2006. Rappelons que cette majoration est de 2€ par gramme de CO2 supplémentaire entre 200 grammes de CO2 par km et 250 grammes de CO2 par km et de 4 € par gramme de CO2 au-delà de 250 grammes de CO2 par km.
Notons encore que le système Bonus / Malus avait été proposé en juillet 2004 par Serge Lepeltier, à l'époque Ministre de l'Écologie. Mais la levée de bouclier qu'il avait suscitée à l'époque, à commencer au sein de l'UMP, en avait eu raison. Comme quoi, les temps changent !