Pour atteindre la neutralité carbone à l'horizon 2050, la France compte sur une accélération du développement des énergies renouvelables. Or, selon le scénario retenu (1) , les énergies renouvelables couvriront un « espace important », de 1,5 à 1,7 % du territoire métropolitain, estime l'Ademe, dans une étude sur les énergies renouvelables et les sols (2) . Soit entre 0,85 et 0,95 million d'hectares (ha). Les surfaces imperméabilisées seront inférieures à 10 000 ha, précise l'estimation, puisque installation renouvelable ne rime pas forcément avec imperméabilisation totale. Cependant, ces installations ont des impacts sur les sols, que ce soit pendant la phase de travaux, d'exploitation ou de fin de vie.
Dans son étude, l'Ademe a tenté d'évaluer ces impacts et d'identifier les pistes pour les réduire, filière par filière. Cette évaluation est maximale, précise-t-elle, car elle ne prend pas en compte la possibilité de développer plusieurs activités sur une même surface, l'une des pistes avancées pour limiter l'impact de ces infrastructures énergétiques.
Éolien : limiter l'impact durant la construction
Photovoltaïque : éviter les zones naturelles
De son côté, « le photovoltaïque au sol est la principale source potentielle de consommation d'espaces naturels, agricoles et forestiers, devant les installations de méthanisation », entre 75 000 et 125 000 ha consommés selon les scénarios, pour quelques milliers en 2020. L'Ademe préconise donc de donnr la priorité au développement du solaire sur les toitures ou les sites déjà artificialisés ou dégradés.
Car, pour les centrales au sol, chaque étape peut avoir des impacts : la construction (défrichage, terrassement, aplanissement, création de voies d'accès, tranchées pour les câbles), l'exploitation (modification du microclimat local et du couvert végétal), la fin de vie. Ces impacts peuvent provoquer une érosion accélérée des sols, une perte de matière organique, une moindre infiltration de l'eau…
Cependant, note l'étude, ces impacts varient selon le dimensionnement et la conception des centrales (espaces entre les rangs, hauteur et inclinaison des panneaux…). « Tandis qu'une centrale dense présentant une emprise faible (ex. : 1 ha/MW) limitera fortement les possibilités de co-usages, une centrale plus diffuse présentant une emprise souvent plus importante (2 à 3 ha/MW) pourra permettre des co-usages, comme de l'agrivoltaïsme et le maintien de fonctions écologiques, notamment pour les sols. » Et même avoir des effets bénéfiques dans le cas de l'agrivoltaïsme, bien que le retour d'expérience reste insuffisant. L'Ademe recommande donc le recours au génie écologique pour dimensionner et concevoir les centrales et de privilégier le maintien et la gestion du couvert végétal sous ces installations.
Biomasse : attention au choix de matière première
« À l'horizon 2050, entre 11,5 et 14,3 millions d'hectares de sols agricoles et forestiers pourront être nécessaires pour répondre aux besoins en biomasse énergétique », poursuit l'étude. Cette estimation comprend, d'une part, les cultures spéciales (maïs, betteraves, miscanthus…) qui représenteraient entre 0,8 et 2,1 millions d'hectares à usage énergétique exclusif (soit 4 à 10 % de la surface agricole cultivée). Les cultures intermédiaires (Cive), qui n'entrent pas en concurrence directe avec d'autres productions agricoles, représenteraient, d'autre part, entre 7,4 et 8,8 millions d'hectares. Auxquels s'ajoutent entre 0,7 et 4,9 millions d'hectares de sols forestiers (4,1 à 28,8 % de la surface forestière selon le scénario).
« Pour répondre à l'augmentation de la demande de bois-énergie, l'utilisation d'un volume plus important de plaquette forestière se profile (la production de plaquette a presque triplé ces dix dernières années) », note l'Ademe. Or, la hausse de récolte de rémanents et de menus bois, riches en minéraux, peut avoir un impact sur la fertilité des sols forestiers et les services écosystémiques qu'ils rendent.
Les cultures énergétiques et les Cive sont, quant à elles, mobilisées pour la méthanisation. Si les Cive ont globalement un impact positif sur les sols (érosion moindre, apport d'éléments nutritifs, biodiversité), elles peuvent nuire aux réserves hydriques des sols et donc à la culture principale. Les cultures spéciales, limitées pour l'instant en France, entrent, quant à elles, directement en concurrence avec l'usage alimentaire.
Autre point de vigilance pour les sols : les surfaces nécessaires pour l'épandage des cendres des chaufferies à biomasse et des digestats de méthanisation. Elles pourraient représenter de 25 à 40 % de la surface cultivée en France. Si ces éléments présentent un intérêt agronomique pour les sols, l'Ademe préconise néanmoins de mettre en place des stratégies d'épandage tenant compte des cultures et propriétés du sol.